Acquis à la droite, le Sénat français va durcir la loi Travail

Le Sénat français.
Le Sénat français.

Le Sénat français, où la droite est majoritaire, engage lundi l'examen du projet de loi Travail avec l'objectif d'y réintégrer des mesures en faveur des entreprises qui en avaient été retirées par la gauche lors de l'examen à l'Assemblée.

Le président du groupe Les Républicains du Sénat, Bruno Retailleau, a estimé lundi sur RTL que les propositions du Sénat n'étaient "ni caricaturales", "ni antisociales". "Ce que nous allons proposer, ce n'est pas la caricature, c'est ce que d'autres pays européens, parfois dirigés par des sociaux-démocrates, ont proposé", a-t-il dit en faisant allusion aux propos tenus par certains dirigeants socialistes.

Didier Guillaume, le président du groupe socialiste du Sénat, a réaffirmé lundi qu'avec sa version de la loi El Khomri, la droite sénatoriale "sacrifi[ait] ainsi le droit du travail".

La commission des Affaires sociales du Sénat a porté de 11 à 20 salariés le seuil rendant obligatoire l'élection de délégués du personnel, de 50 à 100 salariés pour la mise en place d'un comité d'entreprise ou d'un comité d'hygiène et de sécurité. Elle explique dans un communiqué qu'elle a souhaité, "face à un contexte social tendu", redonner à ce texte l’ambition qui était la sienne "avant les reculs successifs" du gouvernement.

La commission, qui affirme vouloir en faire "le premier acte" d'une refondation du Code du travail, a modifié son article 2, qui donne la primauté aux accords d'entreprise sur les conventions interprofessionnelles ou de branche. Son texte confirme cette "inversion des normes" rejetée par la CGT, Force ouvrière, une partie de la gauche et même la CFE-CGC, pourtant classée parmi les "réformistes" comme la CFDT.

Suppression de la durée légale du temps de travail

Il rétablit le plafonnement des indemnités prud'homales pour licenciement abusif, disposition retirée par le gouvernement pour convaincre les syndicats réformistes de soutenir le texte.

De même, il revient au périmètre national pour l'évaluation des difficultés pouvant justifier un licenciement économique. Il donne en outre la possibilité au juge, en cas de doute sur le caractère réel et sérieux d’un licenciement économique, de solliciter une expertise extérieure.

Les sénateurs de droite ont ajouté plusieurs dispositions, dont la suppression de la durée légale de travail et la fixation d'une durée de référence par un accord d'entreprise.

Un des amendements retenus renvoie à la négociation d'entreprise ou de branche le soin de fixer, de manière facultative, une durée minimale de travail à temps partiel. Un autre facilite le recours aux conventions de forfait en jours et heures dans les entreprises de moins de 50 salariés en les exonérant de l'obligation de conclure un accord collectif.

Le texte autorise les chefs d'entreprises de moins de 50 salariés pourvues d’institutions représentatives du personnel mais sans délégué syndical, à signer directement des accords collectifs avec ces IRP, quel que soit le thème abordé.

Après le vote du Sénat, une commission mixte paritaire (CMP) Assemblée-Sénat sera convoquée pour tenter de mettre au point un texte commun. Une formalité, l'échec de la CMP étant prévisible.

Le gouvernement a déjà prévenu que lors du retour du projet de loi à l'Assemblée nationale, en juillet, il rétablirait la version, à quelques ajustements près, sur laquelle il a engagé sa responsabilité en première lecture.

L'Assemblée a constitutionnellement le dernier mot mais le gouvernement pourrait recourir de nouveau à la procédure de l'article 49-3 de la Constitution s'il ne parvient à convaincre les députés PS qui ont refusé de le voter en première lecture. Le gouvernement espère faire adopter définitivement son projet de loi avant la pause estivale, le 22 juillet.

Reuters

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