Conférence sur la déradicalisation à Alger : que proposeront Lamamra et Messahel ?

Une conférence sur la déradicalisation se tiendra en Algérie les 22 et 23 juillet.
Une conférence sur la déradicalisation se tiendra en Algérie les 22 et 23 juillet.

A la veille de la conférence sur la déradicalisation qui se tiendra en Algérie les 22 et 23 juillet, deux questions méritent d’être posées : la diplomatie algérienne pourra-t-elle prôner une approche globale, opérationnelle et multidimensionnelle sur la question de la déradicalisation ? Pourra-t-elle soutenir les efforts visant à prévenir ce fléau à travers notamment le Centre africain d’études et de recherche sur le terrorisme (CAERT) demeuré une coquille vide ?

La radicalisation correspond par définition à un processus par lequel une personne devient radicale ou est radicalisée en ayant recours à des formes de violences ou au terrorisme au sein d’une société. La résolution 2170 (2014) adoptée le 15 août 2014 par le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) mentionne la radicalisation, en condamnant "le recrutement, par l’État islamique d’Irak et du Levant, le Front el-Nosra et tous les autres individus, groupes, entreprises et entités associés à Al-Qaïda, de combattants terroristes étrangers dont la présence exacerbe le conflit et concourt à la radicalisation violente". Le dernier rapport de la mission d’établissement des faits au Mali rendu public en juin 2013 de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples de l’Union Africaine (UA) mentionne la faiblesse de l’Etat comme facteur important de la crise au Mali. Le rapport indique ’’la mauvaise gouvernance des affaires publiques principalement celles des régions du Nord. Aussi faut-il indexer les insuffisances liées à la faible couverture administrative et sécuritaire de la partie Nord du pays, le diktat des accords de Tamanrasset qui limitaient les marges de manœuvre de l’armée dans la région de Kidal, la porosité des frontières et la défaillance dans la délivrance des visas à des ressortissants étrangers qui ont appuyé l’introduction d’un islam radical’’ ?

En décembre 2014 ,le Commissariat à la paix et à la sécurité de l’UA dans la cadre du Forum pour la paix et la sécurité tenu au Sénégal a reconnu que tout effort dans le sens du Nouveau partenariat pour le Développement de l'Afrique ( NEPAD) "serait vain sans une bonne politique de prévention, de gestion et de règlement des conflits, dans un contexte de respect des droits de l’homme, des principes démocratiques et de l’Etat de droit." La sécurité fait partie intégrante des politiques de développement durable et de bonne gouvernance. Le CAERT pourra-t-il protéger l’Afrique du terrorisme ? Dans une déclaration confuse prononcée à Algérie Presse Service (APS) en marge de la 33ème réunion de l'Initiative du (NEPAD) tenu en juin 2015, le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra a mentionné que "forte de son expérience en termes de lutte antiterroriste, l'Algérie est entièrement disponible à aider tous les pays qui la sollicitent, qu'il s'agisse de formation, d'équipement ou d'échange d'informations sécuritaires". Il s’agit là d’une déclaration qui ne correspond pas à la réalité car, dans le rapport établi en septembre 2014 par la commission de l’UA sur le terrorisme et l’extrémisme violent il est fait mention du CAERT qui ’’continue à fonctionner avec des ressources humaines et financières limitées, en dépit du mandat élargi qui lui est confié et des attentes placées en lui. La commission "exhorte les États membres à fournir l'appui nécessaire au CAERT, y compris en y détachant, à leurs propres frais, les experts requis". Dans ce même rapport, il est fait mention de la déradicalisation qui requiert le développement d’une politique basée sur l’interaction et la coordination avec les médias, les victimes d’actes terroristes et les organisations de la société civile.

