Boualem Sansal lance un appel à la société civile des pays arabes

L'écrivain algérien Boualem Sansal.
L'écrivain algérien Boualem Sansal.

L’écrivain algérien Boualem Sansal a été l’hôte le week-end dernier de la Fondation allemande Allianz Stiftung Forum, près de la célèbre "Porte de Brandenburg" de la ville de Berlin.

Lauréat pour cette année du Prix de la Paix des Libraires Allemands, l’auteur du roman Le village allemand ou le Journal des frères Schiller a consacré devant un nombreux public, composé de journalistes, écrivains, universitaires et personnalités politiques, une grande partie de son intervention à la situation socio-politique de l’Algérie.

Répondant à une série de questions de Wolgang Heiles, animateur télé, écrivain et journaliste, Boualem Sansal n’a pas hésité à relater avec des exemples et chiffres concrets les évènements majeurs que traverse l’Algérie dans ces moments importants du "printemps arabe". Il a rappelé que l’Algérie qui a tenté déjà sa révolution pour la transition démocratique en octobre 1988. Cette révolution fut vite récupérée par le mouvement islamiste salafiste et tous les opportunistes nationalistes tapis dans les institutions. "Ce qui a abouti par une barbarie et à un massacre de civils, de milliers de citoyens déplacés et de cadres exilés", a affirmé l'écrivain algérien.

Mettant les pays européens devant leurs responsabilités, Boualem Sansal a rappelé à l’assistance que plusieurs dirigeants de la mouvance islamiste ont trouvé refuge et asile dans les capitales de ces pays d’où ils ont appelé au "djihad" sans aucune contrainte, voire avec la complicité et le laxisme de gouvernements européens. Il a aussi rappelé que les dictateurs de la région nord-africaine étaient aussi pour des intérêts économiques et stratégiques, ménagés par leurs homologues occidentaux.

Revenant sur l’actualité qui prévaut dans le monde arabe, le conférencier a insisté sur le "dégagement" des dictateurs arabes qui reste nécessaire mais pas suffisant. "On doit rester très vigilant ! La révolution doit non seulement abattre les fondements même du système despotique et archaïque mais aussi éveiller les consciences et pousser au changement radical des mentalités et des comportements du citoyen afin d’installer des institutions véritablement démocratiques et des Etats de droit...", a-t-il martelé.

En citant l’exemple du CNT en Libye, Sansal a fait remarquer au public, extrêmement attentif, qu’un dirigeant de cette instance transitoire a déclaré publiquement que la nouvelle constitution de ce pays post-Kadhafi, sera d’inspiration de la "charia" !

Réaliste mais optimiste sur l’avenir de ces pays secoués par ces révoltes et de la fragilité de leurs jeunesses laminées par le chômage, la corruption, la misère, le mépris, le régionalisme, le tribalisme et un système éducatif moribond et sinistré, le conférencier a surpris par son franc-parlé. Il a insisté que le danger plane toujours, il est d’actualité. Hormis la Tunisie, les islamistes peuvent prendre le pouvoir avec des élections libres et démocratiques, a-t-il déclaré.

L’écrivain Boualem Sansal a appelé la société civile en Algérie et la communauté à l’étranger ainsi que les intellectuels, les syndicats, les associations et les partis politiques d’obédience démocratique des pays arabes à redoubler de mobilisation et d’efforts pour ne pas trahir ces jeunes qui se sont sacrifiés pour le changement, la dignité, les droits de l’Homme et la démocratie. "Les forces du progrès des pays occidentaux doivent aussi leur apporter leurs aides et solidarité", a-t-il conclu.

Boumediene Missoum, Berlin (Allemagne)

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Commentaires (2) | Réagir ?

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Abed Boukhatemi

Je me dois d'abord de saluer le travail de Boualem Sansal en tant qu'ecrivain et militant anti-islamiste. Malheuresement le lavage de cerveau des jeunes Algériens a donné des fruits amères, c'était attendu : du port du voile chez les femmes et filles à la chasse des non jeuneurs en passant par les fermetures des tripots ou le Adhan à la télévision à la radio et dans tous les quartiers d'Algérie au moyen de hauts parleurs surpuissants ; l'islamisme a de beaux jours devant lui. Je pense avec nostalgie aux douces années 1960 et 1970 où la tolérance et la convivialité régnaient en Algérie, loin de l'atmosphère bigote qui nous étouffe actuellement.

Message perso à l'auteur de l'article Missoum Boumediene : J'espère que tu es heureux à Berlin et que tu ne regrettes pas trop la place rouge de Tiaret.

Abed Boukhatemi

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ali Foughali

La langue arabe est le vecteur de tous les maux en Algérie. Y a-t-il aujourd’hui un terroriste francisant ? Je mettrais mes deux mains à couper que non. Donc entre haïr l'Algérie en arabe ou l'aimer en français j'opte pour le second les yeux fermés.