Plaidoyer pour une Deuxième République en Algérie

Bouteflika et son clan sont les seuls responsables de la crise algérienne.
Bouteflika et son clan sont les seuls responsables de la crise algérienne.

En cette fin d'année, je demeure moi un jeune de cette génération perdue, persuadé que l'Algérie a raté le chemin de sa démocratisation. Cela fait mal au cœur et laisse profiler partout le fantôme de l’incertitude et de la défiance populaire.

I- Un diagnostic alarmant

Les signes de la régression ne trompent pas, ils vont de l'éducation à la culture, de la santé au tourisme, de l'économie à la politique. Notre récolte est mince car le ver est resté encore dans le fruit. On n'a pas éliminé, nous les Algériens, tout ce qui nous divise, en cherchant ce qui nous rapproche. Notre quotidien est ramassé dans nos incohérences et nos mutismes. L’Algérie est un papillon en cage, un papillon aux ailes cramés, triste et solitaire de surcroît. Au point où en sont arrivées les choses, il n'est plus permis de continuer sur cette voie, ce serait un suicide volontaire et prémédité et l’histoire nous jugera sévèrement de notre passivité. Car tout se passe comme si nous assistions à l'accomplissement d'un drame inéluctable, celui de l'hécatombe démocratique ! Le pays s'effondre, la misère grandit, la corruption se renforce, et nos portes son claquées par un vent de crise. Crise de régime, crise d'idées, crise de conscience, crise de valeurs, etc. Comment résister à la déferlante de la médiocrité ? Comment sortir de ce bourbier ? Comment trouver l'issue de secours ? Une telle situation ne peut qu'être génératrice du chaos et de troubles et il n'y a point de raison à ce que cela continue indéfiniment. L'inhibition de l’égoïsme nous empêchent de regarder dans la direction de l'horizon, la faiblesse des alternatives constructives grossit la vague du pessimisme, la sécheresse des volontés réduit à l'insignifiance notre rayon d'espérance, les vieux slogans démagogiques surfent sur un reliquat nationaliste déjà étriqué, de plus en plus déficitaire, notre imaginaire est plombé par le syndrome de la désunion. Mais notre élite est-elle à ce point snobinarde, nombriliste et complexée pour que nous restions égarés au milieu du gué, entre le gris et le noir, l’amertume et la douleur ? Pourquoi n'a-t-elle pas mis un point d'honneur à traiter avec respect, probité et rigueur la question de la transition politique ?

Ce qui se passe chez nous est bien moins anecdotique qu'il n'y paraît. Il dénote d'un état de malaise chronique et à géométrie variable. On évite à bon compte de réfléchir, on pastiche les démocraties modernes par des pâtisseries électorales, du reste, achalandées par des figurants choisis à la dernière minute, on amortit la dynamique du mouvement, on se réjouit dans un écosystème déglingué et, comme par naïveté, on tempère le sentiment du déshonneur que de tels scénarii reflètent à l'international. En plus, l'intelligence populaire est embrouillée à souhait et la véhémente chimie de nos rêves d'antan s'est dissoute dans le bol noir de la déception, terrible! Ne parlons pas de tous nos ratages depuis l'indépendance et tenons-nous-en seulement à cette année écoulée. Les ressorts de la force d'un pays sont clairs et évidents : la démocratie et l'alternance au pouvoir. Ou l'on tire profit de l’œuvre démocratisante, et de là même, de bien sortes d'avantages, ou bien, si l'on s'en prive faut-il que cela en vaille la peine ? La nation est décapitée, sa crème la fuit, la valeur intrinsèque de l'idée et de la pensée est mise en bouillie, l'autre partie de notre intelligentsia s'est prêtée soit par veulerie, par lâcheté ou par complaisance au jeu de sa mort. Une tragicomédie digne de "game of thrones".

Voltaire (1694-1778) disait pour s'élever, il faut d'abord descendre en soi. Autrement dit, chercher à se connaître, à s'explorer et à se creuser pour mieux se projeter dans les lendemains. Or chez nous, on s'ignore, on se néglige, on s'insulte, on condamne à mort les talents et les journalistes, on méprise le génie, on rejette le débat, la confrontation d'idées et de propositions, c'en est trop, trop ! Les épreuves qu'on a dû subir de par le passé nous obligent aujourd'hui à passer aux aveux, à éventer la supercherie des uns et les manquements des autres, à révoquer le sacerdoce du secret, érigé en mode de gouvernance et à exposer avec sincérité sur la table du dialogue le fond de nos problèmes. Les épreuves sont, encore faudrait-il le souligner en ce papier, initiatrices aux grands rendez-vous de l'histoire et constructrices des nations fortes.

