OMC : un front de non-adhésion de l’Algérie se dessine en perspective (1re partie)

Le processus d'adhésion de l'Algérie à l'OMC est prolongé.
Le processus d'adhésion de l'Algérie à l'OMC est prolongé.

En plus des propos tenus début juillet, lors de la journée parlementaire sur les enjeux des accords commerciaux avec l’Occident et ceux régionaux, organisée à l’initiative du Parti des travailleurs en collaboration avec l’UGTA et d’autres personnalités scientifiques notamment économistes, un front pour la non-adhésion de l’Algérie à l’OMC semble se dessiner en perspective.

Ceci confirme la ferme volonté de Louisa Hanoune, leader du Parti des travailleurs qui dans un de ses meetings lors de la dernière présidentielle, avait dénoncé l’empressement du gouvernement de rejoindre le club de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) avant les élections présidentielle d’avril dernier. Le ministre du commerce précise t-elle applique son agenda comme s’il était sûr des résultats de ce scrutin. Il est clair que la candidate pointe du doigt la dernière réunion de Genève et à l’issue de laquelle Benada, ministre du commerce de l’époque avait reconnu que l’Algérie devrait encore faire des efforts, soit concéder, en raison des contraintes objectives qui découlent de son statut de pays en développement et qui persistent. Il faut préciser que rien n’est fait pour lever justement ces contraintes. Bien au contraire l’accord d’association avec l’Union Européenne va encore compliquer la démarche de cette adhésion eu égard du volume des transactions commerciales que l’Algérie entretient avec cette région du monde. En plus, elle vient d’être classée 120 éme sur 138 pays analysés dans le cadre de facilitation des échanges commerciaux. En effet, The Global Enabling Trade Report 2014, qui compare les performances de 138 pays dans quatre domaines liés à l’accès aux marchés, l’administration aux frontières, les infrastructures et l’environnement opérationnel. Les initiateurs de ce type de rapports intègrent très peu, dans leur démarche, l’intérêt des pays en développement et se placent plutôt du point de vue des pays industrialisés, il n’en demeure pas moins que l’Algérie est sérieusement épinglée pour ce qui concerne le développement des infrastructures, l’accès aux marchés étrangers, la compétence logistique, la disponibilité et l’utilisation des TIC, l’environnement opérationnel, l’indice de protection de la propriété et l’administration aux frontières. Cet indice de facilitation des échanges commerciaux, utilisé dans le rapport, révèle que les grandes économies émergentes du monde rencontrent d’énormes difficultés dans leurs efforts pour faciliter les échanges et passer au stade supérieur de développement. Parmi les pays du BRIC, la Chine, principal exportateur mondial, se classe à la 54e place sur 138 économies et devance de peu l’Afrique du Sud (59e position), le Brésil (86e), l’Inde (96e) et la Fédération de Russie (105e). Parmi les obstacles usuels aux échanges dans les pays en développement et émergents figurent, selon le rapport, la bureaucratie aux frontières, la corruption, les déficits en matière d’infrastructures et les faibles niveaux de sécurité. Par ailleurs, la plupart des économies avancées appliquent, selon le rapport, de faibles droits de douane sur les importations, mais certaines, telles que la Suisse, la Norvège et les membres de l’UE conservent des régimes douaniers complexes au sein desquels il est difficile de se retrouver, notent encore les rédacteurs du rapport. En quoi consiste justement cette adhésion ? Quels en sont les enjeux ? Au state actuel des réformes, quel avantage l’Algérie devrait-elle tirer en rejoignant cette organisation ? 

1- Pourquoi une OMC

Historiquement l’accession dans les organisations politiques sociales et juridique comme l’ONU, le BIT ou l’UNESCO est plus faciles que celles du type commercial qui fonctionnent à la manière d’un cercle restreint où les membres doivent suivre des procédures complexes et sont acceptés au cas par cas. Ces pays sont acceptés soit pour commercer des biens (GATT), de services (GATS), de réglementation des investissements étrangers (TRIMS), de propriété intellectuelle liée au commerce (TRIPS) et de standards internationaux (OTC et SPS). L’Algérie pour des raisons tout à fait déconcertantes rêve de s’engager dans le processus d’intégration au système commercial multilatéral depuis juin 1987. Mais, en réalité, les négociations ont commencé à se concrétiser à partir de la présentation par l’Algérie de son aide-mémoire du commerce extérieur en juillet 1996 puis de la tenue de la première réunion du Groupe de travail en avril 1998. La période allant de juin 1987 à juillet 1996 ayant été marquée par un seul acte, le dépôt de la demande d’adhésion. L’ouverture tous azimut d’un pays dans la sphère du commerce international trouve son origine dans la théorie développé par David Ricardo en 1817 et qui se base sur l’avantage comparatif qu’un acteur possède soit sur ses ressources soit sur son savoir faire soit sur tout autre facteur que l’autre n’a pas et qui justifie l’échange. Donc, un pays, exportant un bien pour lequel il jouit de cet avantage comparatif, a tout intérêt à adhérer au régime commercial de l’OMC dont la logique repose sur l’accroissement des exportations dans le respect du principe de réciprocité. Ainsi, l’appartenance à l’OMC sécurise l’accès aux marchés pour les exportations d’un pays, celles-ci bénéficiant désormais des droits en vigueur au niveau multilatéral. De façon symétrique et partant du fait que l’un des effets de la procédure d’accession est la baisse des tarifs douaniers et des barrières non tarifaires, il peut en résulter une baisse du coût des importations. Le processus peut aboutir à un abaissement du coût des intrants et des biens intermédiaires importés par le pays. C’est pour cela que le requérant doit se mettre en conformité avec le régime de l’OMC, le processus comporte un biais en faveur des pays du groupe de travail qui ont l’exclusivité de la proposition. Le répondant doit prouver aux membres sa capacité à se mettre en conformité avec les dispositions de l’OMC et à réduire le niveau de protection de son économie. Par ailleurs, le régime de l’OMC constitue une garantie pour les opérateurs économiques internationaux quant au respect des droits de propriété et, plus globalement, une garantie de respect des principes et des dispositions du droit commercial international. L’adhésion à l’OMC sécurise l’espace transactionnel et contractuel des opérateurs économiques internationaux et peut apparaître comme un facteur favorable d’attractivité du territoire du requérant.

