Libye : la mystérieuse liquidation du général Younès

Libye : la mystérieuse liquidation du général Younès

Alors que le général Younès a été inhumé hier, son assassinat par des rebelles qui l'accompagnaient est toujours entouré d’un épais mystère.

Ultime ironie pour l'ancien compagnon de route de Kadhafi, c'est aux mains des rebelles qu'il avait rejoints dès les premiers jours qu'Abdel Fatah Younès, le chef militaire de l'insurrection libyenne, semble avoir trouvé la mort, à en croire un ministre rebelle. Rappelé de la région de Brega, où ses troupes peinent toujours à prendre le dessus sur les forces loyalistes, le général Younès, ancien ministre de l'Intérieur de Kadhafi, a été assassiné en arrivant jeudi soir à Benghazi. Deux autres responsables militaires qui l'accompagnaient, Mohammed Khamis et Nasser Madhour, ont également péri dans l'attaque.

Les insurgés qui avaient pour mission d'escorter Abdel Fatah Younès auprès du Conseil national de transition (CNT) à Benghazi, où il devait être interrogé sur des questions militaires, se seraient retournés contre leur charge et l'auraient abattu avant d'abandonner son corps à l'extérieur de la ville, a expliqué vendredi soir Ali Tarhouni, ministre des Finances et du Pétrole du gouvernement rebelle. Le chef de la milice, arrêté à Benghazi, serait passé aux aveux. "Ce n'est pas lui, ce sont ses subordonnés qui l'ont fait", a précisé le ministre. Les tireurs étaient vendredi toujours en fuite.

Pour expliquer leur geste, deux hypothèses : soit que les tueurs furent des loyalistes de Tripoli infiltrés dans l'insurrection, soit qu'ils n'aient pas pardonné à leur général son passé auprès du Guide de la révolution. La rumeur bruissait que celui qui fut pendant quarante ans un fidèle du dictateur conduisait en coulisse des négociations avec son clan, ce qui pouvait expliquer son manque d'ardeur dans la conduite des opérations militaires des insurgés.

Le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, cherchait plutôt les assassins du côté de Tripoli et minimisait les divisions dans le camp rebelle. "Je vous demande de ne pas prêter attention aux rumeurs que les forces de Kadhafi essaient de propager dans nos rangs", disait-il avant la sortie de son ministre. Quant à Mouammar Kadhafi, il voyait dans le meurtre de son ancien bras droit l’œuvre d’Al Qaida.

Scènes de liesse à Tripoli

Un millier de personnes ont participé vendredi aux funérailles à Benghazi. "Le sang du martyr ne sera pas répandu en vain !", a scandé la foule. La famille d'Abdel Fatah Younès a assuré qu'elle demeurerait du côté de la rébellion. Cette déclaration réaffirme le soutien de la tribu Obeidi, puissante à Tobrouk, Benghazi comme dans tout l'Est libyen, à l'opposition.

À Tripoli, l'annonce de la mort d'Abdel Fattah Younès a provoqué des scènes de liesse chez les partisans de Kadhafi. Pour le clan du dictateur, cette nouvelle contrebalance de récentes déconvenues diplomatique et militaire. Mercredi, les autorités britanniques ont, à leur tour, reconnu le CNT comme la "seule autorité gouvernementale en Libye". Jeudi, les forces rebelles ont pris les bourgades de Ghazaya et d'Om al-Far sur la route rapide qui, de la frontière tunisienne, longe en contrebas le Djebel Nefoussa et mène à Tripoli à travers le désert. De ces positions, les forces de Kadhafi pouvaient bombarder les villes rebelles du Djebel Nefoussa, notamment la cité berbère de Nalut.