II- La décentralisation et la régionalisation à l’ordre du jour

En effet, les causes précédentes pour principales qu'elles soient n'en sont pas moins secondaires par rapport à la problématique de fond du pays : le présidentialisme exacerbé et le jacobinisme destructeur des spécificités régionales. De nos jours, il va falloir penser à redynamiser une gouvernance d'assemblée à égales prérogatives avec l'exécutif. La situation dans notre cas s'est envenimée dès que les ordonnances et les décrets exécutifs ont commencé à pilonner la citadelle du parlement, le règlement s’est mis à étouffer la législation, la machine wilayale a procédé au noyautage des assemblées des wilayas, l'autorité du chef de daïra a pris des galons supplémentaires pour piétiner sur celle des assemblées communales et le pouvoir du maire, l'élu du peuple. Sous d’autres cieux, pareil état des lieux se dénomme sous les traits du ridicule et suscitera une polémique d’une rare virulence. Le nœud gordien est à chaque fois le même : la propension maladive de nos responsables à mettre le grapin sur "le pouvoir délégatif populaire" par des mécanismes administratifs certes parfois légaux mais souvent illégitimes au regard des vœux de l’électorat, surtout qu’ils sont la résultante de l’opacité décisionnelle la plus totale. A ce niveau, triste constatation, c'est le dysfonctionnement récurrent dans l'application de la Constitution qui fait prisme, preuve en est que celle-ci ait déjà été tripatouillée aux fins de servir le bon vouloir de l'exécutif. N’est-il pas temps de mettre en harmonie le code communal et celui de la wilaya avec les exigences de la démocratie participative, en renforçant davantage le pouvoir discrétionnaire des assemblées électives ? Quant au jacobinisme, la crise de Oued M'zab nous en recrache l'acide. Le diagnostic de son inefficacité est brusquement devenu si évident qu'il est sans appel. A-t-on entendu le son de cloche ? Pas le moins du monde à ce que l'on voit. Si un Didouche ou un Boudiaf et d'autres combattants de la guerre de libération ont décidé de diviser l'Algérie en cinq régions en novembre 1954 et un Ben M'hidi et un Abane en avaient ajouté une sixième"le Sahara" en août 1956 durant le congrès de la Soummam pour bien coordonner les opérations révolutionnaires à l’échelle nationale, c'est qu'il y a une topographie, une topologie et une anthropologie proprement algériennes à mettre en évidence.

L'Algérie est un vaste pays, riche, multiple et varié avec des caractéristiques régionales qu'il serait bien stupide de négliger. La régionalisation graduelle et progressive serait une finalité à viser dans les années ou les décennies à venir. Doter chaque région d'un budget conséquent, de prérogatives plus étendues et de moyens à même de prendre en charge les moindres préoccupations des citoyens, tout en réservant l’essentiel des missions régaliennes au pouvoir central n'est qu'une étape parmi d’autres dans la consécration d'une véritable démocratie en Algérie. En toute logique, ce projet devrait être précédé et accompagné de débats ouverts aux masses, à toutes les sensibilités partisanes, les collectivités locales et les personnalités nationales.