2- Protéger sa production nationale ou opter pour le libre échange est un vieux débat

Déjà, moins d’une année avant le lancement des idées du libre-échange, fortement justifié par la croissance des coopérations entre nations et l’augmentation des revenus, l’Etat américain taxait les produits importés pour protéger son économie. Cette politique protectionniste à outrance est légitimée par la protection de l’industrie locale mais aussi le découragement des importations. Ce protectionnisme a connu son apogée après la crise financière de 1929, qui a éclaté à la Bourse de New York aux Etats-Unis, s’est étalée au secteur bancaire puis à toute l’économie. Face à cette crise, le Congrès sous l’Administration du président Herbert Hoover (1929 –1933), a recouru à des mesures protectionnistes, mettant en place la loi Hawley Smoot en 1930. En réponse à la politique protectionniste des Américains, d’autres pays augmentèrent à leur tour leurs droits de douane, mettant en très mauvaise posture les sociétés américaines qui vivaient de l’exportation. Cela conduisit à une suite d’augmentations des droits de douane qui fragmenta l’économie mondiale. La mise en place du programme «New Deal» par le président Roosevelt en 1933, n’a pas donné les effets escomptés, et ce n’est qu’après la Seconde guerre mondiale que l’économie américaine a retrouvé sa force économique et industrielle. Sortant vainqueur de la Deuxième Guerre mondiale et possédant une technologie de pointe et une solide industrie, l’Etat américain devait garantir des débouchés pour ses produits. A cet effet et pour contourner la progression du communisme de l’URSS, l’Administration américaine d’Harry S. Truman a mis en place le plan Marshall afin d’aider les pays européens à reconstruire leurs économies dévastées par la guerre. C’est dans ces circonstances que le GATT (General Agreement en Tariffs and Trade) voit le jour en 1947, ratifié par 23 pays. Son objectif principal étant la liberté des échanges par l’abaissement des droits de douane et la réduction des restrictions quantitatives ou qualitatives aux échanges.

Les principales règles du GATT étant : élimination de toutes les barrières non tarifaires et consolidation des tarifs douaniers ; non-discrimination entre les exportateurs étrangers et les producteurs nationaux ; l’accord d’un avantage commercial à un pays doit être étendu à tous les pays signataires du GATT ; interdiction des restrictions quantitatives sur les importations et sur les exportations ; l’interdiction du dumping et des subventions à l’exportation. La GATT s’organise sous forme de round ou de cycles qui prennent le nom de la ville où ils ont été ouverts, par le pays auquel appartient cette ville, ou par des noms de responsables politiques. Le dernier round à juste titre du GATT a donné naissance à l’OMC qui a vu le jour en 1995. A la différence du GATT, l’OMC s’est vu doter d’un organe de règlement des différends. Ses champs d’application ont été étendus aux services, aux investissements étrangers, à la propriété intellectuelle, à la santé et à l’environnement comme indiqué plus haut. (A suivre)

Rabah Reghis, Consultant et Economiste Pétrolier

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Commentaires (4) | Réagir ?

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adil ahmed

merci

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klouzazna klouzazna

La question d'or qui reste à poser !!! rejoidre l'OMC c'est bien... MAIS... pour un pays rentier qui ne produit presque rien... Pourquoi faire !!! pour casser le peu d'industire et d'agriculture qui fonctionne encore !!!

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Massinissa Umerri

La verite' est tout autre.

Dans chaque societe' (pays), il y a les fedeos... ce qui est appele' "l'argent ancien" - presque partout, une classe dominante, issue des PROPRIETAIRES TERRIENS locaux, car seule la terre donne encore et encore, sans compter et gracieusement - et souvent sans meme rien demander en contrepart. Voila donc les vise'es - tout l'argent vole' servira a faire emerger rothchild des republiques de la honte... C'est pour pereniser la dominance de ceux-la meme, sans vrais ou liens reels avec la terre... Fais donc tes comptes combien il y en a en Anegerie.

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