Selon l’UA, le recrutement et la radicalisation de jeunes Nord-Africains constituent "l’un des contingents les plus importants dans les rangs des groupes terroristes combattant en Syrie et en Irak". Le retour possible de ces jeunes dans leurs pays d’origine provoquera un défi sécuritaire supplémentaire pour la région. Quels efforts accomplis mentionne cette diplomatie algérienne à deux têtes alors que les derniers développements intervenus au Sahel démontrent la capacité d’intervention limitée du gouvernement algérien pour influer sur le cours des événements, remettant en question toute la doctrine de défense de l’Algérie depuis l’inauguration du CAERT en 2004 en Algérie ? C’est ce que mentionne la réunion ministérielle sur le renforcement de la coopération sécuritaire et l’opérationnalisation de l’architecture africaine de paix et de sécurité dans la région sahélo-saharienne organisée par l’UA le 11 septembre 2013 à N’Djamena (Tchad). Des mesures se rapportant au CAERT ont été prises lors de cette réunion "pour combler les lacunes existantes en matière de compétences et d’expertise, ainsi que l’organisation d’activités de renforcement des capacités et d’ateliers de formation. Un premier projet de matrice a été élaboré, et est en cours de finalisation". Cette situation préoccupante dans laquelle se trouve l’Algérie est révélatrice de l’échec de sa diplomatie : de la diplomatie de l’espoir à la diplomatie de l’échec.

Le processus de radicalisation et son corollaire l’extrémisme violent menacent l’équilibre de la région du Sahel. Le G5 Sahel est un cadre institutionnel créé en décembre 2014 pour coordonner les politiques de sécurité et de développement et pour combattre le crime organisé, le terrorisme et la radicalisation, ce cadre comprend cinq pays : le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Le gouvernement algérien devrait s’inspirer de la déclaration du 14 mai 2015 du G5 Sahel pour mettre en place une stratégie, cette déclaration serait une source d’inspiration et de motivation en relevant la liaison entre la radicalisation et le terrorisme, et la nécessité de prendre des mesures transfrontalières dont les principales réponses seraient les suivantes : Favoriser la déradicalisation en contrôlant les flux financiers susceptibles d’alimenter la radicalisation; s’opposer aux discours extrémistes orientés aux groupes à risques en mettant à profit notamment les médias, les réseaux sociaux et les prêches afin d’éviter l’endoctrinement et l’embrigadement des jeunes par ces mouvements radicalisés. Intensifier les capacités des leaders religieux dans la lutte contre la radicalisation. Consolider le rôle des organes de régulation des médias dans la lutte contre la radicalisation en faveur de la déradicalisation, renforcer et harmoniser les cadres juridiques relatifs à la lutte contre la radicalisation dans la région du Sahel. Les groupes terroristes instrumentalisent les revendications sociales, la religion, la marginalisation pour créer un discours idéologique apte à produire un environnement favorable à la radicalisation.

La commission de l’UA a observé également des faiblesses dans la mise en application de la convention sur la prévention et la lutte contre le terrorisme de l’OUA adoptée en 1999 en Algérie. Plus de la moitié des Etats membres de l’UA l’ont ratifiée. Or cet instrument juridique a montré ses limites. Les modalités de protection des droits de l’homme ont été jugées insuffisantes par l’UA. C’est dans ce contexte que l’UA a adopté en 2004 le protocole additionnel à la convention sur la prévention et la lutte contre le terrorisme. L’UA a appelé les Etats membres à fournir des contributions volontaires pour faciliter la mise en œuvre du système entre les institutions de l’UA et le CAERT notamment. Quelle est l’importance du rôle du Global CounterTerrorism Forum (GCTF) ? Le (GCTF) est une instance internationale qui a été lancée officiellement à New York le 22 Septembre 2011, constituant une colonne essentielle dans l’architecture internationale de lutte contre le terrorisme. Il regroupe 30 membres fondateurs dont l’Algérie et le Maroc qui sont les deux seuls pays membres à l’échelle de l’Union du Maghreb arabe (UMA).Rappelons que le Maroc s’est retiré de l’ancienne Organisation de l’Unité Africaine (OUA) en 1984. Le GCTF réunit régulièrement des dirigeants et des analystes dans les domaines clés de lutte contre le terrorisme qui sont issus de différentes régions, des Nations unies et d'autres organisations régionales et multilatérales. Les actions du Forum s’énoncent comme suit : six groupes de travail portant sur le Sahel, la Corne d’Afrique, la justice pénale et la primauté du Droit, la détention et la réinsertion, la lutte contre l’extrémisme violent et les combattants terroristes étrangers, que co-président également le Maroc et les Pays-Bas depuis 2014.L’Algérie préside avec le Canada le groupe de travail du GCTF sur le renforcement des capacités dans la région du Sahel .

