Que c'est long notre drame ! Le drame de l’Algérie !

Abdelaziz Bouteflika et Abdelmalek Sellal sont les premiers responsables du blocage pluriel du pays.
Abdelaziz Bouteflika et Abdelmalek Sellal sont les premiers responsables du blocage pluriel du pays.

Mais que c'est long ! Trop long le feuilleton de cette crise algérienne. Un tunnel sans fin.

Disons-le une fois pour toutes pour être corrects avec les mots : presque une improvisation théâtrale sans cesse recommencée. Plus de secrets ni de regrets à l'heure qu'il est car la réalité est là. Implacable. Lassante. Triste. Complexe. Rassurante caricature pour toute une nomenclature gérontocratique aigrie, assise sur ses montagnes de mensonges, sûre de sa normalité. De ses privilèges et de ses prébendes. Qui peut pardi gober les propos les plus invraisemblables d'un certain Amara Benyounès affirmant crânement, il y a quelques mois, à qui voudrait bien l'entendre et ceci pour justifier l'injustifiable que Bouteflika gouvernait par son cerveau et non pas par ses pieds ? C'est-à-dire à la manière d'un Roosevelt ressuscité. Et que le cerveau de ce dernier est plus fort que tous les cerveaux des algériens réunis. Fadaise qui ne l'a cependant pas épargné d'être éjecté comme un malpropre du gouvernement d’Abdelmalek Sellal. Une méthode pas très fair-play à l'encontre de l'un des nouveaux affidés du système de la part d'un gouvernement qui donne l'impression de tout contrôler, tout planifier et tout ordonner alors qu'il ne sait plus faire le tri entre le futile et l'utile, l'utile et l'essentiel, l'essentiel et l'urgent!

Maintenant une autre angoisse à nulle autre pareille se profile à l'horizon, le baril du pétrole est à moins de 40 dollars ! Une chute vertigineuse des cours au niveau mondial qui augure peut-être, qu'à Dieu ne plaise, le pire dans les deux ans à venir. Que faire ? Comme y procéder ? Où allons-nous nous donner la tête? Cruel sera notre destin à nous les algériens. D'autant qu'au moment où la fourmi est au charbon, la cigale chante dans les prairies... On imagine spontanément la suite : L'Algérie fort probablement endettée à la mi-2017, une spirale inflationniste sans précédent, dégringolade du pouvoir d'achat, prêts auprès du F.M.I, plans d'ajustement structurel, austérité à fond la caisse, pics de tensions sociales qui s'ajouteraient aux cortèges des troubles actuels, risque d'embrasement généralisé et que sais-je encore.

En tout cas, les Algériens n'ont pas oublié de sitôt la période cruciale des vaches maigres du début 1990 et le cauchemar des bateaux de blé envoyés par les émirs du Golfe moyennant le silence complice des autorités de notre pays sur l'activisme islamiste. En réalité, depuis l'histoire de ce quatrième mandat, les calamités n'ont guère cessé de tomber comme des massues sur nos têtes. On ressent même un vide intérieur dans le noyau dur du système, une lente érosion qui progresse inexorablement sur tout le reste de la société. C'est comme s'il y a une rupture quelque part dans sa façon de calculer, de concevoir le monde et de se projeter dans l'avenir. C'est un système moribond qui vit au jour le jour, tentant se se hisser sur un manège immobile. Sa technique, désormais désuète, c'est de ne rien montrer, tout laisser deviner, par ellipses et par rumeurs interposées. Mais cette fois-ci, il semble que les clans au pouvoir ne sont pas tous branchés à la même onde de radio et les tares se révèlent au grand jour sur les pages facebook et les grandes manchettes de journaux. Le mur du secret érigé en clôture s'effondre. L'internet et les réseaux sociaux ont mis à nu les pires dysfonctionnements des pouvoirs publics. Vivement vilipendée au départ par la vox populi pour ses soi-disant origines juives avant d'être nommée ministre de l'éducation, Mme Noria Benghebrit est poussée, malgré elle, par le biais de cette "rumeur" à rendre le tablier. Tout le monde a cru à la nouvelle de sa démission jusqu'à ce que la concernée elle-même l'ait formellement démentie. La communication officielle a, comme d'habitude et une fois encore, du plomb dans l'aile. Mais ce qui est à relever dans cette campagne de dénigrement est le pourquoi de cet acharnement pathétique sur un ministre d'un secteur donné quand les autres, moins compétents et plus corrompus, sont épargnés?

