Virée rapide de Bouteflika à Laghouat

Abdelaziz Bouteflika
Abdelaziz Bouteflika

Les sorties du président se font de plus en plus rares. Il y a eu cette année, Tamanrasset, puis l'inauguration du métro et aujourd'hui un sortie de quelques heures à Laghouat. Pour cette dernière, elle arrive sur le tard.

Unique dans les agendas politiques. Le président Bouteflika se déplace aujourd’hui mercredi à Laghouat pour ouvrir une année universitaire, déjà commencée depuis trois mois. Cependant, les délais intéressent peu le président. Comme souvent, il est plus dans la posture symbolique.

Au moment où les étudiants se préparent à prendre leur congé d’hiver, le président va s’offrir un bref bain de foule dans cette ville du Sud qui a connu plusieurs mouvements de protestations, notamment les chômeurs qui n'avaient cessé de réclamer du travail pour les jeunes de cette région, particulièrement touchée par le chômage. Aucune réponse ne leur fut donné. Bref.

Le programme présidentiel est hyper-allégé. Le minimum pour ne pas fatiguer le président. Il ne serait plus en forme pour supporter plusieurs activités comme lors de ses anciennes sorties. On se souvient de sa visite de quelques heures à Tamanrasset en avril dernier pour l’inauguration du transfert de l’eau potable d’In Salah à Tamanrasset. Un mégaprojet de 3 milliards de dollars dont les travaux n’étaient en réalité pas finis comme annoncé à l’époque. A l'époque, selon des sources locales, les services de la présidence avait réduit le trajet du président au strict minimum pour lui éviter tout malaise. Même programme pour Laghouat. Un discours, un petit bain de foule pour les caméras et des petits-fours. Puis rien. Le reste tout le reste des inaugurations reviendront aux ministres qui se feront un plaisir de dévoiler les plaques, de toucher des mains et de se prêter aux caméras de l'Entv.

Mais alors que va dire le président ? se demande la presse, après un silence qui dure depuis son discours du 15 avril. Annoncera-t-il les prochaines échéances électorales ? Une chose est certaine : il ne reviendra pas sur les projets de réformes votés par l’assemblée, comme le souhaitaient certains de ses soutiens patentés. Bouguerra Soltani, l’islamiste en costume, Louisa Hanoune l’ancienne trotskyste, ou bien Zohra Drif-Bitat, sénatrice désignée sur le quota présidentiel, avaient demandé avec insistance l’intervention du président pour sauver ses réformes. Car ces politiques estimaient que les députés avaient vidé de leur sens le projet de réformes politiques annoncé au printemps par Abdelaziz Bouteflika. Une argument difficile à croire quand on connaît l'allignement "quasi-panurgiste" des députés au programme présidentiel. Les parlementaires, ceux de l'alliance encore plus, ne font que ce qu'attend d'eux la présidence.

Conflit DRS-Présidence ?

Il n’y pas que l’année universitaire qui tarde à être inauguré par le président. Les retards sont à tous les étages de l’Etat. Ainsi l’année judiciaire aussi attend toujours la visite du président de la République. Mais là les problèmes seraient un tantinet plus compliqués. Ainsi selon des sources très bien informées, le retard de l'ouverture de l'année judiciaire serait dû à un conflit d'autorité entre la Présidence et le DRS à propos de changements à la tête de la Cour suprême. Après Sonatrach reprise en main par la présidence, voilà la Cour suprême au centre des influences.

Abdelaziz Bouteflika veut mettre un terme aux mandats des deux dirigeants de la Cour, nommés en octobre 2006, soit depuis 5 ans. Le président de la Cour, Kaddour Berradja, et le procureur général, Mohamed Guettouche. Depuis l'indépendance, seuls deux présidents ont dépassé cette durée de 5 ans. Mustapha Benbahmed (1969-1979) et Nasri Azzouz (1995-2001). Ainsi que trois procureurs, El Hadi Mostefi (1964-1979), Mostefa Aït Mesbah (1989-1995), Mohamed Dahmani (1995-2001).

Mais au-delà de ces luttes d’influences, il faut avouer que le président ne doit pas être pressé d’aller rencontrer les magistrats quand on sait que le bilan de la justice en matière de lutte contre la corruption. Plusieurs gros dossiers de pot-de-vin et détournements sont en suspens dans les tribunaux et de nombreux départements ministériels sont éclaboussés par des affaires de corruption comme au ministère des travaux publics. Un détournement évalué à 200 millions de dollars a entaché le projet de l’autoroute Est-Ouest, plusieurs hauts cadres du cabinet du ministre d’Amar Ghoul sont en détention préventive, sans que ce dernier ne soit, pour autant, inquiété par la justice. La tempête médiatique soulevée par cette affaire a laisse ce ministre indifférent. Les observateurs comprendront donc que la justice fait exactement ce qu’attend d’elle le pouvoir politique, autrement dit, la présidence.

Sofiane Ayache

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Commentaires (2) | Réagir ?

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mustapha ouahadda

Bonjour, est-ce qu'il y a encore des chances de revoir la réaparution du journal Le Matin, un jour ?

avec toujours sa ligne de conduite ni sous la botte de x ni sous la botte de y!!

Mustapha, Algérien from Canada.

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Atala Atlale

Vous parlez d'un Président malade, soucieux beaucoup plus de son état de santé que de celui du pays. Quand enfin comprendra t-on que la constitution prévoit ce genre de situation. Ceux qui veulent qu'il reste à son poste ce sont ceux justement qui y ont intérêt. Et leur intérêt n'est pas celui du peuple, bien au contraire !