Japon: message historique de l'Empereur, situation critique à Fukushima

Le bilan officiel du séisme et du tsunami s'établissait mercredi soir à 4.314 morts, 8.606 disparus et 2.282 blessés. Mais dans la seule ville d'Ishinomaki, le nombre de disparus s'élèverait à 10.000, selon un responsable local.

L'Empereur du Japon s'est solennellement adressé mercredi à son peuple, confronté à une aggravation de la crise nucléaire et à l'immense tâche de porter secours aux 500.000 sinistrés du séisme et du tsunami.

"J'espère sincèrement que nous pourrons empêcher la situation d'empirer", a déclaré l'Empereur Akihito, intervenant pour la première fois dans une situation de crise depuis son accession au trône en 1989.

L'Empereur s'est déclaré "profondément préoccupé par la situation dans la centrale de Fukushima", où s'est poursuivi mercredi l'enchaînement alarmant des accidents pour le cinquième jour depuis le séisme le plus fort de l'histoire de l'archipel.

Après deux nouveaux incendies dans les réacteurs 3 et 4, la radioactivité mesurée à l'entrée du site a augmenté fortement vers 01H00 GMT avant de baisser ensuite.

"Le niveau de radioactivité près de l'entrée varie grandement d'heure en heure à des niveaux qui continuent à être nocifs pour la santé", a expliqué le porte-parole du gouvernement, Yukio Edano.

Le gouvernement a donc temporairement évacué mercredi matin les employés toujours sur le site, dont l'héroïsme a été salué par les médias japonais. La majeure partie des 800 employés avait déjà quitté les lieux sur ordre des autorités.

Les Etats-Unis ont recommandé mercredi à leurs ressortissants l'évacuation d'un périmètre de 80 km autour de la centrale nucléaire japonaise de Fukushima, du fait de niveaux "extrêmement élevés" de radiations

La principale inquiétude concerne la piscine de stockage du combustible usé dans le réacteur 4, qui a été fortement endommagé par deux incendies survenus mardi. L'émission de rejets radioactifs y est jugée possible.

Les autorités ont déployé un hélicoptère pour déverser de l'eau, mais ont dû renoncer à cause d'un niveau de radiation trop fort. Un canon à eau devait tenter d'arroser le réacteur 4.

Les enceintes de confinement des réacteurs 2 et 3, probablement endommagées, sont les autres sujets majeurs de préoccupation.

Le gouvernement nippon n'a cependant pas annoncé mercredi de nouvelles mesures de précaution pour la population, au delà de la zone d'exclusion de 30 km autour de la centrale.

Les radiations au-delà des 20 km "ne posent pas de danger immédiat pour la santé", a assuré mercredi soir M. Edano.

A Tokyo, à 250 km de la centrale, la population restait calme et disciplinée, mais l'inquiétude était palpable et l'activité fortement réduite. Les vents devraient demeurer favorables jeudi en repoussant vers l'océan Pacifique les rejets radioactifs de la centrale, selon la météo.

Les vents sont également scrutés avec une extrême attention par les voisins du Japon, en Chine, en Russie et jusqu'en Californie, au-delà du Pacifique.

En Chine, des messages catastrophistes ont été relayés sur internet et par SMS, mais les autorités ont assuré qu'aucun niveau anormal de radioactivité n'avait été détecté dans le pays.

La peur est ressentie jusqu'en Europe occidentale, pourtant située à près de 10.000 km, avec en Allemagne et en France une hausse des achats de pastilles d'iode.

En Europe, certains responsables font preuve d'un pessimisme extrême, bien supérieur à celui des autorités japonaises. "C'est une véritable catastrophe", a déclaré le commissaire européen à l'Energie Günther Oettinger qui avait évoqué la veille une "apocalypse". "On peut dire que cette installation n'est plus maîtrisée, on ne la contrôle plus", a-t-il dit.

L'Union européenne a recommandé de contrôler la radioactivité des produits alimentaires importés du Japon.

Le président américain Barack Obama s'est déclaré "profondément inquiet" pour les Japonais. Mais l'autorité de régulation nucléaire des Etats-Unis a estimé que Tokyo avait pris les "décisions adaptées" depuis le début de la crise.

La gravité sur le front nucléaire fait passer au second plan la situation très difficile des quelque 500.000 sinistrés ayant trouvé refuge dans 2.700 écoles ou salles municipales.

Le bilan officiel du séisme et du tsunami s'établissait mercredi soir à 4.314 morts, 8.606 disparus et 2.282 blessés. Mais dans la seule ville d'Ishinomaki, le nombre de disparus s'élèverait à 10.000, selon un responsable local.

Un froid mordant et des chutes de neige compliquent la tâche des 80.000 soldats et policiers japonais, épaulés par de nombreux secouristes étrangers.

Les sauveteurs estiment à présent qu'il y a peu de chances de retrouver des survivants dans les zones ruinées.

Dans la zone proche de la centrale, la peur s'ajoute. "L'inquiétude et la colère du peuple de Fukushima est à son comble", a témoigné Yuhei Sato, le gouverneur de la préfecture.

"Il y a 500 refuges où sont installés 100.000 personnes. Elles ont absolument besoin de combustible pour se chauffer mais les vivres, les produits de première nécessité et le carburant n'arrivent pas", s'est-il plaint.

Des millions de Japonais sont privés d'eau, d'électricité, de chauffage et de nourriture en quantités suffisantes.

Le porte-parole du gouvernement, M. Edano, a reconnu "des signes d'énervement" et exigé une amélioration dans la distribution des vivres.

Après avoir chuté de 16% en deux jours, l'indice Nikkei de la Bourse de Tokyo a rebondi de 5,68%, soutenue par la recherche de bonnes affaires.

L'activité économique devrait rester fortement perturbée jusqu'à la fin de la semaine avec la suspension partielle de la production de grands groupes comme Toyota.

Des étrangers ont continué mercredi à quitter la région de Tokyo, comme l'ont conseillé un grand nombre de pays.

Mais les liaisons aériennes étaient perturbées par la décision de certaines compagnies aériennes d'annuler des vols vers Tokyo ou de les rediriger vers Osaka ou Nagoya.

AFP

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