Après la proposition-alternative d'utilisation des C.D par tous les élèves lésés l'année passée par le rythme des grèves à répétition ayant eu lieu dans le secteur éducatif, une idée du reste fort critiquée par les uns et les autres, la ministre s'est penchée dernièrement sur le volet de l'enseignement de la "Darija" à l'école, un vieux projet déterré des annales de l'avant-garde communiste à la tête de laquelle se trouvait le poète Kateb Yacine (1929-1989). Ce qui est perçu aussi par les conservateurs comme une injonction directe du courant francophone ayant pour unique dessein la destruction du legs de la langue arabe classique en Algérie. Malgré un C.V pour le moins que l'on puisse dire costaud, une expérience non négligeable dans l'éducation et une vision moderniste qui ne l'est pas moins, Benghebrit n'a pas échappé à la vindicte. Et pourtant quelques années auparavant, un certain A. Benbouzid aurait passé 14 ans sur le même maroquin, sans projet constructif ni perspectives novatrices, encore moins vision utilitaire sans que personne ne bouge le petit doigt. Etonnant ! Le système avance comme un poulpe, c'est-à-dire, s'il décide un jour par un choix stratégique quelconque de s'orienter dans une direction précise et que l'un de ses tentacules, peu favorable à cette option, prend le dessus sur lui et les autres (tentacules). Il bascule forcément dans l'autre côté, suivant le mouvement du courant. Le consensus circonstanciel et frelaté en tous points de vue à l'intérieur des appareils du système est fait pour que celui-ci se maintienne et non pas pour qu'il construise quelque chose de solide pour les générations montantes, hélas ! Enfin, "tout est dans le tout. Et réciproquement" écrit Alphonse Allais (1854-1905). Un des aphorismes typiques qui résume la gravité dans notre malaise et l'exaspération de notre jeunesse d'aujourd'hui. Une jeunesse en déprime comme tout le pays d'ailleurs. Laquelle ne peut vivre qu'en survivant, s'obstinant contre toute évidence à appeler, ailleurs et seulement ailleurs, un bonheur possible "philosophique" dites-vous "c'est ça l'Algérie, tout est normal" vous rétorquera un citoyen lambda du quartier populaire de Bab El-Oued.

Quand on avale une actualité qui sent le pourri et le dégoût, la digère et l'assaisonne sur la table d'un dîner familial, on ne peut s'empêcher d'en convenir que c'est un chef-d’œuvre de l'absurde. Et parler de la santé du président, de l'inextricable dossier de la corruption, ça vous plongera nécessairement dans la nausée. A mesure que les inégalités s'accroissent, la société déjà en état de désarroi tombe en désamour, je préfère ici le mot "anamour" du chanteur Serge Gainsbourg. Une société vide d'humour, complètement désorientée par la banalisation de la violence. Atteinte de surcroît dans les coins qui semblent jusque-là à l'abri par une leucémie incurable dont elle a de la peine à se guérir. L'Algérie s'est transformée en une aire d'essai gigantesque pour des clans qui s'étripent à couteaux tirés. La tentation est grande de se servir de cette vache à lait, tout en s'exonérant des amères réalités du peuple d'en-bas par la biais de la démagogie. La certitude du doute pèse et envahit les esprits. Le degré du délabrement de nos universités est un de mes principales angoisses, moi personnellement. Ce qui donne une résonnance particulièrement alarmiste à l'avenir de la nation.

Kamal Guerroua

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Commentaires (2) | Réagir ?

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elvez Elbaz

Pourquoi et au nom de quel principe les responsables militaires permettent ils de maintenir cette dramatique situation sur ce pays?

N ont ils pas le devoir de le protéger ?!

En quoi une famille régnante et son clan sont ils plus importants à protéger que ce pays, le nôtre, le leur aussi, l'algérie algerienne?!

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khelaf hellal

A mon avis, il faut aller vers la pédagogie à la Makarenko, c'est -à-dire re-former et rééduquer les jeunes déja formés à l'école fondamentale telle qu'elle a été instituée par le système de parti unique en plus des contingents d'élèves qui en sont exclus ou abandonnés sur le chemin. Il faut créer des écoles parallèles de rééducation et de reinsertion sociale pour corriger toutes les tares et les déperditions scolaires que le système a lâché dans la nature. En plus de la ligne parallèle des écoles de pédagogie à la Makarenko il faut adjoindre une troisième ligne de recyclage des adultes formateurs qui ne sont pas tout à fait la hauteur de leur mission dans ce beau métier qu'est l'éducation de nos enfants. Il ya aussi les politiciens véreux qui sont passés entre les mailles du filet, les dirigeants politiques Kleptocrates beaucoup plus attirés par le gout du miel de la corruption que par autre chose qui gagneraient à moraliser leur conduite . Il faudrait en tout trois budgets pour tenter de redresser la situation dans l'enseignement en plus de tout le temps qu'il faut pour les faire aboutir.