III- La construction de la parole citoyenne est nécessaire

De même remarque-t-on, au passage, que la construction de la parole citoyenne accuse un gel au niveau de la sémantique (les termes comme islamisme, terrorisme, laïcité, féminisme, bilinguisme, etc., sont flous), malmenée par les uns, déformée par les autres et incomprise par la majorité, puis, au niveau de la pratique aussi bien dans l'espace privé que public (personne ne peut dire en Algérie d’aujourd’hui en quoi consiste la liberté de conscience, celle de manifestation, ou d’opinion, etc.). En périphérie, le corps de notre société est pris de troubles incoercibles et sa rage contenue en dit long sur l'étendue de sa désapprobation tandis que, dans l’autre bout, la jeunesse n'est qu'un ingrédient utile à la décoration «khodra fouk âacha» comme dirait le proverbe ancestral. Trêve de bigoterie et de moralisation, nos jeunes ont soif du savoir et de la culture. Ils ont besoin de bibliothèques, de centres culturels et de médiathèques, des espaces où ils peuvent se défouler, comprendre, échanger, dialoguer avec le monde, des espaces qui leur permettent d'exister sur la place publique, s'affirmer en tant que citoyens responsables et discuter de leur destin, sans contraintes et à bâtons rompus. Seule la culture est, de mon point de vue, en mesure de tuer le chimérique dessein du fatalisme, la fuite et l'exil vers cet eldorado tant fantasmé de l'Europe. Bien évidemment, revoir notre stratégie éducative et la moderniser contribue à la facilitation de la tâche communicative. Notre école sinistrée, nos universités enrhumées, notre opposition divisée et nos cadres en panne de perspectives sont appelés à se réformer, s’unir, réagir, inventer des idées, s’impliquer et se lancer dans ce grandiose projet de résurrection nationale. D’autant plus qu’à côté des sempiternelles préoccupations du travail, du logement et de la dignité, il y a, incontestablement, chez notre jeunesse un désir de parler énorme, une incontinence verbale non canalisée, une frustration inquiétante sur tous les plans (sexuel, idéel, matériel, sentimental, moral, etc.).

En vérité, l'Algérie ne retrouvera sa sérénité et son ordre que dans un élan réformateur mené au départ par une technostructure audacieuse, accessible, et active sur le terrain social, j'ouvre une parenthèse ici pour préciser à ce titre que nos institutions actuelles sont dans un abîme tel que la courroie de transmission vers la hiérarchie dirigeante des doléances d'en-bas est brisée. Remédier pour de vrai, et aussi avec fermeté et constance, à la violence n'est point affaire d'appareil sécuritaire, aussi fort et structuré soit-il, mais d'une «pédagogie intrasociale»fortement parrainée d'en haut, de campagnes de sensibilisation, d'échanges régionaux (voyages populaires), de visites routinières entre les collèges, les lycées et les universités. Les algériens seront amenés à mieux tendre la perche les uns aux autres pour mieux se connaître, se familiariser et partager leurs vécus. Une thérapie, voire une catharsis à cette sourde tristesse qui les accable. Prenons donc le taureau par les deux cornes et faisons de nos foyers, nos rues, nos villages et nos villes des fourmilières grouillantes de génie, de vitalité et du mouvement. Les séquelles d'un tel repli n'attendent pas, à vrai dire, d’être démontrées. De prime abord, le langage algérien que l’on entend dans les grandes villes est un jargon incompréhensible et hétérogène qui embrasse un mélange d’idiomes, d’argots et de dialectes. Il y a sûrement ceux qui allaient me répondre que cela révèle une mosaïque et une richesse populaire. Or, la réalité est que notre société s’est laissé aveuglément conduire par le fleuve d’une diversité, certes féconde mais, hélas, mal forgée. Entre une francisation étiquetée du mal néocolonial, une berbérité touchée par des siècles d’alzheimer national et une arabisation revancharde et sauvage, le pauvre algérien s’est résigné à une aphasie structurelle qui tend à être un fondement de sa génétique, un A.D.N-bis ! On s’exprime mal chez nous, on pâtit du syndrome du langage abâtardi, on souffre de l’incompréhension de nous-mêmes et des autres. Dans un second temps, l’islamisme s’est frayé une voie dans les cervelles au moment même où l’Etat mal structuré, défaillant et frappé d’une part par le défi militariste au nom des slogans tiers-mondistes et d’autre part par sa propre "dépatrimonialisation", et sa privatisation s’est affaibli, une fois le credo du «welfare-State» a tiré a sa fin au sommet des années 1980. De nos jours, d’autres phénomènes d’ampleur apprivoisés par des signes de dévotion hypocrite nous tendent des embuscades au tournant. L'épidémie du matérialisme et le tsunami de la violence ne se partagent-ils pas déjà le quotidien de l'algérien? Le temps s'est chargé, lui seul, de faire éclater le ballon de baudruche. Or, il convient de combattre l’islamisme, le réflexe de la dictature et la superficialité matérialisante de la société à leurs racines par l’éducation républicaine, civique, citoyenne et moderne.

