Enlèvement au Mali : une première piste

Abu Zayeb, l'un des chefs d'Aqmi qui sévit entre le sud algérien et le nord du Mali.
Abu Zayeb, l'un des chefs d'Aqmi qui sévit entre le sud algérien et le nord du Mali.

"L'un des véhicules des ravisseurs des deux Français a été formellement localisé et nous avons envoyé des hommes dans la zone" dans la matinée de dimanche, a affirmé cette source, sans plus de précision sur le lieu de localisation.

Elle a précisé que ce sont des civils qui ont donné les informations ayant permis de localiser ce "véhicule immatriculé à l'étranger". Selon une autre source proche de l'enquête interrogée à Gao (nord du Mali), les ravisseurs, pour "semer" les militaires français et maliens qui étaient à leur recherche, se sont scindés en deux groupes après l'enlèvement : l'un a pris la direction de la frontière algérienne vers le nord, l'autre, "pour faire diversion", celle de la frontière avec le Burkina Faso vers le sud.

L'enlèvement des deux Français jeudi vers 1h du matin à leur hôtel d'Hombori, a été suivi vendredi par la mort d'un touriste allemand à Tombouctou, également dans le nord du Mali, tué par des hommes armés qui ont aussi enlevé trois autres touristes européens.

Une unité des forces spéciales et deux hélicoptères français ont été envoyés pour appuyer les forces de sécurité maliennes dans leur poursuites des ravisseurs. Cependant les recherches menées par des militaires français et maliens dans la région située entre la frontière du Burkina Faso et la ville proche d'Hombori ont été interrompues samedi après-midi à la suite d'informations selon lesquelles les otages et leurs ravisseurs avaient pris la direction du grand nord malien.

C'est désormais l'armée malienne seule qui mène les recherches. Le nord du Mali abrite des bases d'Aqmi d'où le groupe commet au Mali et dans d'autres pays du Sahel (Niger, Mauritanie et Algérie) des attentats, procède à des enlèvements d'Occidentaux et se livre à divers trafics. Ce sont désormais au total neuf ressortissants Européens, dont six Français, qui sont détenus au Sahel. Aucune revendication de ces rapts n'a été rendue publique pour le moment.

Des barbouzes français au Mali

Philippe Verdon et Serge Lazarevic se sont présentés au Mali comme géologue et ingénieur mais, selon les premiers éléments d’informations, ces deux Français enlevés jeudi dernier, ne sont ni l'un ni l'autre. Pour le moment les raisons de leur présence à Hombari restent inconnues. Etaient-ils en mission commandée pour un service de renseignement étranger ? Pour les Français ? C’est le silence radio.

Ces deux hommes au passé sulfureux n'ont pas rempli leur fiche d'arrivée à l'hôtel "Dombia" où ils étaient descendus mais leurs noms figurent sur l'ordre de mission de l'entreprise malienne qui les employait, Mandé Construction Immobilière. Cette société, dirigée par Djibril Camara, prévoit de construire dans cette ville du centre du Mali une grande cimenterie.

Interrogé par Le Parisien, Djibril Camara a confirmé avoir rencontré Philippe (Verdon) il y a quelques mois à Paris par l'intermédiaire d'un ami d'enfance. "Je cherchais des financements. Il m'a recontacté récemment pour me dire qu'il avait les financements mais qu'il fallait évaluer le terrain. Il m'a dit qu'il était géologue, mais aussi qu'il avait servi dans l'armée". Philippe Verdon a demandé à Djibril Camara de faire établir un visa pour Serge Lazarevic, présenté comme "ingénieur du bâtiment".

Mais selon plusieurs personnes contactées par l'Agence France Presse, Philippe Verdon est un homme d'affaires au passé sulfureux, il avait trempé dans plusieurs histoires qui se sont terminées, notamment aux Comores et à Madagascar, par des arrestations, des emprisonnements et des expulsions. "Il a débarqué aux Comores et a commencé à multiplier les contacts, notamment avec des éléments de l'armée comorienne et a commencé à dire que j'avais le soutien de la France. Ce qui était stupéfiant et totalement irresponsable. Les autorités m'ont prévenu de ces agissements et m'on dit de me méfier de ce personnage. Mais c'était déjà trop tard: on a tous été arrêtés, accusés de complot contre la sûreté de l'Etat. Heureusement, le dossier était vide et on a vite été relâchés", a raconté l'avocat et homme politique comorien Saïd Larifou, qui l'a fréquenté au début des années 2000.

Interrogé peu avant sa mort, le célèbre mercenaire Bob Denard avait reconnu avoir rencontré «plusieurs fois» Verdon à Paris. Selon lui, ce n'était "pas un soldat" mais un homme qui "faisait des affaires". Selon un ancien associé, "c'est un bonimenteur, il est bien plus malin que le mercenaire de base. C'est pas un méchant. Je me demande bien ce qu'il a pu aller faire au Mali. Cette histoire de géologue, ça ne tient pas debout". Selon la même personne, Serge Lazarevic est, lui, un ex-militaire, reconverti comme c'est souvent le cas dans la "sécurité, protection, expulsion musclée de squatteurs. Il a pas mal grenouillé aussi en Afrique, dans l'ex-Zaïre notamment, pour des histoires de recrutement de mercenaires". Son nom apparaît en 1999 dans la procédure judiciaire d'une sombre affaire en Serbie, au cours de laquelle un réseau a été accusé d'avoir tenté d'assassiner Slobodan Milosevic.

Avec AFP

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