Plus d'articles de : L'actu en Algérie et ailleurs

Commentaires (8) | Réagir ?

avatar
anis sabri

Tout d'abord, des informations confirmées nous apprennent que le général Abdelfattah Younès et ses deux subordonnés, un colonel et un lieutenant-colonel n'ont pas été tués à Benghazi même, mais à une quarantaine de km de celle-ci, de retour de la ville, ô combien importante de Brega, où de très violents combats se déroulaient entre les rebelles, commandés par ledit général, et les forces du colonel Kadhafi. L'enjeu décisif, c'est le carburant, dès lors que cette ville abrite la plus importante raffinerie du pays. Certes, il est vrai que le général Younès, qui avait fini, petit à petit, par prendre le commandement des combattants rebelles, n'avait pas que des partisans parmi ces derniers. Mais compte tenu de son passé et de son expérience accumulée depuis 1969, année du coup d'Etat réussi contre le régime du roi Idriss Senouci, lors de son séjour en Turquie pour des soins, le CNT avait fini par trancher en sa faveur. Il n'est pas moins vrai qu'il se rendait à Benghazi, en vue de répondre à une convocation du conseil en question, préoccupé depuis un certain temps par l'existence dans les rangs rebelles d'une "cinquième colonne" ("tabour al-khâmès"), autrement dit, de taupes tapies dans la capitale même des forces anti-Kadhafi. Les trois officiers supérieurs n'ont pas seulement été liquidés physiquement, mais carbonisés littéralement. Bien tendu, diverses versions existent à propos de ce triple assassinat. Au moins quatre. L'on ne saura peut-être jamais l'identité des commanditaires de ces meurtres, exécutés dans le fief même de ceux ayant décidé d'en découdre, une fois pour toutes, avec le régime opaque et visqueux de celui qui s'est autoproclamé "Roi des rois d'Afrique", une fois que le monde arabe avait fini par lui tourner le dos au sujet de ses innombrables tentatives d'unité. C'est à partir de là qu'il avait décidé de remettre au placard ses uniformes clownesques qui rappellent certains personnages d'opérette latino-américains, au profit du boubou africain, arborant côté coeur, la carte du continent africain... Un gibier extraordinairement riche pour la haute psychanalyse. Au demeurant, l'on a affaire incontestablement à un génie, mais un génie du mal, pour avoir pu régner sans partage sur la Libye, durant plus de quarante années; et il tient bon encore, en dépit de la cascade de bombes que Tripoli reçoit quotidiennement. D'ailleurs, non seulement il est toujours là, mais apparemment, il ne manque ni d'armes ni de minutions, outre le changement radical de la politique des pays (France et Grande-Bretagne, singulièrement), envers le régime de Kadhafi après avoir reconnu que la solution à ce conflit ne peut être que politique. C'est ce que l'Union africaine ne cessait de répéter sur tous les tons, depuis le début des hostilités, qui sont en fait une guerre civile, au sens strict du terme. En sus de ce qui précède, il y a lieu de ne pas ignorer que ce ne sont pas les armes à elles seules qui lui permettent de résister. Elles sont nécessaires, mais non suffisantes. C'est qu'il continue à jouir auprès de la majorité des pays africains d'un grand prestige, outre la confiance que nombre de libyens continuent à lui témoigner. Quoi qu'il en soit, le CNT n'est pas composé uniquement de libyens, ayant la Libye au cœur, et désireux de se libérer du carcan, que kadhafi avait imposé d'une main de fer à son pays, en étouffant souvent de façon cruelle et barbare toute velléité d'émancipation, face à la situation imposée par le contenu du "Livre vert", exprimant un crédo idéologique aussi abscons qu'inefficace. C'est que la démocratie directe, dont parle J. -J. Rousseau dans le "Contrat social" (livre de chevet de Kadhafi), à propos de la ville de Genève, est inapplicable dans un pays aussi vaste que la Libye, outre que ce pays, à ce jour, relève du système tribal. C'est à ce niveau que le maître de Tripoli s'est grossièrement trompé, en trompant avec lui une bonne partie de la population. Ce que nombre de gens, y compris des analystes soi-disant chevronnés, en particulier en Occident, ignorent qu'une idéologie, fût-elle éloignée de la réalité et donc de la nature des choses, est en mesure de durer des décennies, sans pour autant prendre une ride. En s'affublant d'une telle autonomie, l'idéologie devient un paramètre extraordinairement puissant dans le conditionnement des esprits et donc des mentalités. En conséquence, Kadhafi n'ignore pas que bon nombr de Libyens lui demeurent fidèles et sont prêts à se sacrifier pour lui. D'autant plus que la personne qui est parvenue à décider Sarkozy de battre le tambour, pour inciter le Conseil de sécurité à intervenir militairement en Libye n'est autre que le philosophe-sioniste Bernard-Henri Lévi ami intime du président français Ledit philosophe avait tellement poussé loin le bouchon, que plusieurs médias français avaient affirmé, à juste titre, qu'il s'était substitué à deux ministres de la République: ceux des Affaires étrangères et de la Défense nationale. Et ils ne s'étaient pas leurrés. De là à dire que le CNT, dont les membres les plus influents s'étaient rendus au palais de l'Elysée, pour recevoir des consignes de combat, y compris d'ailleurs son leader Mostefa Abdeljalil (ancien Ministre de la Justice de Kadhafi, ayant condamné à mort les infirmières bulgares), de là à dire qu'il s'agit d'une officine œuvrant au service des intérêts de l'Occident, et donc de l'impérialo-sionisme, il n'y a qu'un pas, franchi, d'ailleurs, allègrement par beaucoup... Ce qui est parfaitement normal. Après tout ce détour, et si l'on montrait du doigt le groupe auquel appartenaient les tueurs du général Younès. Compte tenu du fait, que celui-ci, à l'époque où il était ministre de l'intérieur de Kadhafi, ne se contentait pas d'ordonner des séances de torture effroyables à l'encontre des opposants, il les pratiquait, parfois lui-même, avec beaucoup d'ardeur et de délectation. Et parmi ces opposants torturés, d'aucuns étaient d'obédience intégriste. Et lorsqu'on n'ignore pas que la structure du CNT se compose pratiquement d'individus appartenant à toutes les tendances, y compris des éléments d'Aqmi, armés jusqu'aux dents depuis le pillage des arsenaux soi-disant contrôlés par les rebelles... Comme on le constate, le conflit libyen est d'une extraordinaire complexité. Le conflit syrien est également fort complexe, de même celui relatif au Yémen. Cependant, chacun d'entre eux est spécifique à travers les mécanismes de sa propre complexité. Dans un tel contexte, parfois le mot même de "révolution" finit par perdre sa signification. Il est grand temps d'inventer de nouveaux concepts et donc de nouvelles théories de sociologie politique, en mettant de côté ceux ayant servi à l'analyse des sociétés occidentales. Après tout "l'Occident n'est qu'un accident, " comme dirait Roger Garaudy

