Cher compatriote Boualem Sansal

Cher compatriote Boualem Sansal

En réaction à tant de sobriété et de justesse dans les mots, je me hasarde à te décrire, en quelques gouttes éparses, cet océan d'amertume dans lequel je baigne nuit et jour, perdu dans cet exil que je croyais fait pour les autres, pour les méchants honnis et bannis des leurs. Je ne porte aucun deuil sinon le cauchemar d’une triste lâcheté qui me poursuit, celle de n'avoir jamais su comment ni quoi faire pour le bonheur des miens, proches ou lointains. Le jeu de la mort stupide nous a tous chassés. Ce jeu que des imbéciles au pouvoir ont inventé pour tuer et faire tuer des innocents pour quelques litrons de pétrole vendus à l'occident. Il me revient à la mémoire ce jeune d’Azazga qui, en lettres de sang, avait écrit « liberté » sur un « mur des lamentations » que les dieux ne connaissent pas, car trop loin de la Mecque et de Jérusalem. Je pense au petit Abdelkahar Belhadj, sacrifié au nom du combat contre cette même « liberté» que d’autres réclament au prix de leur vie.

Lequel de ces enfants, doit-on le plus pleurer Boualem? Dis le moi ! Lequel de ces enfants est plus Algérien que l'autre? Dis-le moi aussi ! Lequel de ces enfants aurions-nous pu sauver ? Quelle Algérie triomphera demain ? Celle du message de liberté d’Azazga ou celle de l’aliénation de tant d’Abdelkahar, formatés au Djihad contre l’impie ? Dis le moi Boualem ! Laquelle de ces causes diamétralement opposées sera le symbole de l’Algérie de demain ?

Des enfants Belhadj, le pouvoir en fabrique à la pelle chaque jour. Nul besoin d’aller dans les mosquées, Il n'y a qu’à regarder Canal Algérie pour s'en persuader. Des enfants d'Azazga, nous en produisons de moins en moins Boualem, le sais-tu ? Ainsi l'ont voulu nos maîtres, ceux qui ont fait croire aux imbéciles qui se sont succédés à El-Mouradia qu'ils pouvaient régner sur la terre des hommes libres et en confisquer langues, richesses, urnes et libertés.

Non Boualem ! Ceux sont eux qui allument le feu, eux qui font cuire la soupe pour la petite famille révolutionnaire, et eux qui nous jettent des cuillerées éparses comme on jette un os à une meute de chiens affamés. Nous sommes affamés Boualem ! Le sais-tu ? En prends tu la juste mesure ?

Affamés de pain ! Affamés de liberté ! Affamés de joie de vivre ! Affamés de fraternité ! Affamés du monde qui nous entoure et qu'ils nous interdisent de fréquenter, sauf par le canal de l’exil ou celui de la harga ! Faut-il invoquer les cieux pour savoir cela Boualem ? Là haut, ils ne savent rien, ni de notre passé ni de notre avenir, même si tous les imposteurs font d’eux des complices pour mieux nous faire supporter le poids des malheurs qu’ils abattent sur nous.

Là haut, ils ne se mêlent jamais de rien, tu le sais bien ! Nos démiurges, rusés et stupides en même temps, ces DRS de l’ombre, le savent aussi. Et Bouteflika, celui que tu surnommes le brigand, n'est qu'une piètre copie d’un Pinocchio sans âme auquel on a coupé le nez pour empêcher que les mensonges amplifiés du « message » le fassent déborder du palais d'El-Mouradia.

D’autres ne nous ont-ils pas déjà avertis d’ailleurs? L'islamisme ravageur a de beaux jours, de belles années et de beaux siècles devant lui, car c'est quoi donc un islamiste sinon un musulman qui s'évertue à faire de la politique et à vouloir codifier la vie des hommes en se référant à des messages venus d'un autre temps, et que des cerveaux formatés et nourris à la mamelle de la niaiserie humaine, ont su colporter de siècle en siècle pour atterrir un jour sur la terre des hommes libres ?

« Je ne ferais rien qui remette en cause le moindre verset du Coran !», avait lancé le brigand à une question sur le code de la famille. Qui d’autre qu’un islamiste convaincu oserait pareille repartie ?

Oublions tout ça Boualem ! Ca fait trop mal d’y penser ! Juppé est à Alger. Quelle cause défendra-t-il auprès des voyous aux commandes ? Celle des indigènes que nous sommes à leurs yeux nous sommes, ou celle de ce pacte infâme passé entre nos anciens et nos nouveaux maîtres pour perpétuer nos servitudes et en accommoder les contours présents à ceux d’un passé récent ?

Quant à toi, moi, Mohamed, et tant d’autres, sans croix de bois, ni croix de fer, sans paradis, ni enfer, nous le ferons ! Car nos enfants, les tiens, les miens, ceux des Hommes libres, vivront dans la paix que nous leur préparons sous d'autres cieux que ceux hérités de leurs ancêtres. D’ailleurs, sait-on vraiment qui ils sont ces ancêtres que d’autres ont choisi pour nous? Ils étaient d’abord Gaulois, n’est-ce pas ? A notre insu, les voilà mutés en Mahométans intolérants ! ? En attendant que d'autres encore nous créent une affiliation à «onques» démons.

Osons rêver d’un monde meilleur sans ces décibels nocturnes !

Kacem Madani

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