A Ath-Ourtilane, des individualités face au désert politico-culturel

Dans la vallée d'Ath Ouartilane.
Dans la vallée d'Ath Ouartilane.

Au moment où l’espace public est pris par une léthargie due essentiellement à la démission des animateurs culturels et à des contraintes de divers ordres, certaines associations bravent le conformisme et se donnent à fond pour réanimer la scène culturelle accoutumée, au cœur même de la censure et du conservatisme, au débat. C’est en ces termes que nous pouvons aborder le travail fait par certaines associations.

L’association Tikli, dont la préoccupation principale est d’insuffler une âme à la société, en organisant des activités liées à des problématiques relatives à tout ce qui peut aider à la dynamisation culturelle de la société, s’est montrée attachée plutôt à des questions destinées à des auditoires prédisposés à écouter certains sujets, qu’à des sujets qui ont une grande visibilité dans les débats culturels. C’est ainsi qu’une conférence sur l’enseignement de tamazight a été organisée, ayant vu des spécialistes et des militants intervenir. Mais l’association n’a pas manqué, par ailleurs, de fêter le 20 avril, en invitant deux figures emblématiques de la JSK, Djamel Menad et Miloud Iboud en l’occurrence. Le public aurait souhaité des activités qui mettraient l’accent sur l’historique de la lutte identitaire (du reste politique) et initier les nouveaux militants au combat. Cela reste une utopie tant les animateurs politiques restent attachés aux schémas établis par l’idéologie officielle, préférant l’invective et les chicanes au débat et à la connaissance. Il est évident que le travail associatif demande de grandes dispositions auxquelles tous les animateurs ne peuvent pas répondre. Fondée en 2012, l’association Tikli, comme son nom l’indique, vise à continuer la marche ouverte par ceux qui ont pris le destin collectif en mains. L’on comprend, de par ce qui est fait, que les animateurs veulent donner une nouvelle direction à l’action associative. Ils disent être prêts à faire une synergie d’efforts pour réussir le pari de chasser la torpeur qui a sclérosé les esprits.

L’association pour le divertissement et le tourisme est, elle aussi, sur plusieurs fronts. Par-dessus tout ce qui est commun à toutes les associations, elle compte être un pont entre les diverses cultures qui coexistent en Algérie. C’est ainsi que des jeunes du Sud sont invités à séjourner à Beni-Ourtilane. L’association réussit le défi de triompher des entraves dressées par divers acteurs, liées tantôt au financement, tantôt aux formalités administratives. Par ailleurs, des festivals sont organisés pour ranimer la scène culturelle, défiant ainsi les forces de la régression qui veulent tout contrôler, en instrumentalisant tantôt la religion, tantôt des valeurs triées sur le volet. Bien que le public se montre peu réceptif à ce que font les animateurs, vu les courants d’opinions qui circulent, le travail réalisé est à saluer et le chemin à parcourir est encore long, surtout en ces moments de disettes culturelles.

Un groupe d’animateurs activant sous la coupe de l’APC est très actif. Il enchaîne les activités : des galas, des représentations théâtrales, des cérémonies et des commémorations. A titre d’exemple, ce groupe n’a pas manqué de commémorer l’anniversaire de l’assassinat du Rebelle. Une représentation théâtrale a été donnée par un groupe de comédiens, dont le courage et la persévérance sont indéniables. Malgré toutes sortes de difficultés, les acteurs ont donné l’image de professionnels peu gênés par un public qui n’est pas coutumier à l’activité théâtrale. Si Mohia était parmi nous en ces moments, il rirait de la réaction du public, lequel, faute notamment de sonorisation, a trouvé des difficultés pour suivre l’intégralité de la représentation. Le jeune artiste Saïd Matoub a animé un gala qui a réussi à capter l’attention d’un public assoiffé de ressourcement, «surtout qu’il s’agissait de celui qui nous accompagnait dans nos rêves, Lounès (le Big Brother)» nous dit un spectateur. A signaler également, le gala donné par le célèbre Zayen. Chanteur, dont l’empreinte humaniste n’est plus à démontrer, Zayen a fait vibrer la salle qui arrivait difficilement à contenir la masse de spectateurs qui sont venus voir celui qui a sillonné des capitales européennes, en vue d’exprimer l’attachement des pays du Sud aux valeurs de tolérance et du vivre-ensemble. Les notes de Zayen étaient un remède à l’isolement ressenti par la population locale. Des chanteurs locaux n’ont pas manqué à réjouir le public.

