Les fausses oppositions : langue algérienne ou langue arabe ?

L'Espagne a bien été conquise par les chevaliers amazighs islamisés.
L'Espagne a bien été conquise par les chevaliers amazighs islamisés.

Une réaction à l’article paru dans El Watan le 25/12/2014, "Parlez-vous algérien ?".

Depuis de longues années, on ne cessent de remuer un sujet assez sensible car il touche à l’identité algérienne tant tourmentée. Il s’agit du problème de la langue. Beaucoup de voix se sont élevées contre une langue presque étrangère imposées aux enfants algériens. Depuis leurs jeunes âges, nos enfants se trouvent confrontés à une langue qui ne reflète point la réalité telle qu’ils la connaissent, une langue, dit-on, qui ne correspond point à leur culture et à leur imaginaire. En même temps, beaucoup de ces voix prônent la valorisation de la langue algérienne (le dialecte algérien ou el derja) comme la vraie langue maternelle de la plupart des Algériens.

Cependant, la plupart des articles que nous lisons souvent dans la presse ne vont pas au fond du problème. Il convient de préciser que la réhabilitation de langue algérienne n’est pas une formule magique car il est un leurre de penser que le développement de la langue peut s’effectuer séparément du développement de la pensée, et par développement de la pensée je veux dire tout simplement la civilisation. C’est le développement de la pensée qui érige la langue est non pas le contraire, on n’invente pas le signifiant avant le signifié, c’est en inventant la chose ou la pensée que l’on éprouve le besoin de la nommer. Notre langue est décadente tout comme notre civilisation. L’idée de valoriser et réhabiliter le dialecte algérien est certainement la seule solution offerte car cela permettra dans la même veine de nous réconcilier avec notre culture populaire que nous avons tant négligée.

Toutefois, il faudra rappeler que si l’on débarrassait l’algérien des mots français (sans la moindre haine envers la langue française) on trouvera que la langue algérienne est une langue arabe décadente mais qui a aussi subit des transformations comme toute langue. Il y a bien sûr l’influence d’autres langues tel que le berbère, mais l’arabe reste la première source de cette langue. Plus important encore est la structure de la langue algérienne, une structure purement arabe, la preuve c’est que nous continuons à conjuguer les verbes français en utilisant les règles de la conjugaison de la langue arabe. La langue arabe constitue donc la structure profonde de notre langage, cela revient à dire que si l’on tentait de réhabiliter la langue algérienne, de l’encadrer, de la structurer, nous devons inévitablement retourner à la source (du moins la source grammaticale et syntaxique) sauf si l’on veut créer une nouvelle structure et donc une nouvelle langue, un linguiste nous dira que cela ne sert à rien, car après tout, les règles grammaticales ne sont au fond que l’observation de l’usage et de la logique d’une langue. De plus, ce n’est pas seulement la structure qui pose problème mais aussi le vocabulaire. Beaucoup de spécialistes nous livrent de jolie discours sur la réhabilitation de la langue algérienne et avec elle toute une identité et un passé perdu. Cependant, il s’agit souvent que de belles paroles. Car au fond ils ne font que créer une fausse opposition entre la langue arabe et la langue algérienne. Certes, nous sommes tous capable de parler pendant des heures en langue algérienne, par contre, peut-on entretenir une discussion d’un certain niveau intellectuel : qu’il s’agit de science ou d’art, de philosophie ou de littérature, sans avoir recours à la langue française ou la langue arabe ? Il n’existe tout simplement pas de mots pour désigner les choses et les idées dans la langue algérienne si l’on considérait celle là comme étant séparée de la langue arabe. La réhabilitation du dialecte algérien devrait avoir des visés et des objectifs bien définis. La réhabilitation de la langue algérienne devrait peut-être passer par l’adaptation et la modernisation de la langue arabe. Face à de tels défis, on ne peut compter que sur les linguistes.

Concernant l’identité algérienne qui est, pour certain, menacée par la langue arabe, une langue imposée par je ne sais quel arabe mythique (car elle est seulement imposée par notre gouvernement). Il ne faut pas oublier qu’il est connu de toute personne assez cultivé que le Maghreb est berbère, cela est reconnu par l’Histoire. Il existe sans doute des arabes, des européens, et d’autres, et ils ne sont pas moins Algérien que les berbère, et par berbère je ne désigne pas seulement ceux qui parlent cette langue ou ceux qui vivent en Kabylie. Nous sommes en majorité berbères mais malheureusement nous ne le savons pas. Le Maghreb n’est pas arabe mais berbère, l’Egypte non plus : les pharaons sont loin d’être arabes, la Syrie et l’Iraq formaient la Mésopotamie : la première civilisation dans l’histoire, le Liban étaient habité par des Phéniciens qui sont arrivés jusqu’à nos terres …etc En somme, c’est une erreur de dire qu’ils ne nous considèrent pas comme Arabes or que nous savons très bien qu’eux-mêmes ne le sont pas vraiment. On est arabe dans les yeux de l’autre (Européen entre autres), mais on l’est aussi par la langue qu’on parle. Une langue arabe qui nous appartient et non pas le contraire.

