Le retour de l'ex-FIS ? La mise des présidentielles de 2014

Le retour de l'ex-FIS ? La mise des présidentielles de 2014

La revendication unanimiste du retour de l’ex FIS sur la scène politique se veut, au-delà d’une simple réhabilitation d’un parti, la consécration de la politique de réconciliation nationale, devenue la rampe de lancement des prochaines présidentielles…

L’ex-parti d’Ali Benhadj revient sur les devants de la scène politique et médiatique comme pour signifier un affront à l’anniversaire du 5 Octobre 88. Dans un entretien publié dans TSA (Tout sur l’Algérie, édition arabe), du mois de septembre écoulé, Anouar Haddam, l’ex-représentant du parti dissous à l’étranger, exilé aux Etats-Unis depuis 1992, dit avoir formulé une demande de grâce auprès des autorités algériennes dans le cadre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale pour accélérer son retour au pays.

Désignant par "Janvièristes" les responsables militaires de l’arrêt du processus électoral de 1991, les déclarations d’Anouar Haddam sur la situation politique, sociale et économique du pays sont identiques à celles tenues par le chef islamiste tunisien, Rached Ghennouchi, qui, avant de rentrer au pays, à la faveur de la chute du Président Ben Ali, s’est défendu de toute appartenance au fondamentalisme islamiste et a plaidé pour une alternance au pouvoir. Le premier, sans doute, à saisir cet appel d’Anouar Haddam est Me Farouk Ksenti, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), qui, s’exprimant au Forum d’El Moudjahid sur le bilan des six années de la politique de réconciliation nationale, avait plaidé sans détour, "pour une amnistie générale en faveur des terroristes", faisant valoir l'exemple d'autres pays, le plus récent étant le retour de Ghennouchi en Tunisie.

Ne se suffisant pas de cette déclaration, Me Ksentini a fait un appel du pied à Bouteflika car, a-t-il ajouté, cette décision d’accorder tout azimuts l’amnistie générale pour les terroristes, au moment où les attentats kamikazes redoublent d’intensité, "revient au seul président de la République". Or, on s’en souvient, dès son premier mandat, le président de la République n’a eu de cesse de tendre la main à l’islamisme politique et à ses bras armés, les congratulant comme garants pérennes de sa mandature, au plus fort des massacres terroristes. De son côté, le Premier ministre Ahmed Ouyahia, s’en est dit offusqué : "J'ai lu dans certains journaux qu'il va y avoir une amnistie générale en faveur des terroristes. Faux, faux sur toute la ligne. Je démens le plus solennellement du monde", a-t-il déclaré au lendemain du sixième anniversaire de la promulgation de la concorde civile, lors d'un bref point de presse au terme d'une réunion à Alger entre le gouvernement, le patronat et les syndicats.

Mais, replacés dans le contexte historique depuis l’élection de Bouteflika en 2009, cette réaction plus épidermique que politique, s’avère circonstancielle et totalement impuissante à endiguer l’appareillage idéologique du pouvoir à l’intérieur duquel le retour de l’ex-Fis sur la scène "démocratique" se dessine comme enjeu primordial dans la perspective des Présidentielles de 2014. Les "repentis" bénéficient non seulement de la grâce "juridique" mais surtout de l’immunité politique, des intouchables. L’affaire du moudjahid Mohamed Gharbi initialement condamné à mort pour avoir tué un ex-"émir" GIA repenti qui le menaçait publiquement de mort, en est plus qu’un symbole.

Sous le couvert fallacieux de leurs partis politiques agréés, les chefs islamistes du pouvoir n’ont pas trahi leur genèse. Ils revendiquent haut et fort le retour de leur parti historique, en semant quelques diversions inter partisanes d’appareils. Dans un entretien à TSA, le mois d’août dernier, Ali Benhadjar, ancien GIA dans les maquis de Médéa et ex-émir de la Ligue islamique pour la daâwa (prédication) et le djihad (LIDD), avait annoncé que des préparatifs étaient "en cours avec d’anciens responsables de l’ex FIS pour la tenue d’un congrès constitutif pour le retour du parti dissous" en prenant soin d’inscrire ce "congrès" dans une opposition tranchée à la politique de la réconciliation nationale qu’il a qualifiée de "tromperie" affirmant que "Ceux qui ont déposé les armes l’ont fait pour le bien du pays et non par repentance (…) Ceux qu’on nomme aujourd’hui repentis ont pris les armes par légitime défense" et que "le parti reste souverain et ne peut être dissous. Son renouveau dépend de sa direction, de ses cadres. Seul un congrès général peut décider de son avenir et c’est ce que nous souhaitons" tout en appelant le président de la République à accorder la grâce aux militants du FIS emprisonnés.

De son côté et dans la même période, Ali Benhadj laissait entendre que le retour de son parti n’est "qu’une question de temps" et que seul un congrès constitutif en décidera du sort. Dans un entretien accordé à la journaliste Florence Beaugé dans les colonnes du Monde diplomatique en 2008, il propose, pour ce faire, une conférence nationale, un Saint'Egidio bis, avec Aït Ahmed, Mehri, Hamrouche, Ahmed Taleb, Ali Yahia qu’il qualifie de "véritables démocrates".

En 2007 déjà, dans les colonnes du journal arabophone El Bilad, Ahmed Benaicha, ancien actif de la branche armée de l’ex- FIS, l’AIS (Armée islamique du salut), laissait entendre en ces termes : "Dès sa réélection en 2009, le président Bouteflika prononcera une amnistie générale et permettra au FIS de retourner sur la scène politique." Usant de la même stratégie de diversion avec ses deux familles qui reculent, les redresseurs et les caciques, le FLN de par sa nature hégémonique, qui doit avant tout son salut à l’émergence de l’islamisme en 88, lorgne d’ores et déjà sur la base du Fis en prévision des présidentielles de 2014, sachant pertinemment que tout processus électoral engagé dans un contexte de crise d’Etat est un gage à sa nature rentière et à ses "islamistes" dont le FIS. Pour cela, il n’hésite pas à ranimer ses services de propagande, mosquées, associations de quartier pour peser sur la vie publique par des menaces qui furent celles du FIS en 1989/90 relatives à la "moralisation des mœurs".

Récemment, dans un tract signé par un ancien dirigeant de ce parti, El Hachemi Sahnouni et un membre d’une association dénommée Renaissance des enfants des mosquées d’Alger, Abdelfetah Ziraoui Hamadache, appellent à une pétition populaire intimant aux autorités la fermeture systématique des débits de boissons alcoolisés. Il y a quelques jours, l’incursion terroriste dans un bar dans la localité de Boghni (30km au sud-ouest de Tizi-Ouzou) procède de cette logique.

Cette revendication unanimiste du retour de l’ex-FIS sur la scène politique se veut, au-delà d’une simple réhabilitation d’un parti, la consécration de la politique de réconciliation nationale, devenue la rampe de lancement des prochaines présidentielles…

R. M.

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Commentaires (2) | Réagir ?

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kamel benzine

Le FIS parti des diables.

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madjid ali

Le FIS. reviendra que vous soyez d'accord ou pas. Le peuple l'a choisi.