Forum sur la paix de Dakar : le déshonneur africain

L'Armée française se veut le gendarme de l'Afrique au grand dam des Africains.
L'Armée française se veut le gendarme de l'Afrique au grand dam des Africains.

Le «Forum international sur la paix et la sécurité en Afrique» qui s'est ouvert lundi 15 décembre, à Dakar au Sénégal, prolonge l’initiative française du sommet élyséen qui avait réuni des chefs d'État africains l'an dernier à Paris. Le sommet en question avait vu circuler l'idée de la mise en place à court terme d'une force de réaction rapide"africaine".

L’intitulé de "Forum" adopté par l’événement de Dakar n’enlève rien à son importance et à sa portée. Parmi les trois cents participants qui y assistent figurent des chefs d'État (Ibrahim Boubacar Keïta (Mali), Mohamed Ould Abdel Aziz (Mauritanie) des chercheurs, des universitaires, des militaires et même dès l'industriel de l'armement. Les responsables de l’Africom et des opérations françaises dans la bande sahélo-saharienne sont de la rencontre. La Fondation pour la recherche stratégique, think tank français, apparaît comme le partenaire majeur de l’initiative.

Nous sommes là devant un témoignage majeur de l’importance de la place africaine reconquise par la France. Le Général d’armée Pierre de Villiers, chef d'état-major des armées françaises, déclarait récemment assumer le leadership de la coalition dans la région. Nous en avons une nouvelle preuve.

Sur le papier, l’Union africaine (UA), s’affabule toujours de "la responsabilité principale de la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité en Afrique". Sur le terrain, ses missions sont, à l’évidence, dévolues à l’ancienne puissance coloniale qui agit de concert avec l’hyper-puissance états-unienne. La rencontre de Dakar porte un sévère coup aux prétentions africaines d’assurer et promouvoir la paix et la sécurité sur le continent.

L’architecture africaine de Paix (APSA), dont le principal pilier est le Conseil de paix et de sécurité (CPS), est censée s’appuyer, dans l’accomplissement de son mandat, sur diverses structures : la Commission, le Groupe des Sages, le Système continental d'alerte rapide (SCAR), la Force africaine en attente (FAA) et le Fonds pour la paix reste… Tout cela s’avère n’être qu’une simple construction théorique. La sécurité des Africains se décide selon des desiderata et les intérêts qui leur échappent.

Cette situation atteste d’un échec africain, mais il est encore plus grand pour les Algériens. D’abord parce qu'ils ont toujours été au cours de l’APSA en étant à la tête du CPS, ensuite parce qu’ils ont lamentablement échoué à faire barrage aux prétentions franco-américaines dans la région Sahélo-saharienne. La mise sur pied du Comité d’état-major opérationnel conjoint (CEMOC) a tourné court à la première mise à l’épreuve. Mais, ironie de l’histoire, la situation actuelle les met, plus que tous autres Africains, bon gré mal gré, dans une posture objective d’appui logistique aux opérations françaises. Comme quoi le déshonneur qui rejaillit d’une guerre est d’autant plus grand que l’on s’essaye à lui échapper.

Mohand Bakir

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