Le Maghreb a embrassé l’Islam tout comme les autres pays, certes les Arabes ont apporté la nouvelle religion mais c’est justement les autres civilisations et cultures, beaucoup plus développées et raffinées que celle des Arabes, qui étaient à l’origine de la civilisation Islamique (Perses, Iraquiens, Egyptiens, Berbères, Turcs…etc). A l’arrivée de l’Islam, et non pas des Arabes, notre terre à connu une grande civilisation que nous avons su partager avec les autres. Un grand pôle de savoir, de paix, et de beauté s’est érigé grâce au Maghreb en Andalousie, ou des hommes, toutes origines et confessions confondues, vivaient en harmonie sous un ciel de tolérance.

Farouk Lamine (*)

(*) Etudiant en master 2 de littérature anglaise à l’université de Rennes 2.

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Commentaires (19) | Réagir ?

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Massine Ait Ameur

Cet article est une aberration de l'irrationel culturel qui persiste en Algerie. Les gens font semblant d' ignorer la reailte des populations Amazigh d'Algerie. Imaiginer un Wallon qui parle de son francais commme la seule langue belge! Cette langue "algerienne" dont Farouk Lamine parle n'est pas la mienne! Je n'ai jamais parle le 'derdja" bien que j'ai vecu plus de 10 annees a Alger. Je le comprends certainement et a toute personne qui me parlait dans ce 'derdja' je leur repondais en kabyle. A 70% du temps on se comprennais car Alger est une ville ou la moitie de la population est d'origine Kabyle.. Donc que chacun garde ses pions pour lui, il y a de l'espace pour toutes les langues algeriennes sur le territoire algerien. Je ne vais pas changer ma langue kabyle avec une autre langue algerienne. Franchement combien de derdjistes ont appris le kabyle ? Presque aucun ! Il ya de la place pour toutes les langues en Algerie. Seulement toutes les langues algeriennes doivent etre nourris par les petrodollars de la meme facon. On a depense des centaines de milliards de dollars pour nous imposer l'arabe classique, tres proche du djerdja mais seulement quelques millions de douros pour tamazight, proche cousin du Kabyle. Pour celui qui nous dit comme Uchen Lekhla, , on n'as rien produit en tamazight, il ferait mieux de blamer les adeptes de l'arabe classique, c'est eux qui ont le pouvoir et l'argent de leurs cotes et qui n'ont rien produit! Tamazight produiras des que la persecution s'arreteras.

A bon entendeur salut.

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Mek Ben

A votre remarque "Certes, nous sommes tous capable de parler pendant des heures en langue algérienne, par contre, peut-on entretenir une discussion d’un certain niveau intellectuel?" je vous propose de lire cette traduction de votre texte et je vous laisse répondre à votre propre question.

هادي شعال من عام، رانا غير نخلطو ف موضوع شويّا حسّاس لاخاطرش يمسّ للهويّة ول عادات ول تقاليد الجازايريّة لّي راها مهوّلة من كل جيهة. هاد المشكل متعلّق بل لوغة. شعال من ناس راها رفعت صوتها ضد لوغة تقدر تقول عليها برّانيّة نفرضت على ولاد بلادنا. من صغرهم، لبزّوز يصيبو رواحهم مڨابلين لوغة ما عندها حتى عالاقة مع عيشتهم الحقّانية، لوغة، يقولو عليها، ما تناسبش التقافة نتاعهم ولا حتّى تخيالهم. و ف نفس الوقت،تلڨى

شعال من نّاس يحوّسو يعطو قيمة لل لوغة الجازايريّة (الدارجة الجازايريّة) و يديروها تمتّل اللوغة الام الحقّانية تع لاغلابية تاع الجازايريين.

صح، حنا ڨاع قادرين نهدّرو سوايع و سويعات بل لوغة الجازايريّة، بصّاح أش لا حنا قادرين نتبادلو ب هدرة عندها شي نيڥو (قيمة) تع تفكار? ما كانش ڨاع كلمات تبيّن ل صوالح و ل فكار بل لوغة الجازايريّة يلا نعدّوها مفرزة مل لوغة العربية. باش تسترجع البلاصة تع الدارجة الجازايريّه لازم تكونلها نضرات و لهداف مبيّنة و معيّنة. باش تكون عندها قيهة لازملها بالاك تصيب بلصتها فل لوغة العربيّة مور ما هادي تتطوّر و تتجدّد. نتّكلو غير على الليسانيين باش يتحادّاو داك الشي.

Jugez comme il vous plaira ma traduction (niveau scolaire ou autre), mais sachez une chose, cette traduction a été faite sans que l'on m'enseigne la langue algérienne dans un cadre de savoir imprégné de lectures et laissant libre court à ma plume créatrice comme ce fut le cas pour le l'Arabe ou le Français. Donnons les outils nécessaires aux générations futures, ils nous montreront ce que nous aurions pu faire de l'Algérien, il y a de cela des décennies, ils en étonneront plus d’un.

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