Sept ans après, l'affaire «Macias» semble revenir et ce que n'a pas pu faire Bouteflika, Sarkozy va le faire: faire visiter Constantine à Enrico Macias, ou le contraire. Pour certains déjà, quelque part, le président français fait chanter négligemment une certaine Algérie avec un chanteur: soit il vient avec, soit il ne vient pas sans. Dans les deux cas, il fait de la politique, fait passer un message et affirme une virilité transnationale qui lui fait défaut dans sa vie personnelle. Il veut voir Constantine, comme Chirac a vu Oran, mais à sa manière. Il veut signer un traité d'amitié mais avec la Méditerranée et pas seulement avec l'Algérie, contrairement à Chirac. Du coup, on oublie avec facilité que le problème n'est pourtant pas dans la venue de Sarkozy, ni dans celle du chanteur Macias. Il est dans le paradoxe algérien: que va faire l'Algérie officielle? Car dans le tas, il ne faut pas oublier que nous avons un chef de Gouvernement qui ne peut pas dire non à Sarkozy mais qui ne peut pas dire oui à Macias puisqu'il a déjà dit non à l'époque où il n'était pas chef de gouvernement mais animateur d'un forum de conservateurs anti-Macias.

A l'époque, Belkhadem avait réussi son coup en disant non à Macias tout en disant non à Bouteflika qui a dit oui à Macias et qui a fini par dire non à Enrico. A l'époque, Belkhadem et ses pairs ont gagné un match très nul, mais aujourd'hui Belkhadem est employé par Bouteflika qui est l'ami de Sarkozy qui est l'ami de Macias et de personne. Dans le tas, nous avons aussi Bouteflika qui a fini par laisser tomber Macias en laissant tomber l'invitation, à l'époque où il avait plus besoin d'un tambour algérien que d'un chanteur juif. A l'époque aussi, Bouteflika venait d'être élu et il avait besoin des conservateurs, comme aujourd'hui ils ont besoin de lui. Il ne pouvait pas s'en passer, il y a huit ans et aujourd'hui ils ne peuvent pas s'en passer ne sachant pas s'il va continuer encore pour sept ans.

Que va-t-il se passer? Rien. Sarkozy va venir. Constantine va accueillir. Les conservateurs ne vont rien dire ou dire n'importe quoi. A l'époque, on n'avait rien à faire de mieux que de chasser un chanteur. Aujourd'hui, on ne peut rien faire d'autre que chasser ce souvenir. L'Algérie officielle veut des excuses de la France, la France veut indirectement des excuses pour son chanteur, Macias veut voir Constantine, Constantine va voir Sarkozy, Sarkozy va voir Bouteflika, Bouteflika sera accompagné par Belkhadem. Belkhadem ne se souvient de rien. La Réconciliation a pardonné à des Fetwa, pourquoi pas à des chansons?

On aurait pu éviter le ridicule puisqu'on ne peut pas éviter ce genre de situation.

Kamel Daoud (QO)