avatar
Hawa Nassim

@Mourad Idir: Combien de résolutions ont été votées par le conseil de sécurité (du machin, comme le nommait jadis De Gaulle), contre Israël, Un total de 60, dont 30 ont été bloquées par le veto américain, les 30 autres n'ont jamais été respectées. La résolution 1970 de CdeS du machin n'a jamais autorisé l'OTAN a bombarder la ville de Tripoli, ni la France à parachuter des armes aux rebelles. Qu'attendent vos amis occidentaux pour bombarder Alger pour ce que vous considérez comme une violation des résolutions 1970 et 1973. C'est une histoire tirée par les cheveux, comme cette excuse de massacre des populations civiles par Kadhafi pour justifier une occupation d'un pays uniquement dans le but de s'emparer de ses richesses. Je déteste tous les dictateurs de par le monde y compris Mougabé, mais cessons d'être les porte drapeaux du néocolonialisme. Après vérifications, les Américains découvriront surtout, que l'Algérien n'est ni l'irakien, ni le Libyen, malgré un pouvoir corrompu, les algériens se lèveront comme un seul homme lorsqu'il s'agit de la mère patrie. Cordialement.

avatar
Ali Mansouri

Combien de résolutions, pour le référendum au le Sahara Occidental ont été violées par le Maroc ? Qui agit exactement comme son maitre israëlien qui sévit en Palestine.

visualisation: 2 / 7