El Moudjahid du temps de Nezzar

Khaled Nezzar
Khaled Nezzar

Chronique de Mohamed Benchicou (1ère partie)

La controverse à laquelle nous ont invités nos confrères d’El-Moudjahid et d’Algérie patriotique est, certes, sans panache mais pas sans intérêt. Le vieux quotidien avait publié un de ces éditoriaux parachutés qui font sa renommée, un réquisitoire contre le général Nezzar cette fois, rédigé dans quelque sombre bureau de ministère, un texte naturellement assassin, évidemment mal écrit et courageusement anonyme. Il y est fait procès au général pour avoir incité les députés de ne pas adopter le projet de loi empêchant les généraux à la retraite de s'exprimer publiquement. L'ancien ministre de la Défense devient alors un vilain rentier effrayé par le nouveau vent démocratique qui soufflerait dans le pays et qui menacerait les positions rentières de la hiérarchie militaire.

La riposte est venue quelques heures plus tard par un article tout aussi aimable, publié sur le site Algérie patriotique qui appartient aux Nezzar et où El-Moudjahid est relégué au rang de xxxxx, lui qui est né dans la ferveur du combat pour l'indépendance. L’intérêt de l’algarade est moins dans les noms d'oiseaux utilisés pour abattre l'autre que dans l'image qu'elle renvoie d'un régime vieilli, né d'un coup de force militaire à l'indépendance et qui se désagrège lamentablement, dangereusement, comme une maison mal construite et rattrapée par le temps. Il finit dans la prédation, le mensonge, l'opprobre, la déconsidération, la parodie.... Nous assistons à cette terrible agonie qui s’étale dans le temps, prolongeant, d’autant, le malheur des Algériens.. Nezzar et Bouteflika sont pourtant deux acteurs majeurs du coup de force de 1962 qui avait écarté brutalement le Gouvernement provisoire, seule autorité légale, pour laisser place au pouvoir militaire. Khaled Nezzar comptait parmi les officiers qui dirigeaient les combats contre les maquisards des wilayas III et IV opposés à l’avènement d’un pouvoir militaire.

Bouteflika, lui, fut chargé par Boumediene en décembre 1961, de trouver une "marionnette" civile, un chef d’Etat docile, inféodé aux militaires, parmi les cinq dirigeants du FLN détenus au château d’Aulnoy, en région parisienne. En tant que l'un des principaux architectes du régime militaire, Bouteflika a toujours conçu l’armée comme la source du pouvoir. Parlant de l’épisode de 1994, il dira à Elisabeth Shemla : «Je voulais être le candidat de l’Armée. Uniquement de l’Armée. Je ne voulais avoir de fil à la patte ni avec la société civile ni avec la mouvance islamiste. En tant que candidat de l’Armée, je me présentais en réconciliateur.» (Elisabeth Shemla, Mon journal d’Algérie, novembre 1999 - janvier 2000, Flammarion) Un demi-siècle plus tard, le commandant Bouteflika, émissaire décisif dans la formation d'un Etat militaire, devient le champion de l'Etat civil, vouant les généraux au mutisme, au nom de la démocratie ! Le système repose sur le mensonge, la fourberie et l'esbroufe. Mieux : le clan présidentiel accuse Khaled Nezzar d'être effrayé par la perspective d'un état civil qui viendrait mettre fin a l'hégémonie militaire ! C'est ce que laisse entendre El-Moudjahid qui accuse le général Nezzar de «faire partie du dernier carré des résistants à l’avènement d’un État civil et démocratique, débarrassé de toute tutelle non issue du scrutin populaire». Vous avez compris : Bouteflika, Saadani et Tliba sont "élus", mais pas Nezzar ! Bouteflika, Saadani et Tliba, jouissant de "la légitimité des urnes" ont le droit de faire de la politique, de s'enrichir, de mentir, de comploter, mais pas les généraux à la retraite que personne n'a élus ! El-Moudjahid appelle "scrutin démocratique" la parodie électorale organisée par les autorités pour duper l'opinion internationale. Mais qui a fait élire Bouteflika et Saadani, si ce n'est la DRS, superviseur exclusif des kermesses électorales ? Quel sort aurait eu Saadani si le DRS n'avait couvert son forfait et aidé à monter sur le perchoir ? Dans l'Etat civil de Saadani on ss'en va pas, comme dit la chanson. On s'éternise. L'Etat civil de Bouteflika-Saadani est un "machin" qui ne fonctionne qu'avec des dirigeants indéboulonnable. Il ressemble à un bar bricolé en église et dans laquelle les prêtres ne seraient autres que les anciens taverniers.

M.B.

Seconde partie à venir

Plus d'articles de : Politique

Commentaires (1) | Réagir ?

avatar
albert smail

... Je me range du coté d'El-Moudjahid... pour une fois.

-1