L’endettement extérieur de l'Algérie est inévitable

Contrairement à ses déclarations Sellal et son gouvernement ne maîtrisent pas les indicateurs économiques.
Contrairement à ses déclarations Sellal et son gouvernement ne maîtrisent pas les indicateurs économiques.

La levée des sanctions économiques pesant sur l'Iran n'a pas tardé à produire ses effets : le ministère iranien du Pétrole qui avait ordonné l'augmentation de la production pétrolière du pays de 500.000 barils par jour, confirmée d’ailleurs par le responsable de la compagnie nationale pétrolière (NIOC) n’a pas suscité des inquiétudes car de nombreux analystes sous-estimaient l’arsenal productif de ce pays et ont cru qu’il s’agissait d’un vœu pieux iranien.

Il se trouve que depuis le début de mars 2016, la production ne cesse d’accroître et le niveau demandé n’est pas loin d’être atteint. Membre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), l'Iran produit actuellement 2,8 millions de barils par jour et en exporte un peu plus d'un million de barils. L’aile réformatrice de ce pays vient de remporter les élections et donc l’élan entrepris devra se poursuivre quelles qu’en soit les conséquences. S’attendre à une réduction de sa production dans le cadre de la prochaine réunion de l’organisation pétrolière serait se leurrer. La conséquence immédiate est sans aucun doute la fluctuation des prix du brut tantôt vers le bas une autre fois vers le haut en fonction de la demande, de la reprise de la croissance dans les pays consommateurs, de l’évolution de la situation géopolitique en Syrie qui contamine tous les pays producteurs de la région du Moyen-Orient. Le gel de la production décidé par le Qatar, la Russie, l’Arabie Saoudite et le Venezuela a certainement fait réagir le marché vers une hausse légère des prix mais très loin de ce qui est espéré.

L’Algérie devra en principe tenir compte de ce contexte pour réajuster ses prévisions budgétaires qu’elle aurait pu chiffrer en tenant compte de toutes les possibilités qui s’offrent à elle avec pragmatisme et surtout sans panique malgré une situation difficile. Ce n’est malheureusement pas ce que l’opinion publique constate. On est en présence d’une cacophonie d’abord gouvernementale puis managériale. Le ministre de l’Energie, de toute évidence, s’appuyant sur un choix de la politique d’investissement, de financement et de gestion de sa trésorerie, déclare que Sonatrach pourrait faire appel à un endettement externe, ce qui, malgré la garantie du Trésor public, est normal et rentre dans le cadre sa stratégie de "corporate finance".

De son côté, le Président du groupe Sonelgaz évalue les besoins de l’entreprise à plus de 12 milliards de dollars qu’on ne pourra trouver que sur les marchés financiers à condition d’en faire bon usage. Le Premier ministre balaie tout cela d’un revers de la main en disant que tant que l’Algérie maîtrise ses indicateurs macro-économiques, elle ne s’endettera pas à l’extérieur mais fera appel aux artifices obligataires sans pour autant chiffrer son approche. Un député, interrogé par une chaîne qui émet de l’étranger sur les difficultés d’équilibre budgétaire 2016 rassure que tant que les prix du pétrole ne descendent pas au dessous de 37 dollars, il n’y a aucune inquiétude. Il a donc oublié que la loi des finances pour 2016 qu’il a votée haut la main a été certes, faite en se basant sur ces prix mais son équilibre dépasse de prés de trois fois cette valeur. Maintenant sur le plan micro-économique les avis divergent même dans des secteurs homogènes.

Ainsi, en matière d’énergie renouvelable, les politiques annoncent une installation future de près de 22 mégawatts ce qui représente 27% pour arriver d’ici à 2030 à 82 000 mégawatts. De l’autre côté, ceux du terrain créent à "l’utopie technique" d’un tel programme et les spécialistes le confirment dans les conditions de crise de financement que connaît l’Algérie à moins de renouer avec l’endettement du type de la décennie 1990. Cette confusion portée sur la place publique fait peur au citoyen lambda qui n’arrive plus à suivre entre ce qu’il vit et le discours des uns et des autres. Aucun acteur politique ou managérial et encore plus des spécialistes ne chiffrent ce qu’il propose. Peut-on pour cela circonscrire les difficultés financières de l’Algérie ? D’abord et implicitement, les pouvoirs publics avouent leur échec de mobiliser les fonds de l’informel comme solution réduire le déficit budgétaire.