Les États de la région ont exposé une vue d’ensemble du contexte politique et juridique et d’un point de vue national. Parmi les sujets récurrents apparaissaient principalement la porosité des frontières de la région, la capacité relativement faible des services de protection des frontières, et la manière dont les terroristes et autres criminels exploitent les zones non gouvernées et sous gouvernées des régions frontalières. Le GCTF a également remarqué l’absence d’accords de « poursuite immédiate » transfrontalière de suspects de terrorisme et d'autres actes criminels.et de la possibilité de débats ultérieurs permettant de déboucher sur l’élaboration de tels accords. Une nouvelle approche du terrorisme au Sahel : en avril 2015, le Conseil de l’Union européenne (UE) a adopté le plan d'action régional en faveur du Sahel pour la période 2015-2020 qui délimite un cadre global pour la mise en application de la stratégie de l'UE pour la sécurité et le développement dans la région du Sahel. Ce plan met en exergue le rapport existant entre développement et sécurité pour l'action de l'UE au Sahel. Le plan d'action crée une base permettant de poursuivre les buts visés par la stratégie et de centrer d’une manière solide l'action de l'UE sur quatre domaines pour la stabilisation de la région, à savoir la prévention de la radicalisation et la lutte contre ce phénomène, la mise en place de conditions appropriées pour les jeunes, les migrations, la mobilité et la gestion des frontières, la lutte contre les trafics et la criminalité transnationale organisée. Une des principales actions en cours consiste à soutenir les réformes allant dans le sens du renforcement de l'Etat du droit au Maghreb. Cet engagement se traduit par un appui financier pour la période 2014-2017 destiné aux 5 pays de l’UMA.

Le dernier rapport de l'Union européenne sur la situation et les tendances du terrorisme 2014 publié par Europol indique que "l'utilisation de l'internet et des réseaux sociaux à des fins de planification, de financement, de recrutement, de communication, de formation, d’entraînement et de propagande pourrait avoir contribué à l'accélération de la radicalisation (ou de l'auto-radicalisation) des citoyens de l'UE". Que faut-il retenir de la participation de Messahel à la réunion du Conseil de l'Internationale socialiste (IS) tenue à New York (Etats-Unis d’Amérique) le 6 et 7 juillet 2015 ? Le ministre Abdelkader Messahel, représentant du parti du Front de Libération Nationale (FLN),a participé à la session semestrielle du Conseil de l'IS. Rappelons que le FLN est membre observateur de l’IS. Lors de cette réunion, une déclaration sur la sécurité et la lutte contre le terrorisme a été élaborée soulignant que tout l’espace de l’UMA rencontre des développements alarmants, par la multiplication des trafics illicites, le terrorisme et le banditisme, sans parler du retrait des efforts d’intégration régionale et de coopération interrégionale qui à un moment donné, en particulier dans les années 1988 et 1989 date de la création de l’Union du Maghreb arabe (UMA) qui ont fourni une espérance de changement et de progrès aux peuples de la région. Devant cette perspective, plusieurs réponses peuvent être données : lancer la procédure de la révision de la constitution algérienne avec le remplacement de (l’article 166 : "Le Conseil Constitutionnel est saisi par le Président de la République, le Président de l'Assemblée Populaire Nationale ou le Président du Conseil de la nation’’) par l’article suivant : "Les citoyens peuvent saisir le Conseil constitutionnel de la constitutionnalité d'une loi avant sa promulgation. Le citoyen a le droit de contester la constitutionnalité d'une loi promulguée à l'occasion d'un procès." Car la radicalisation puise notamment ses racines dans la discrimination et l’injustice, et prospère dans la culture de violence .Mettre l’accent sur la nécessité de favoriser la justice et le développement est la seule réponse durable face à la radicalisation. Il faut noter l’imprécision des positions de cette diplomatie à deux têtes dans la région ? M. Messahel occupe-t-il le poste de ministre ou plutôt le régime politique lui fait il occuper ce poste ?

Mohamed Salah Benteboula

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Commentaires (9) | Réagir ?

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Bachir Ariouat

Depuis 1962, nous les connaissons, ils parlent dans le vide. ils sont spécialistes du double langage, c'est pourquoi, personne ne leur accordent le moindre crédit, c'est cela la politique, s'ils avaient pas les islamistes, ils ne serait pas arrivées au pouvoir, sauf à être naïf, pour le croire le contraire.

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Bachir Ariouat

Ils font partis des radicaux les plus criminels de la terre, alors comment espérer quelques choses de ces genres de personnes, qui font parti de la dictature, qui pardonne les crimes et les vols, les viols, la corruption, vous me faite rigolez avec votre article, revoyez votre copie ami.

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