Forte instabilité en Tunisie

Plusieurs mois après la chute de Ben Ali, le calme n'est toujours pas revenu.

La Tunisie post-Ben Ali semble être entrée dans une nouvelle zone de turbulences face à une possible menace "terroriste" sur son territoire coincé entre l'Algérie et la Libye alors qu'elle peine déjà à faire face à un débordement du conflit libyen à sa frontière sud. À peine quatre mois après son soulèvement inédit, qui a donné le coup d'envoi du "printemps arabe", la Tunisie a cumulé cette semaine des annonces alarmantes allant des premières arrestations de "membres présumés d'Aqmi" (al-Qaida au Maghreb islamique) jusqu'au dénouement sanglant d'un échange de tirs dans le nord du pays avec des membres "fortement suspectés d'appartenance à al-Qaida".

Pour le militant tunisien des droits de l'homme Khemaes Ksila, la "situation instable en Tunisie peut être un terrain propice pour les activités de groupes terroristes al-Qaida ou autres". "Il faut que le peuple et toutes les forces politiques qui veulent réussir cette phase transitoire se donnent la main pour barrer le chemin à tous les groupes terroristes voulant déstabiliser le pays", dit-il. Et les Tunisiens, qui scandaient encore des slogans comme "plus jamais peur" pendant les dernières manifestations antigouvernementales début mai à Tunis, ont commencé à découvrir cette semaine les visages de généraux participant à des émissions télévisées sur la sécurité et la lutte contre les "terroristes", du jamais-vu jusqu'alors dans le pays.

Échanges de tirs

Vive émotion, craintes et consternation se sont succédé après l'annonce de la mort de quatre personnes - un colonel et un soldat de l'armée tunisienne ainsi que deux Libyens - mercredi à Rouhia, située à environ 200 km de la frontière algérienne. Selon une source autorisée, les deux militaires ont été tués dans un échange de tirs avec des hommes "fortement suspectés d'appartenir à al-Qaida". Dimanche, les autorités avaient annoncé l'arrestation d'un Algérien et d'un Libyen, suspectés d'appartenance à Aqmi et en possession d'explosifs, à Nekrif (sud), dans la région de Tataouine.

Toutes tendances confondues, les partis politiques ont condamné "les actes criminels" commis "par des groupes terroristes mettant en péril la stabilité du pays". Ainsi, le Parti de l'unité populaire (PUP, nationaliste) a appellé à une "plus grande coordination avec le gouvernement algérien pour organiser des patrouilles mixtes sur les frontières ouest du pays". Le Mouvement des démocrates socialistes (MDS, gauche), a appellé la population à aider l'armée "dans la protection de la patrie". Malgré la fin du couvre-feu décrété le 7 mai à Tunis après des scènes de chaos, la plupart des Tunisiens interrogés par l'AFP disent encore redouter "des violences".

Obus

Par ailleurs, des obus sont tombés à plusieurs reprises en territoire tunisien lors d'affrontements entre troupes loyales à Kadhafi et rebelles libyens près du poste frontalier de Dehiba (sud). Mardi, Tunis a menacé de saisir l'ONU. En visite à Paris, le Premier ministre tunisien de transition Béji Caïd Essebsi a reconnu que la situation dans son pays est "tendue", notamment en raison de la guerre en Libye. "Nous avons tout d'abord reçu 374 000 réfugiés dont de nombreux Libyens qui sont logés par la population et qui ne pourront pas rentrer chez eux tant que ces événements ne seront pas terminés. Comme nous avons une frontière commune, nous recevons aussi des projectiles de temps en temps", a-t-il dit au quotidien Le Monde.

Dans un message audio posthume, Oussama Ben Laden salue les révolutions en Tunisie et en Égypte et appelle les musulmans à tirer avantage de cette "rare opportunité historique" pour se soulever. "Je n'ai pas peur de Ben Laden et ses sous-fifres, j'ai peur de ce que la situation en Libye peut provoquer en Tunisie avec tous ces rebelles islamistes à Benghazi qui ont besoin d'armes et pourraient profiter du réseau Aqmi pour les faire transiter via la Tunisie", déclare un politologue tunisien, Slah Zguidi.

AFP

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