En termes plus simples, la fuite des devises notamment vers l’Espagne pour permettre aux Algériens riches, voire même maintenant moyennement riches, d’investir dans l’immobilier est confirmée. Ses conséquences immédiates et les citoyens le sentent voire le vivent est la contraction de l’offre de l’euro d’où son renchérissement au détriment de la monnaie nationale, ce qui fera grimper ce qu’on pourrait appeler l’inflation réelle. C’est inutile de bluffer, il n’y a aucune maitrise des indicateurs économiques car personne ne sait quant on va inverser la courbe de chômage ni quand on va livrer les logements même cette idée d’emprunt obligataire à 5% figure dans les propositions du Forum des chefs d’entreprises. Donc, experts interrogé, membres du gouvernement, secteur publics et privés ont une tendance affichées de faire peur aux citoyens pour certainement chacun en fonction de ses intérêts manage la crise pour éloigner les uns et les autres des solutions réelles, pourtant faciles. Si on évite les chiffres brouette et les convertir en dollars au cours d’aujourd’hui soit 1 dollar pour 109 dinars, la loi des finances pour 2016 a prévu des recettes sur la base de 37 dollars le baril de 43,6 milliards de dollars, le crédit ouvert par secteur est à 44,1 milliards de dollars quant celui de l’équipement, il est de 29,2 milliards de dollars ce qui ramènent les dépenses totales à 73,3 milliards de dollars et s’éloigne ainsi de l’équilibre de 29,7 milliards de dollars.

En gardant les recettes fiscales ordinaires constantes on devra équilibrer le budget avec un prix du baril qui devra avoisiner les 110 dollars. Etant donne, les conditions de l’économie mondiale, ce niveau des prix ne peut être atteint ni en 2016 ni en 2017, donc il va falloir compter sur des actions internes. Quelles sont-elles concrètement ? Il s’agit en fait d’un bouquet de mesures qui touchent à la fois les recettes et les dépenses. Quand tout sera tenté, on puise sur le fond de régulation des recettes. Il faut préciser d’abord que selon les données officielles, l’Algérie tous produits confondus pompe 1,185 millions de barils qu’elle vend en moyenne à 45 dollars car le prix du Sahara Bend est toujours supérieur à celui du Brent. Il y a donc quelqu’en soit les circonstances en moyenne prés de 8 dollars par baril vendu qui vont gonfler le fond de la régulation des recettes. La démarche de l’exécutif ne doit pas se focaliser vers les solutions de facilités mais tenter de prendre tout ce qu’il est possible d’entreprendre avec un poids pour chacun. Chacune des solutions ne suffit pas à elle seule. Il ne faut pas avoir peur de l’endettement extérieur lorsque les capitaux ramenés sont utilisés dans les équipements productifs qui génèrent des emplois et de la croissance en général. Il serait au contraire contre productif de les utiliser pour colmater le déficit budgétaire. Il faudrait pour cela responsabiliser les entreprises qui s’endettent en contrôlant les projets ainsi financés par leur tutelle afin de limiter les dérives éventuelles. Poursuivre l’effort de recyclage de l’argent né du circuit informel et celui di blanchiment. Prendre des mesures coercitives vis -a vis de la fuite fiscale. Lancer cet emprunt obligataire à 5% pourquoi pas ? Tous ces artifices mixés vont dans le sens d’une augmentation des recettes et apaise le déficit.

De l’autre côté, il y a les dépenses qu’on oubli mais sur lesquelles il faudrait aussi agir. Il est clair que les dépenses de fonctionnement à elles seules dépassent les recettes prévues dans le budget 2016. Le train de vie de l’Etat doit impérativement être revu en baisse. L’exemple est donné par le Venezuela. Revoir aussi dans le budget d’investissement les ambitions démesurées pour se consacrer aux projets publics prioritaires. En définitive, une augmentation par ci, une diminution par là tendront peut être sans l’atteindre l’équilibre budgétaire en attendant le redressement des prix du pétrole qui risquent de prendre du temps. Cela évitera les débats stériles qui angoissent les citoyens.

Rabah Reghis, Consultant et Economiste Pétrolier

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Commentaires (5) | Réagir ?

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chawki fali

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khelaf hellal

" L’endettement extérieur de l'Algérie est inévitable" c'est certain ! Il y a même des coups de pied qui se perdent et qui ne vont pas à leur place. Une solution inévitable et salvatrice par les temps qui courent!.

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