IV- La société doit considérer la femme

Outre la menace de désintégration, il y a risque de corruption de mœurs collectives dont notre culture pleine de tabous ne saurait se débarrasser sans qu'elle s'y perde. C'est pourquoi, il y a urgence de parler de la femme et de la famille, les premières cellules de la construction de cette parole citoyenne. Sur cette question de la femme, je pense qu'il convient de disserter au moins sommairement du modèle à imprimer à la société, de l'évolution de la mixité dans les espaces publics, des marques d'incivilités de nos rues, de la misogynie qui s'est adjugée le droit de l'appropriation massive du voile, par effet inverse. La vérité nous saute aux yeux, beaucoup sont les filles qui se voilent, non par foi religieuse, mais seulement pour se protéger de la violence d'une virilité envahissante. Ne fallait-il pas sortir de l'ornière gluante du machisme par l'introduction de la parité des sexes dans nos mœurs, nos règlements et nos lois? Sans doute, l'adoucissement du climat anxiogène de nos rues implique une dose de féminité. Nos femmes sont aujourd'hui enseignantes, directrices d'écoles, médecins, ingénieures, journalistes, artistes, écrivaines, responsables de société, etc. Elles ont fait beaucoup de sacrifices pour libérer le pays des affres coloniales, subi de plein fouet la terreur des années 1990 et attendent un retour d'ascenseur. Le viol, le harcèlement sexuel, le statut des victimes du terrorisme, le rôle de la femme dans la société patriarcale qui est la nôtre sont autant de sujets brûlants dont il est fondamental de discuter. Basta le folklore, basta la femme-vedette du 8 mars, l'oubliée de tous les jours, basta les stéréotypes de femme friandise pour des voyeurs tapis derrière des djellabas et des costumes! Place aux réformes radicales du code de la famille, à la lucidité et à la clairvoyance.

V- Révision de notre stratégie économique

Comme en toutes choses, il y a souvent une note du comique qui fait pleurer. Notre économie rentière en est une, absolument. Pour combien d'années serions-nous encore dépendants de la rente des hydrocarbures pour vivre? Le citoyen lambda qu'il soit à Alger, Béchar ou Relizane fait ses courses, la peur au ventre. La flambée, ces derniers mois, des prix de produits alimentaires et des marchandises crève un pouvoir d'achat déjà en dégringolade en même temps que des fortunés «martiens» font leur incursion dans son quotidien kafkaïen, en plastronnant en rentiers privilégiés du système. Le dinar est devenu une monnaie de singe car sa valeur d'échange sur le marché international est non reconnue, l’inflation se place au-dessus de tous les pronostics. Le citoyen s'interroge alors : faut-il un couffin de billets pour un autre de légumes? Où en est le bon sens? Où est cette Algérie de la dignité dont on nous rebat, matin et soir, les oreilles? Les questions sont assénées d'un air grave, sans concession aucune. Certains pour colmater les brèches prédisent un avenir radieux pour l'exploration du gaz du schiste. Or, personne n'est dupe de la gravité d'une telle exploitation sur les nappes phréatiques et l'environnement. En plus, nombreux sont les spécialistes qui pensent que celle-ci étant encouragée en particulier par les lobbies des multinationales afin de brader les gisements pétroliers des pays afro-asiatiques, relativement instables sur plan sécuritaire (alternance au pouvoir, démocratie, droits de l'homme, libertés, etc.). Le chantage commercial via le relais politicien (démocratisation deux poids, deux mesures) et les techniques de «dumping»économique par biais interposés (la machine de l'informel de Daesh et des factions libyennes) forcent les pays sans alternatives au pire des désastres économiques. «Patria o buitres» (l'Etat ou les vautours) crient il y a quelques mois les manifestants argentins dans les rues de Buenos Aires pour discréditer ces politiques néocolonialistes. Au Mexique et dans les pays de l’Amérique central, l’Etat est mis au défi, faute d’action sociale pour réduire la pauvreté, par des groupes paramilitaires annexes, parfois en connivence avec des multinationales. Il y a vraiment péril en la demeure d’autant que la mondialisation a cassé les souverainetés et les frontières et que les oligarchies financières internationales du Nord, menacées par une crise économique sans précédent ne lésinent pas sur les moyens pour accaparer les richesses du Sud. En ce qui nous concerne, tirer les leçons des années de vaches maigres courant 1990 est un devoir de premier ordre. Notre transition énergétique ne sera pas orientée comme en Europe vers les énergies renouvelables mais vers l'agriculture. Celle-ci devrait être notre unique dada. Ne brûlons pas les étapes et évitons les mésaventures d'une industrialisation forcée sans base ni culture, encore moins maîtrise. Evitons d’être le jouet des puissances occidentales, réalisons notre autosuffisance alimentaire, vite.

