"Que dire ?" : le drame d’un poète narrateur

La couverture de l'ouvrage.
La couverture de l'ouvrage.

Nacer Achour, l’auteur de "Dernier été", paru chez L'harmattan et de "Et la mer elle-même n’aura plus aucun sens" publié en avril dernier vient de signer un nouvel ouvrage tel qu’annoncé au terme de l’interview accordée au matindz le 19 avril 2015. Sous forme poétique, cette fois-ci, l’écrivain nous raconte une autre histoire émouvante, intitulée "Que dire ?" dans laquelle, du début à la fin, il n’a pas cessé de dire.

L'auteur est un esthète, un auteur d'habitude taiseux qui préfère faire parler son écriture. Nacer Achour, la cinquantaine et beaucoup de convictions chevillées à l'esprit, est marqué au fer par ce que vit la jeunesse algérienne. Il le dit par touches successives dans ses publications. Seul, à sa manière. Après ses deux premiers romans, il publie "Que dire ?". Le titre interrogateur, à lui tout seul, résume l'angoisse de l'auteur.

L’histoire pourrait paraître commune telle que présentée sous forme d’un résumé en quatrième couverture : "Soupçonné de comploter contre l’Etat-pouvoir, le poète-narrateur se retrouve, à son corps défendant, après avoir quitté l’île des retrouvailles (Celle des amours interdites ?) enfermé dans un asile pour aliénés mentaux, surveillé de près et sommé en sus de s’exprimer quotidiennement sur la question et par écrit, sous l’œil vigilant de deux surveillantes pas toujours agréables. Incorrigible, pour son bonheur et pour son malheur à la fois, il ne s’empare de sa plume que pour rédiger des vers, quantité de vers."

Mais au-delà de l’histoire, c’est le drame que vit le poète-narrateur qui se retrouve seul face à lui-même, sans secours aucun hormis du papier, un stylo pour lui permettre de tenir le coup, de ne pas sombrer dans la folie, même si, de but en blanc, il a beau jeu de déclamer :

"Que dire

Qui se puisse

Se dire ?"

Comme pour tenter de se frayer un chemin, de trouver la voie qui le conduira à la liberté, à la vie, à l’instar du prisonnier qui se met à creuser pour tenter une évasion. Parce que l’histoire, la tentative d’évasion ne faisant que commencer, le narrateur comme le prisonnier et le lecteur ne pourront plus s’arrêter une fois que les dés sont jetés, une fois que le pas est fait… Il ne doit plus y avoir de volte face, de retour sur ses pas, à moins de se rendre, de baisser les bras et de consentir à sombrer dans la déchéance, le désespoir, otage en sus d’une voix :

(…) Et voix de sirène

Une voix

Qui vous tient

En haleine.

Une voix de l’être que l’on perd, que l’on sait perdu qui raille le destin, qui dit :

"Regarde alors, vois !

Puisque tu dis voir !"

Un destin que l’on traîne comme un boulet et face auquel il est vain de tenter quoi que ce soit.

Un livre qui se lit d’une traite mais qu’on peut relire aisément tant on ne se sépare d’un poème que pour nous retrouver dans un autre et ainsi de suite jusqu’à la fin où, après avoir rendu hommage aux hommes et aux femmes qui ont fait de leur vie un combat pour la liberté, s’en prend au reste de la société qui démissionne, qui assiste sans état d’âme au sacrifice des uns et des autres ou pire : participe de leur ignorance à les enfoncer davantage, à les anéantir parfois, et dont le pays semble devenir le moindre de leur souci pour ne pas dire le dernier, leur reprochant ainsi de subir leur destin sans réagir ou de se complaire dans un minimum de confort matériel sans faire l’effort de comprendre, sans prendre le temps de s’engager.

Nourdine Amarni

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Commentaires (2) | Réagir ?

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Service comptabilité

merci bien pour les informations

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algerie

merci bien pour les informations