Les États-Unis dans le flou sur la suite à donner aux frappes

De nombreuses voix exigent que Barack Obama précise ses objectifs finaux en Libye.

Quelle suite donner aux premières frappes en Libye ? Les Etats-Unis, pivots de l'action armée depuis samedi, donnent une impression de flou quant au but final de la campagne. Le président Barack Obama avait été parmi les premiers à demander le départ de Mouammar Kadhafi. Cette issue est "la position américaine", a redit le président lundi depuis Santiago du Chili. Mais les Etats-Unis, a-t-il aussitôt ajouté, s'en tiendront au mandat de la résolution 1973 de l'ONU dans leur action militaire en Libye. Ce texte, fruit d'intenses efforts diplomatiques pour éviter les vetos russes et chinois et pour obtenir le soutien des pays arabes, assigne des moyens très étendus à une ambition limitée: protéger les civils libyens.

Le président a souligné l'importance, à ses yeux, de voir les Etats-Unis agir exclusivement dans ce cadre accepté par la communauté internationale. A Moscou, le secrétaire à la Défense Robert Gates a enfoncé le clou. C'est aux Libyens seuls, a-t-il dit, qu'il reviendra de "décider" si Kadhafi doit partir. Dimanche, le chef d'état-major américain, Michael Mullen, n'avait pas exclu le maintien de Kadhafi au pouvoir à l'issue des opérations alliées. Le président Obama a aussi indiqué que les Etats-Unis transmettraient rapidement à d'autres les rênes de l'opération, l'Otan assurant un rôle de coordination.

"La tension ne fera que croître" (presse)

Dans l'immédiat, le chef de la coalition, le général américain Carter Ham, a exclu que les forces internationales agissent pour soutenir une offensive des rebelles ou pour éliminer le colonel Kadhafi. En d'autres termes, Washington espère le départ du dirigeant libyen, mais exclut que son action militaire aille dans ce sens. Un flou stratégique qui suscite de nombreuses questions aux Etats-Unis. "Il faut que nous sachions ce qui, dans l'esprit du président, doit être accompli au final en Libye", a réclamé dimanche soir Ileana Ros-Lehtinen, la présidente républicaine de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants.

"J'espère simplement que la nécessaire planification a lieu discrètement dans les murs du Pentagone et de l'Africom (le commandement américain en Afrique, ndlr), en dépit de l'incapacité troublante de l'administration à formuler publiquement des buts de guerre clairs", écrit l'analyste conservateur Max Boot dans la revue Commentary lundi. D'autant que "tant que Kadhafi continuera de gouverner une partie quelconque du territoire libyen, la guerre se poursuivra", prédit cet historien militaire dans son article, intitulé "Définir nos objectifs en Libye".

Les attentes diverses exprimées par les membres de la coalition "ne sont pas de bon augure pour la bonne coordination de l'alliance" des pays bombardant la Libye, relève de son côté l'analyste Robert Danin sur le site du Conseil des relations extérieures (CFR), un centre de réflexion américain. "Comment réagira Obama si la France et le Royaume-Uni s'attaquent à Mouammar Kadhafi?", interroge l'expert, qui rappelle qu'en 1956 Washington avait demandé à ses alliés britanniques et français de mettre fin à leur guerre contre le dirigeant égyptien Nasser. Les doutes sur les suites à donner aux premières frappes ne sont pas limitées aux Etats-Unis. Le quotidien britannique The Guardian affirme dans un éditorial lundi que "la tension entre la responsabilité de protéger des civils et le fait d'aider des rebelles à chasser un tyran ne fera que croître dans les jours à venir".

AFP

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