« Avez-vous vu Hattab ? » : Extraits de "Journal d'un homme libre"

« Avez-vous vu Hattab ? » : Extraits de "Journal d'un homme libre"
Un jour, la guerre entre Kaiser Moulay et la tribu des Têtes-képis prit une tournure vaudevillesque.
Tel un bon Audiard, la comédie commença un matin d’automne à Paris.
Son titre ne dit rien à personne : « Avez-vous vu Hattab ? »
En vedette, le fondateur du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), évincé de la tête du mouvement, en août 2004, par l’émir Abdelmalek Droudkel.
Ce fut pourtant un superbe show, désopilant, qui fit bien rire Alger et où l’on retrouvait, dans le casting, comme de juste, l’incontournable Grand Vizir Yazer.
Ce 5 octobre donc, le Grand Vizir Yazer annonce fièrement que Hassan Hattab s’était rendu aux autorités le 22 septembre, qu’il était donc détenu par les services de sécurité en attendant son procès du 4 novembre et que, « considéré aujourd'hui comme repenti », il ne risquait aucune condamnation.
En vendant la mèche, Le Grand Vizir agissait-il pour le compte de Kaiser Moulay qui pensait ainsi arracher le chef terroriste des griffes du général Toufik pour le gracier ? Le président tenait à faire de Hattab un « repenti modèle » et lui faire bénéficier, une fois jugé, du « pardon » prévu par la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Selon deux journaux proches du cercle présidentiel, Hattab se serait engagé à convaincre les maquis de cesser le feu et d’obtenir la reddition d’une centaine d’éléments armés restés fidèles au fondateur du GSPC. Un beau trophée pour le clan du chef de l’État à la recherche d’une stature internationale pour le Nobel et le troisième mandat !
Seulement voilà : cette stratégie présidentielle ne fut, apparemment, pas du goût du clan d’en face, furieux de ce solo de Kaiser Moulay.
Il avait les moyens de riposter.

L’intrigue tourna alors très vite à la mauvaise plaisanterie.
Après avoir annoncé sa reddition, les dirigeants du pays ne se souvinrent plus si Hassan Hattab s’était rendu ni même où il se trouvait.
« Qu’il soit arrêté ou en fuite, la loi s’appliquera sur lui dans tous les cas de figures. S’il ne vient pas, on appliquera la mesure de contumace …», affirme, droit dans ses bottes, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Belaiz, à propos d’un homme dont Le Grand Vizir Yazer avait pourtant assuré qu’il était entre les mains des autorités.
Seconde gifle pour Le Grand Vizir : contrairement à ce qu’il a annoncé aux journalistes, le terroriste Hattab ne bénéficiera pas des dispositions de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. En martelant que « que la loi s’appliquera à Hattab », le ministre de la Justice, Tayeb Belaiz, semble avoir tranché : Hattab sera lourdement condamné et jugé en
« son absence » ! Il est accusé, entre autres chefs d’inculpation de « dépôt d’explosifs dans des édifices d’intérêt général », selon le tribunal criminel près la cour d’Alger, un délit éliminatoire, qui exclut son auteur du bénéfice de la Charte nationale pour la paix et la réconciliation nationale.
Le Grand Vizir aura fait deux gaffes en une seule phrase.

4 novembre. Le juge de la cour d’Alger appelle l’accusé Hassan Hattab.
« Absent ! »
Aux avocats qui demandent des clarifications, le juge fait alors une étonnante déclaration :
« Pour la justice, Hattab est toujours en fuite. Il n’y a aucun document attestant qu’il est entre les mains de la justice. ». Les avocats reviennent à la charge et citent la déclaration du Grand Vizir Yazer à Paris qui indique bien que le chef terroriste était entre les mains des services de sécurité. Réponse déroutante du procureur de la République : « La cour ne peut pas juger un individu en se basant sur des déclarations d’un ministre » !
Devant « la nécessité de compléter les procédures d'instruction concernant les accusés en « fuite », le président du tribunal décide alors du report du procès de Hattab à la prochaine session du tribunal criminel d'Alger début 2008.
Ce report indique bien que l’arrangement entre les deux clans n’a pas été trouvé.
« Il y a trop de confusion dans cette affaire et l’impression est que le brouillard est entretenu à dessein » résume un quotidien proche du cercle présidentiel.
Autrement dit, les services qui détiennent Hattab ont refusé de le présenter devant le juge, privant Kaiser Moulay d’une manœuvre politique dont il aurait tiré profit !
Ou, plus simplement dit, le chef terroriste ne sera jugé qu’une fois que son sort sera « politiquement tranché » entre ceux qui désirent l’amnistier (le clan Kaiser Moulay) et ceux qui tiennent à le condamner.
Le bras de fer est tout entier résumé par cette énième déclaration embarrassée de Le Grand Vizir , le 31 octobre, sur les ondes de la Radio nationale : « Certes, Hattab s’est repenti, mais il est impliqué dans des affaires et des attentats terroristes » !
Le but semble atteint : démolir la parole donnée aux islamistes par le clan Kaiser Moulay au nom de la « réconciliation nationale.»
La mauvaise intrigue reste entière : où est Hattab ? Elle pourrait même devenir, avec le temps : « Qui est Hattab ? »

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Commentaires (9) | Réagir ?

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Numidien

Le monde entier a aujourd'hui tut compris:Tous ces Hattab et ces barbus sont la pure création du Pouvoir. Le malheur est que seuls les algériens subissent le malheur devant le silence des Nations!

Oui, Messieurs des Nations Unies, de la Cour Pénale Internationale, de la France et des Etats Unis, oui vous savez tout et vous laissez un peuple crever à petits feux. Où sont vos droits de l'Homme?

Comment pouvez-vous acceptez que des criminels désignés par le Pouvoir algérien reviennent à la vie normale sans être jugés? et que ce même Pouvoir ne soit pas inquiété? Dites le moi.

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louka

l'association de malfaiteurs est ainsi concrétisée.

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