2014 : l'année des fables et des octogénaires fanfarons

Unique au monde : Bouteflika au pouvoir en 1962, et en 2015 toujours au pouvoir.
Unique au monde : Bouteflika au pouvoir en 1962, et en 2015 toujours au pouvoir.

Ce fut l’année, mon enfant, où le monde s’éloigna de nous, à moins que ce ne fut l’inverse, ce qui ne serait pas étonnant, vois-tu, nous avions des gueules à nous éloigner du monde, nous que plus rien n’épatait, pas même cette découverte, en mai 2014, du plus grand dinosaure sur terre, par des paléontologues argentins, une créature qui mesurait 20 mètres de haut, c’est-à-dire quatorze fois plus grand qu’un éléphant.

Par Mohamed Benchicou

Rien d’extraordinaire. Leurs animaux vivaient sur terre il y a 95 à 100 millions d’années; les nôtres, nos dinosaures vivent avec nous depuis toujours. Ils sont même au pouvoir, aussi imposants que le titanosaure dont on a exhumé sept spécimens au mois de mai et qui mesuraient 40 mètres de long. Nos dinosaures sont de dimensions plus modestes et gouvernent sur fauteuil roulant.

Du reste, au cours de cette année 2014, nous avons enseigné au monde que l’on ne gouverne pas plus mal en pyjama qu’en costume Smalto et que, contrairement aux idées répandues, l’habit, en l’occurrence le pyjama, pouvait faire le moine et même le patrimoine si on se rappelle que nos titanosaures en pyjama protègent de gros délinquants qui ont massivement prélevé sur nos recettes pétrolières pour s’offrir une nouvelle jeunesse. C’est qu’en 2014, l’année où tout rappelait la mort, du virus Ebola aux guerres meurtrières en Syrie, en Ukraine, nous avons brillamment prouvé au monde que l’on pouvait, sinon vaincre la mort, du moins lui résister avec succès. Nos titanosaures ne meurent pas, ou alors très tard, bien plus tard que la moyenne de l’humanité.

Chez nous, on reprend à vivre à partir de 80 ans, à vivre et à voler, à l’exemple de certains de nos dirigeants irremplaçables, dont il faudra bien, un jour, reconnaître l’apport sans précèdent à la science. Pendant que la communauté scientifique mondiale avoue ne pas comprendre pourquoi nos cellules cessent de se renouveler à partir d’un certain âge, et que le respectable The New Encyclopædia Britannica en est réduit à reconnaître que "même après des décennies de recherche, le vieillissement reste en grande partie un mystère", nous avons démontré avec panache, en 2014, que le vieillissement, qu’il soit ou non provoqué par un dysfonctionnement des programmes génétiques responsables du développement cellulaire, n’est pas invincible. Comment, sinon, Bouteflika, ministre en 1962, serait-il toujours au pouvoir en 2015 ? Certaines langues affirment qu’on a testé sur nos dirigeants la cryogénisation, la congélation du corps, à la façon du film Hibernatus de Louis de Funès, où un homme accidentellement congelé est ramené à la vie des dizaines d’années plus tard. Tout cela dans une communion patriotique sans égal !

C’est que chez nous, nous avons une bonne longueur d’avance dans la technique de manipulation des mémoires. Pendant que les scientifiques du monde se sont épuisés, en 2014, à expérimenter sur des souris, l’optogénétique, une technique qui consiste à effacer des souvenirs existants et en implémenter d’autres faux, à l’aide de rayons lumineux, nos dirigeants utilisaient des procédés bien plus efficaces : la télévision, la religion, le mensonge d’État et la corruption des esprits… Oui, c’est décidé : nous sommes la prochaine comète 67P Churyumov-Gerasimenko, alias Tchouri, on y vit très longtemps, et plutôt que de mobiliser la sonde Rosetta pour envoyer l’atterrisseur Philae à 510 millions de kilomètres de notre planète pour en étudier le noyau, expédiez-le chez nous. Tu verras, mon enfant, vivre sur cette terre, dans notre beau pays, relève de la science-fiction, chaque jour qu’on vit est une fable qui ne se raconte pas.

M. B.

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Commentaires (5) | Réagir ?

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Guel Dring

Il est souvent utile de rappeler certaines vérités comme le fait que l'être humain est appelé à mourir

De cela, nous pouvons conclure que personne ne peut prétendre vivre une seconde de plus, parce que la fatalité, nous l'admettons quand notre intelligence se trouve au pied du mur où il est signifié:

c'est le destin! Nous pouvons aussi rappeler ce que Dieu énonce dans le chapitre 39 du Coran :

67. " Il n'ont pas estimé Allah comme Il devrait l'être "...

Il y en a des milliers de vrais dinosaures qui ont péri par simple Decrét Divin et ce n'est pas Bouteflika ou un quelconque personnage qui pourrait repousser son "heure". C'est une évidence.

Et c'est aussi une "preuve" que les voies du Seigneur étant impénétrables, nous pouvons confirmer que la vie (en place du coeur) a ses raisons que la raison ne saisit pas. Ce qui pousse l'être humain à poser l'etrenelle question du comment et pourquoi.

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Rabah SARFA

Rabah Sarfa

Cela n´est pas un gouvernement. On voit un roi avec son harem de concubines. A la moindre peccadille ou quiconque n´accède pas aux desiderata du prince se fera répudier. Ahmed Ouyahia est répudié et éjecté du harem, Abdelmalek Sellal y fait son entrée. Ouyahia y revient, Belkhadem est répudié. Daho sort, Belaiz revient… La valse des concubines.

C´est ainsi qu´un roi gère son harem. Si une concubine rouspète ou ne se plie pas a ses caprices, le seigneur la répudie et l´éjecte du harem. Ainsi elle sera dépourvue de tous les avantages et toutes les grâces qui lui revenaient de droit et qui sont accordées a toutes les autres concubines. Tandis que le prince tourne son choix vers les autres concubines pour les gâter et les choyer, pendant une ou deux années la répudiée va subir l´opprobre des autres concubines. Elle va souffrir les langues fourchues et toutes les médisances de ses consœurs. La rage au cœur elle subit. Cette amertume, cette rancœur se transforment en haine. Ainsi quand le seigneur lui pardonne et l´autorise à rejoindre le harem une fois encore, elle y revient avec toute la hargne, toute la fougue, décidée cette fois ci à se battre pour revenir dans la faveur de son seigneur. Sa concubine de choix. Ainsi rien ne sera plus jamais refusé au Prince. Cette fois ci elle courbera l´échine un peu plus pour son seigneur. Elle acquiescera à tous ses désirs, tous ces caprices. Elle lui consentira toutes les jouissances, décidée a ne plus se faire éjectée. Jamais encore.

Ainsi fonctionne un harem. Mais pas un gouvernement.

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