Boudiaf raconté par un proche

Mohamed Boudiaf
Mohamed Boudiaf

Ali Haroun n'a pas oublié son ami. L'ex-dirigeant de la Fédération de France et ancien membre du Haut-Comité d'Etat a bien démontré que son attachement pour l'ex-Président assassiné était indéfectible. Pour lui, la culture de l'oubli, si présente en Algérie, ne parviendra jamais à effacer l'héritage considérable de Mohamed Boudiaf.

Ali Haroun, comment expliquez-vous l'absence de tout représentant des autorités algériennes à cette commémoration de l'assassinat de Mohamed Boudiaf ?

Il est à remarquer que, depuis de nombreuses années, l'histoire récente de l'Algérie -je ne dis pas qu'elle est complètement occultée- est au moins enseignée de façon très très approximative ou superficielle. Pourquoi ? Il y a bien des raisons. La crise de 1962 a fait que, beaucoup de gens qui avaient été des acteurs réels de la lutte de libération ne se trouvaient plus au pouvoir en 1962.

Comme l'histoire est écrite toujours par les vainqueurs, il est évident que celle-ci ait été, pour le moins, occultée pour qu'on ne dise pas que ceux qui pouvaient rédiger l'histoire soient contraints de dire des contrevérités. Alors, pour ne pas dire de contrevérités, on occulte la vérité. Cela dit, ce qui s'est passé depuis quarante-cinq ans est quelque chose de coutumier dans les révolutions. On dit que les révolutions mangent leurs enfants, eh bien, l'Algérie obéit, hélas, à cette règle.

Cela fait quinze ans que Mohamed Boudiaf a été arraché à la vie, pensez-vous que son héritage est toujours présent ou qu'il est tombé dans l'oubli ?

Je ne pense pas que l'on puisse oublier le message de Boudiaf. Même s'il a été de courte durée, je peux vous assurer que, pendant ces 170 jours, il y a eu un renouveau d'espérance exceptionnelle. Je peux vous rapporter des faits personnels. J'ai eu l'occasion, pendant cette période, de me déplacer à l'étranger, particulièrement en France, des gens de tous horizons sont venus me voir pour me demander s'ils pouvaient apporter leur contribution. L'accession de Boudiaf à la tête de l'Etat leur avait redonné confiance.

Il avait aussi impulsé un style nouveau d'exercice du pouvoir

Premièrement, il parlait un langage que les Algériens comprenaient. Il parlait un arabe algérien, correct bien sûr, mais qui n'était ni emphatique ni un langage qui était fait pour les académiciens. Quelqu'un me disait à l'époque : «Tiens, ma grand-mère m'a dit : “Enfin je viens de comprendre mon Président”.»

Deuxièmement, il était très simple. Il recevait pratiquement toute personne ou toute organisation qui demandait un entretien avec lui.

Comment avez-vous appris la nouvelle de sa mort ?

Ce fut une douleur extraordinaire. J'avais l'impression que notre dernier espoir venait de s'écrouler. Et pourtant la vie continue. Ce qu'a fait Mohamed Boudiaf était, je le crois, une étape marquante. Il a lancé un message fort, et je ne pense pas que ce message soit occulté à jamais. Vous savez, une vérité peut être oubliée un certain temps, mais elle ressurgit, parce qu'on peut la mettre sous le boisseau, mais on ne peut pas la détruire. Le vrai finit toujours par triompher.

Etes-vous optimiste pour l'avenir ?

Je suis né optimiste, j'ai vécu optimiste, et je crois que, jusqu'à la fin de mes jours, je le resterai.

La Tribune - INTERVIEW realise le 30 Juin 2007

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Commentaires (5) | Réagir ?

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thameur chelali

Merci

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kadour

salamou 3alaykoum ehh oui lhomme desormé est parti ils lui ont meme pas laissé le temp de respiré dommage cest un vrai homme

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