Célébrations officielles de Yennayer : tout pour contrer le MAK !

Le MAK draine d'importantes foules en Kabylie.
Le MAK draine d'importantes foules en Kabylie.

Tout le monde veut prendre sa place. Le Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK) fait trembler le pouvoir et infléchir jusqu’à ses positions historiques les plus rigides.

Il aura fallu un combat pacifique d’une quinzaine d’années, ferme et inflexible, et des revendications extrêmes, pour que le pouvoir daigne enfin entendre certaines doléances identitaires, datant de plus de 50 ans. Yennayer fêté officiellement en Algérie, par un régime vieillissant, plus proche de la gériatrie que du renouveau, est un événement en soi. Mais n’est-il pas déjà trop tard pour essayer de bien faire ?

À moins que ça ne soit une autre ruse. Sait-on jamais !

Le refus maladif de reconnaître la composante amazighe du peuple algérien a fini par ancrer, chez la population de Kabylie, le sentiment de rejet et de mépris qu’a cultivé le pouvoir depuis l’indépendance. Un sentiment qui s’est raffermi, à cause des multiples campagnes répressives, menées par les appareils de sécurité de l’Etat, dans les régions kabyles.

Le contentieux remonte à l'aube de l'indépendance. Persécution des militants de la cause berbère, manipulation de la rue algérienne, Mensonges, assassinat de jeunes manifestants désarmés (126 mort pendant le printemps noir en 2001/2002), emprisonnement d’intellectuels, crimes politiques ciblés, le pouvoir algérien a usé, cinquante années durant, de stratagèmes infectes, pour étouffer la voix bourdonnante d’une éternelle révolte.

Le MAK, les prémisses d’une naissance voulue

Une marche historique des Kabyles avait même été organisée le 14 juin 2001, par des centaines de militants de la cause amazighe. Le Mouvement citoyen, Arouchs) (*) avait appelé à marcher pacifiquement sur la présidence, dans le but de remettre la plateforme d'el Kseur et enfin desserrer l’étau policier imposé à l’époque à toute une région. Ce à quoi, le pouvoir en place, avait répondu par une campagne de désinformations abjecte qui avait appelé les Algérois à défendre leur ville contre… l’envahisseur Kabyle ! Les manifestants pacifiques kabyles se souviendront longtemps de ces voyous avec armes blanches montés remontés à bloc par les discours du pouvoir et ses relais contre les Kabyles !

Résultat, des dizaines de morts et des centaines de blessés pris dans un véritable traquenard, orchestré par les éléments en civil de la sécurité militaire de l’époque. Que pouvons-nous attendre après cela, d’un peuple spolié de son identité, meurtri dans sa chair, humilié par ses semblables et stigmatisé par une autorité dictatoriale et illégitime ?

Le MAK est né, comme une réponse collective des consciences désabusées à une grande injustice. Devant le mépris du pouvoir, il ne pouvait que naître. Tous les ingrédients étaient réunis pour. Le bouillon primitif, comportait, à la base, tous les éléments nécessaires pour former ses organes. La mutation était prévisible et les revendications séparatistes aussi. Il n’y a que le pouvoir qui a été pris de cours, en tout cas, qui essaie de le faire croire.

Provoquer l’embrasement pour jouer aux pompiers

Il aura fallu des revendications extrêmes, pour que les "zaims" détendent le "cheveu de Mouaouia", qu’ils chérissent tant, et qu’ils lâchent un peu du lest. Reconnaissance de la langue amazighe comme langue nationale, puis officielle, sa constitutionnalisation, son enseignement parcimonieux. Toutes des "concessions" l'ont été au prix de mille sacrifices et combats. Que l'on sache, elles n’ont, en rien, ébranlé l’existence du pays, bien au contraire. Le pouvoir aura attendu d’avoir le feu au cul, pour sortir citernes et boyaux.

Pourtant, l’ensemble des Algériens se reconnaissent dans les revendications amazighes, tous fêtent naturellement Yennayer comme un héritage ancestrale, parlent des dialectes truffés de mots berbères, habitent des villes qui sentent la berbérité jusqu’aux toponymies. Tous réclament la vérité sur leurs origines, leur histoire, leur face d’identité cachée, son côté obscurcie.

Peut-on encore sauver l’unité nationale ?

Si l’on veut réellement "désamorcer" la crise identitaire en Kabylie, il faudra nécessairement s’asseoir autour d’une table, discuter de tout, avec tous et en toute honnêteté. Diaboliser le mouvement du MAK, le dénigrer ou minimiser son influence n’est assurément pas une attitude responsable. Ce mouvement est populaire, pacifique et a des revendications qui peuvent être sujettes à négociation. Rejetez-le, et vous aurez peut-être, un mouvement encore plus radical dans quelques années, avec qui, ni négociations, ni compromis ne seront possibles ! La sagesse doit donc prendre le dessus sur les surenchères et autres magouilles sans lendemains.

Le signe d’apaisement voulu par le pouvoir algérien, en organisant les festivités du jour de l’an Amazigh, ne doit pas être un jeu politique perfide, dont l’unique but est de "dépouiller" le MAK, de ses revendications identitaires. Ni de noyer le "poisson" identitaire ! Il faut surtout que les autorités envoient des signes concrets d’ouverture démocratique de grande envergure, dans lesquelles tous les mouvements pacifiques, quels qu’ils soient, puissent s’exprimer en toute liberté. Il est temps de se réapproprier le bon sens et l'intérêt national. Le système tel qu'il est voulu et entretenu par une clientèle intéressée a atteint ses limites cliniques. Aussi, il urge qu'une transition vers un modèle politique, démocratique et pluriel, se fasse pacifiquement entre la génération des "tab Jnanhoum" et la jeune génération algérienne.

L'intérêt de l'Algérie de demain y va de la responsabilité des hommes au pouvoir aujourd'hui. C’est uniquement par cette voie que l’Algérie, en tant que nation, traversera le temps et les hommes. Autrement, c’est l’inéluctable perdition qui l’attendra au tournant d’une transition ratée.

Habib Khalil

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Commentaires (6) | Réagir ?

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adil ahmed

merci

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thameur chelali

Vive L'Algerie

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