VI- L’officialisation de tamazight est inéluctable

Sur le volet identitaire, étrangement, des forces encore centrifuges et hyperconservatrices qui ont déjà défait les coutures du tissu sociétal par leur logique suicidaire sur le plan linguistique repoussent l'initiative de la constitutionnalisation de tamazight en tant que langue officielle. On dirait qu'on se laisse enfermer en Algérie dans une trajectoire linéaire, horizontale, plate et obstruée par l'obstacle de l'uniformisation aveugle. Qu’il me soit permis d’affirmer que l'Algérie ne connaîtra son plein essor que dans la pluralité, le maître-mot à l'aune duquel se mesure le degré de maturité d'un peuple. Le déni de tamazight est un drame de conscience à nul autre pareil. Il semble bien que nos paradoxes sont les talismans qu'on exulte à porter. L’anéantissement de l'espérance n'a-t-il pas poussé certains dans les extrêmes, d'autres dans la mollesse et le désenchantement chronique, et la majorité dans l'oubli de ce moule du«melting-pot» linguistique et surtout des racines de notre «algérianité» authentique? Hélas, la singularité est vécue comme un stigmate, l'anomie s'est installée en profondeur dans nos cerveaux et l'on se raccroche à l'idée de la diversité. Serions-nous mieux évolués par exemple que les suisses, les sud-africains et les belges qui ont adopté plusieurs langues officielles? Là aussi à mon sens, une brèche est à ouvrir dans le béton de nos crispations tous azimuts, inévitablement.

VII- Réaliser le projet de l’union maghrébine

Sur le chapitre maghrébin également, pas de quoi pavoiser non plus. Nos martyrs qui ont rêvé de cette union dans la fraternité en seraient sans l’ombre d’un doute fort déçus. Le retour forcé aux divisions du passé nous est, semble-t-il, un passage de routine. L’esprit collaboratif et coopératif en chiffres entre les pays maghrébins n’a pas franchi les 3,3% en 2012 au moment où le marché commun de l’Amérique du Sud a dépassé les 15% et l’association des nations de Sud-est les 26% ! Pour cause, les cicatrices algéo-marocaines se rouvrent comme des plaies béantes pour ne plus refermer, hélas! N’est-il pas temps de donner un coup de pouce aux relations bilatérales dans l’intérêt de nos deux pays, et afin de mieux contenir les troubles du Sahel et une géopolitique régionale en plein chamboulement ? Autant de dossiers épineux rempilent : la question sahraouie, les frontières, la mobilité, etc. Aujourd’hui, aucun des deux pays frères et voisins ne peut se défendre de cette faiblesse excessive de la désunion d’autant qu’elle est l’expression d’un malaise post-colonial presque systématique mais l’urgence est de nous retrousser les manches afin de nous vacciner contre cette pathologie de la haine par une pédagogie de la fraternité et du bon voisinage. Le dialogue euro-méditerranéen, le partenariat Nord-Sud avec l’union européenne, la lutte anti-terroriste en dépendent. Et puis cette exception démocratique tunisienne ne nous incite-t-elle pas à une fédération de forces pour le progrès et la solidarité pour le bien de nos populations ?

Un mot de la fin

Mon rêve personnel est de voir l’Algérie de 2015 entrer dans le panthéon de la démocratie par l’avènement d’une Deuxième République, démocratique et citoyenne qui culminera, indubitablement, le passage du flambeau générationnel à la jeunesse. A une question posée à l'orientaliste Jacques Berque (1910-1995) quelques années après l'indépendance sur le devenir de l'Algérie qu’il chérissait tant, celui-ci répondit sur le coup :"je suis pessimiste dans le présent mais très optimiste dans l'avenir". Conviendrait-il que j'adopte à mon tour l'aphorisme de ce visionnaire ? Bien volontiers et sans recul !

Kamal Guerroua, universitaire

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Commentaires (8) | Réagir ?

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adil ahmed

danke schoon

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moh arwal

Sommes nous indépendants? j'en doute fort. Il y a eu une 2eme invasion du pays par une force coloniale à partir du maroc. qui depuis se renforce toujours plus pour maintenir l'ordre colonial moyenant protection et bienveillance. sanitaire.

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