G20 : les Nord-Coréens ne doivent pas payer pour Kim Jong-Un

La puissance militaire de la Corée du Nord inquiète beaucoup de pays.
La puissance militaire de la Corée du Nord inquiète beaucoup de pays.

Martyrisés par leurs dirigeants, les Nord-Coréens risquent actuellement d’être victimes d’une guerre contre ceux-là mêmes qui confisquent leurs droits humains. Par ce chantage à la guerre nucléaire, la Corée du Nord se positionne comme un pion dans la partie d’échec que joueront au G20 la Chine et les États-Unis pour le rôle de dirigeant de la planète.

Personne n’est dupe du jeu qui se joue actuellement sur le dos des Nord-Coréens. Le test du 4 juillet d'un missile balistique par Pyongyang peut difficilement être perçu comme autre chose qu’une provocation des États-Unis. Ceux-ci ont donc demandé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU. Ils doivent aussi se réunir à Hambourg avec le Japon et la Corée du Sud pour discuter de la situation pendant qu’ils participeront au G-20.

Au niveau international, la Corée du Nord a été et reste une créature de la Chine. Les Chinois assurent son existence avec plus de 80 % de ses échanges extérieurs. Le jeu de la Chine est donc clair quand elle demande à la Corée du Nord de décréter un moratoire sur ses tests nucléaires et ses tirs de missiles balistiques en échange de l’arrêt des exercices militaires conjoints à grande échelle des États-Unis et de la Corée du Sud. Ce sont ses propres intérêts stratégiques qu’elle met de l’avant. Contrairement à ce qu’elle affirme, la Chine ne fait aucun effort réel pour résoudre la question nucléaire nord-coréenne qui lui fait marquer des points et la rehausse un peu plus comme superpuissance internationale a chaque fois que les États-Unis tapent du poing sur la table. Quand elle invite toutes les parties concernées à la retenue, elle joue le pompier d’un feu qu’elle entretient.

L’histoire est là pour le prouver. La Chine a toujours empêché les pressions onusiennes d’affecter sérieusement la Corée du Nord. Rappelons que des sanctions s’empilent l’une sur l’autre depuis le premier essai nucléaire de 2006. Encore le 2 juin dernier le Conseil de sécurité adoptait une résolution qui élargissait ses sanctions contre le renforcement des programmes nucléaire et balistique de la Corée du Nord. Si le texte a été voté à l'unanimité, c’est que la Chine lui avait ôté au préalable les dents nécessaires pour qu’il fasse mal à son allié de Pyongyang. Les propositions qu'un embargo pétrolier ou l'interdiction de commerce maritime qu’avait fait Washington en avait été retiré pour avoir cet accord unanime. Objectivement, la Corée du Nord n’aurait eu aucun moyen de résister aux pressions de l’ONU si la Chine ne l’aidait pas en coulisse.

C’est donc une partie d’échec qui se jouera pendant le G20 entre la superpuissance en fonction et celle qui veut prendre sa place. La Chine vise sur cet échiquier particulier de la Corée du Nord le recul stratégique des États-Unis dans cette zone d’influence. Si elle y parvient, la Corée du Nord finira par obtenir l’arme nucléaire et restera une épine dans le pied des Américains pour des années à venir. La Chine essaie de réussir là ou l’Iran a échoué en misant sur l’affaiblissement de la superpuissance survivante.

Si on prend cette situation sur un niveau plus régional, il est certain que la Corée du Nord ne bluffe pas. L’objectif de Kim Jong-un est de faire signer aux États-Unis un pacte de non-agression qui permettrait la survie de son régime inhumain. Il veut être le David qui va faire plier les genoux à Goliath. Vestige de la guerre froide, la Corée du Nord n'est pas un "tigre de papier" sur le plan militaire. Son armée est aguerrie et se compose de plus d’un million d’hommes. C’est la seule force interne à l’exception de l’endoctrinement massif de sa population qui maintient le régime en place. Tous les outils de l’État et l’aide que la Chine donne à ce pays servent à la renforcer. Une invasion terrestre pour libérer la population de ce régime totalitaire despotique et soulager la planète de cette aberration humanitaire pourrait être une erreur qui coûterait la vie à des milliers de soldats et se solder par un échec. En fait, les généraux en poste à Pyongyang espèrent une erreur stratégique de ce type de la part des États-Unis et de la Corée du Sud pour montrer comment ils sont invulnérables et protégés par leurs infrastructures militaires patiemment bâties. La Corée du Nord provoque donc sciemment les États-Unis avec des actes de cyberguerre. Elle a d’ailleurs eu d’importants succès militaires ce printemps en touchant tous les continents dans une cyberattaque concertée. Elle avait aussi en 2013 réussi une attaque des banques sud-coréennes.

Au niveau des individus, les dirigeants nord-coréens n’ont aucun scrupule à sacrifier une bonne partie de leur population pour la survie de leur régime. Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Corée du Nord, Tomas Quintana, affirmait à Genève le 13 mars que le problème nucléaire et la reprise des tests de tirs de missiles balistiques détournaient l'attention de la question des droits de l'homme. Quelques années auparavant, le rapport publié en février 2014 par l'Organisation des Nations Unies avait montré l'étendue des violations des droits de la personne qu’il s’y faisait. Il décrivait le pays comme un régime totalitaire qui a fait des millions de victimes parmi sa propre population. Plus de 25 millions d’individus sont pris au piège dans un endroit ou les droits de la personne et la justice telle que nous la connaissons n’ont aucune vraie signification. Le rapport de Tomas Quintana a montré que la situation était particulièrement préoccupante dans quatre camps de prisonniers.

En conclusion, que ce soit au niveau international, régional ou humanitaire, les dirigeants de la Corée du Nord posent un important défi à l’ONU qui voit beaucoup de ses pays membres menacés. Le 30 mars 2013, le président-dictateur nord-coréen a déclaré que son pays était en état de guerre contre la Corée du Sud et a réactivé le site atomique de Yongbyon, qui est à 100 kilomètres au nord de Pyongyang. Pour le premier ministre japonais Shinzo Abe, la Corée du Nord a ignoré le 4 juillet l'avertissement répété de la communauté internationale en tirant un nouveau missile balistique. Selon lui, ce lancement de missiles montre clairement que la menace de la Corée du Nord a encore augmenté. Si l’ONU ne peut rien faire en raison du véto de la Chine, Tokyo pourrait en arriver à la conclusion qu’il est menacé de façon existentielle. Il pourrait alors faire appel au respect de l’accord de défense entre le Japon et les États-Unis. Une semaine après sa prise de fonction, Donald Trump a réitéré l'engagement de l'Amérique à défendre ses alliés et à leur étendre les moyens américains de dissuasion. Cette situation pourrait entrainer une frappe préventive américaine.

Les États-Unis pourraient même en profiter pour détruire les installations nucléaires. Cette situation s’est déjà produite dans d’autres pays auparavant. Donald Trump pourrait aussi se servir de cette situation pour lui-même démarrer une partie d’échec avec la Chine en Allemagne et l’empêcher d’intensifier ses relations commerciales avec la Russie en Eurasie. Il sera intéressant de voir comment les pays du G20 géreront cette situation explosive et désastreuse au niveau humanitaire. Quelles que soient les solutions envisagées, les Nord-Coréens ne devraient pas avoir à payer pour les actions de Kim Jong-Un.

Michel Gourd

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