Marché gazier : le sommet de Doha a accouché d’une souris

L'intérêt des pays a primé sur celui de l'organisation.
L'intérêt des pays a primé sur celui de l'organisation.

Les conclusions du 1er sommet du forum des pays exportateurs de gaz (FPEG), qui s’est tenu à Doha les 15 et 16 novembre en présence de chefs d’Etat ont été simplement des ronrons, eu égard à la problématique générale de la commercialisation du gaz naturel dans le monde.

La poignée de main entre Bouteflika et Abdeljalil de Libye sous "les bons soins" du Cheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani, a été plus médiatisée et semble plus importante que le contenu des points inscrits à l’ordre du jour. Certes, on ne peut pas parler d’un échec mais ce sommet n’était pas une réussite non plus. Il peut être considéré comme un non événement pour au moins trois raisons :

1.- Les douze membres permanents et les trois observateurs du forum ont tous privilégié leurs intérêts économiques et aucun compromis n’apparaît clairement sinon les fondamentaux de la commercialisation du gaz à savoir : le contrat à long terme et l’indexation du prix du gaz à celui des autres produits pétroliers concurrents. Or ces deux paramètres commerciaux sont plus en faveur des gros producteurs que le reste des membres. Le tableau ci-après donne les réserves/ production et la durée de vie :

En milliards de m3

Pays

Réserves (R)

Production (P)

R/P an

Consommation

Oman

700

27,1

26

18,3

Algérie

4500

80,4

56

28,9

Bolivie

300

14,4

21

21

Egypte

2200

61,3

36

45,1

Guinée Equatoriale

400

30

13

14

Iran

29600

138,5

sup.**

136,9

Libye

1500

15,8

95

24

Nigeria

5300

33,6

sup. **

27

Qatar

25300

116,7

sup.**.

20,4

Russie

44800

588,9

76

44,1

Trinité et Tobago

400

42,4

9

22

Venezuela

5500

28,5

sup.**.

30,7

Kazakhstan

1800

33,6

54

31

Norvège

2000

70,5

28

4,1

Pays Bas

1200

106,4

11

43,6

125500

1388,1

90

511,1

Source: Statistical Review of BP edition 2011

Nous constatons que le Qatar, la Russie et l’Iran représentent à eux seuls plus 79,4% des réserves de l’ensemble des pays du forum les 12 restant y compris les observateurs ne pèsent à peine qu’un peu plus de 20%. Ce chiffre peut être porté à 53,2% comparé aux réserves prouvées dans le monde. Les réserves de tous ces pays réunis pèsent plus de 70% des réserves mondiales, ils assurent 40% de la production et prés de 60% des exportations. L’objectif donc de ces gros producteurs est la recherche des débouchés garantis pour placer leur gaz quitte à casser le prix comme l’a déjà fait la Russie.

2.- La question du contrat long terme et celle de l’indexation du prix du gaz sont d’actualité depuis le milieu des années 50, donc le forum ne ramène rien de niveau au marché.

3.- Le prix du gaz naturel sous l’effet de la dérégulation aux Etats-Unis et au Royaume -Uni dans les années 80 et depuis quelques années sur le continent américain va certainement changer l’avenir et l’image de l’évolution passée du marché gazier. C’est de cette évolution que seront sans doute plus sensibles les transactions sur le marché que l’influence d’un cartel quelconque. Il faut souligner par ailleurs que l’OPEP le fait d’une manière indirecte au gaz. Le FPEG n’est en fait qu’un groupe de concertation, de collaboration d’échange de données et surtout d’expérience. Pour donner un ordre de grandeur, on peut retenir ce qui suit : pour un brut à 60$ le baril, le gaz se vendrait aux environ de 3$ MMbtu (01) pour un baril à 100$, le prix du gaz se situerait autour de 12$ MMbtu. Aujourd’hui, il est dans cette zone et montre que l’évolution des prix du brut est intiment lié à celui du gaz dans le marché mondial.

Pourtant, de ce statut du FPEG, les observateurs s’attendaient de ce premier sommet de Doha à des montages de partenariat, de création d’instrument de capitalisation, de consolidation d’expérience et de formation. Mais aucune de ces questions n’a été sérieusement examinée. Par contre, chacun surveille l’autre sans engagement et surtout en gardant jalousement sa part de marché. Les grands exportateurs comme l’Iran, la Russie et le Qatar tentent d’imposer leurs idées d’exporter au maximum et de garantir des débouchés sûrs et stables donc orienter tous les membres vers des contrats à long terme qui logiquement les arrange pour diversifier leurs clientèles afin de rester puissant sur le marché gazier. En d’autres termes, une forme de leadership comme le fait l’Arabie Saoudite au sein de l’OPEP. Ils se doivent de rester compétitifs non seulement par rapport aux autres sources d’énergie mais aussi aux autres pays. Le Qatar spécialement vise l’Europe de l’Ouest pour jouer sur le terrain Algérien. A la limite, la Russie et l’Iran se contentent de leurs marchés traditionnels. Le premier par exemple s’est toujours intéressé à l’Europe de l’Est et celle du Nord. L’Algérie et les autres petits producteurs cherchent à défendre leurs prix de vente de leur gaz et les indexer aux produits concurrents et d’en tirer le maximum possible pour le développement de leur pays respectif. Ils ne pourront pas le faire avec des contrats long termes dans lesquels le prix et les formules de leur révision sont fixées à l’avance. Comment ?

Rabah Reghis

Lire la suite ici : http://www.freealgerie.com/avis/168-marche-gazier-le-sommet-de-doha-a-accouche-dune-souris.html

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