Egypte : premières législatives de l'après-Moubarak dans un contexte de crise

La révolte de la place Tahrir a éclipsé la campagne électorale.
La révolte de la place Tahrir a éclipsé la campagne électorale.

Les Egyptiens votent lundi pour les premières élections législatives depuis la chute de Hosni Moubarak en février, un scrutin crucial où le score des islamistes est l'un des principaux enjeux et qui se déroule dans un contexte de crise politique.

Sans attendre l'ouverture du scrutin à 8h, des files d'électeurs se sont formées devant des bureaux dans plusieurs quartiers du Caire et d'Alexandrie (nord). Le vote de lundi concerne un tiers des gouvernorats en Egypte - soit 17,5 millions sur quelque 40 millions d'électeurs potentiels -, notamment Le Caire, Alexandrie, deuxième ville du pays, et Louxor en Haute-Egypte. Chaque tour de scrutin se déroulant sur deux jours, les bureaux seront encore ouverts mardi.

Le système électoral complexe prévoit un découpage en trois régions du pays, qui avec plus de 80 millions d'habitants est le plus peuplé du monde arabe.

Le vote pour l'Assemblée du peuple (chambre des députés) se déroulera jusqu'au 11 janvier et les résultats complets seront connus deux jours plus tard. Se déroulera ensuite du 29 janvier au 11 mars l'élection de la Choura, la chambre haute consultative.

La campagne électorale a été éclipsée par une poussée de contestation du pouvoir militaire qui gouverne le pays depuis la chute de Moubarak, émaillée de violences qui ont fait 42 morts et plus de 3.000 blessés dans des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre ces derniers jours.

"Je vote pour l'avenir de l'Egypte. Ce sont les premières élections libres de mon pays", a affirmé à l'AFP Youssouf un informaticien de 25 ans devant un bureau de vote à Alexandrie. "Pendant trente ans nous sommes restés silencieux, maintenant c'est fini", souligne de son côté Samira, 65 ans, devant un bureau à Zamalek, le quartier huppé de la capitale.

Les élections sous Moubarak étaient systématiquement remportées par le parti au pouvoir, que l'opposition accusait de fraudes massives. Après les élections en Tunisie et au Maroc, l'Egypte est le troisième pays à connaître une élection majeure dans une région bouleversée par le "Printemps arabe".

"Le commencement", titrait le quotidien gouvernemental Al Ahram. "Malgré le débat sur les élections et leur utilité en raison de la polarisation politique et de l'insécurité, il semble que, pour ces mêmes raisons, elles soient un choix pour sortir de la crise", écrit le journal.

Le maréchal Hussein Tantaoui, chef d'Etat de fait conspué depuis plus d'une semaine par des milliers de manifestants, avait appelé dimanche les Egyptiens à voter massivement "afin de faire émerger un Parlement équilibré qui représente toutes les tendances". Le mouvement des Frères musulmans, la force politique la mieux structurée du pays mais longtemps confinée dans l'illégalité, a formé un parti, Liberté et Justice, pour se présenter à ce scrutin dont il compte sortir grand vainqueur.

Les Frères musulmans ont face à eux des dizaines de partis salafistes (fondamentalistes musulmans), libéraux ou de gauche, le plus souvent récents et encore mal implantés. De nombreux élus de l'ancien parti de M. Moubarak, aujourd'hui interdit, tentent leur chance comme indépendants ou sous des bannières politiques nouvelles.

Lors des législatives de 2010, "personne n'a voté parce qu'il n'y avait qu'un seul parti", a affirmé à l'AFP Amine, un médecin de 55 ans devant un bureau de vote à Alexandrie, en référence au Parti national démocrate (PND) de Moubarak.

Des officiers de l'armée et de la police étaient discrètement déployés autour du bureau de vote. Dans certains quartiers, des Comités populaires ont été formés pour prévenir les violences. Dans certains bureaux, des problèmes administratifs ont retardé le début du vote. A l'école Omar Makram, dans le quartier de Choubra au Caire, les électeurs ont été priés, une fois à l'intérieur, d'attendre car le juge supervisant le scrutin était en retard.

Le futur Parlement sera chargé de nommer une commission chargée de rédiger une nouvelle Constitution, une étape décisive dans la transition du pays vers la démocratie promise après le soulèvement populaire ayant conduit à la chute d'Hosni Moubarak.

Les prérogatives de ce Parlement font l'objet d'un bras de fer entre le Conseil suprême des forces armées (CSFA), qui dirige actuellement le pays, les Frères musulmans, et des personnalités-clés de la scène politique notamment l'opposant Mohamed El Baradei, qui se prévaut du soutien des manifestants de la place Tahrir hostiles aux militaires.

Avec AFP

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