A noter, en dernier lieu, que l’association pour l’artisanat a réussi le pari d’inviter le journaliste, intellectuel Fodil Boumala. Ce dernier a réussi à capter un auditoire très nombreux. En usant d’une démarche interdisciplinaire, le conférencier a exposé son point de vue sur la situation politique de l’Algérie. Beaucoup de champs universitaires ont été explorés par le conférencier : de l’Histoire, de l’anthropologie, de la science politique, et bien évidemment, de la philosophie.

Nous devons noter que la salle où sont abritées les activités n’a pas d’équipement de sonorisation. Cela nuit à l’activité organisée autant qu’il décourage les animateurs.

Côté politique : presque zéro. Les partis sont en hibernation. Ils attendent les élections pour attirer les foyers qui leur sont acquis. Ils glaneraient des voix sans âme politique, mercantilisées et acquises à la dépolitisation. Si le FFS, pour lequel Ath-Ourtilane est le fief, cela fait près de deux ans qu’aucune activité publique n’a été organisée ; pour le RCD, c’est encore pire, c’est la désertification incarnée. Attendu pour animer une conférence, l’ancien leader du RCD a finalement pris tout le monde de court, il y aurait des différends entre les animateurs de la section. Le MDS n’a aucune visibilité, alors que le PT et le PST s’incarnent dans des positions sans ancrage idéologique. Le MAK, après une apparition timide en 2011, se montre trop peu actif. Les partis islamistes sont incarnés par un courant qui brasse divers domaines, notamment l’éducation, le scoutisme et le caritatif. Ce courant n’ose pas s’afficher publiquement. Quant aux partis affiliés au système, ils sont aux aguets : les élections et rien que les élections. Cela ouvrirait toutes sortes de pistes. Nous assistons, par ailleurs, à l’arrivée de nouveaux partis issus des réformes de 2011. Si les uns campent sur leurs positions, les autres croient pouvoir activer sous d’autres sigles.

Le débat politique ne semble pas être une préoccupation des acteurs politiques locaux, c’est le mal absolu qui a réduit les citoyens à de simples exécutants des logiques régressives. Aucun débat n’est amorcé entre les présidents de sections, eux, décervelés qu’ils sont, préfèrent à la soumission toute initiative qui permettrait aux citoyens de respirer politique.

Adieu les parfums politiques. Bonjour l’ère des haines incompréhensibles.

Madi Abane

Plus d'articles de : Algérie

Commentaires (1) | Réagir ?

avatar
tiddet

Vous parlez de l'association Tikli, à savoir tikli a zdat ou ar deffir, parce qu'inviter le 20 avril (la date unificatrice du peuple kabyle) Djamel Menad et Miloud Iboud pour monter une compagne diffamatrice contre Hanachi à partir de Beni Ourtilane, c'est très grave pour le futur de nos enfants, du moment nos ancêtres ne l'ont pas fait, un travail de division de cette taille relève de la grande lâcheté, non encore enregistrer en Kabylie.

Pour l'association pour le divertissement et le tourisme de Beni Ourtilane, s'il n'y avait pas le financement d'une association française, elle n'existera jamais, pour s'offrir un séjour en France aux frais de la princesse (madame la France) aux percheurs de telles occasions : Oui, Oui Monsieur… Ils font tous pour s'imposer sur le terrain, uniquement pour satisfaire les commendataires...

Les mêmes personnes qui gèrent ces associations, qu’on trouve lors des élections des partis.