Hommage à Saïd Mekbel

Saïd Mekbel
Saïd Mekbel

Au lendemain de "l’élection" (je mets ce mot entre guillemets, car il n’a pas le sens exact d’une élection), de Liamine Zeroual, en Algérie, Saïd Mekbel a publié, sur le quotidien Le Matin, une caricature d’Ali Dilem, avec cette phrase "Zorro est arrivé".

Par Smaïl Medjeber

Ce jour-là, en allant le voir à son bureau, à Hussein-Dey, je le rencontre à l’entrée, il me dit :

- Tu sais d’où je viens, Smaïl ? 

A ma réponse négative, il me dit :

- Je viens du cabinet de la présidence. J’ai été convoqué parce que j’ai publié la caricature de Dilem, avec la phrase qui les dérange : "Zorro est arrivé".

Six mois après, il sera assassiné.

Quotidiennement, comme il me l’avait dit, il se savait en danger de mort. Chaque soir, il n’était pas sûr d’arriver jusqu’à chez lui.

C’était pour cette raison, le sachant donc en danger, je lui avais proposé, en cas de nécessité et urgence, de venir se réfugier chez moi, à la Cité Amirouche, à Hussein-Dey, pas loin de son bureau.

Je me souviens aussi que, lui ayant demandé de sponsoriser une rencontre culturelle amazighe qui aura lieu à Bejaïa, en lui offrant un espace publicitaire, il me dit :

-En plus c’est à Bejaïa ? Tu me fais un double piège, Smaïl. Bejaïa !

Je ne savais pas encore qu’il était natif de Bejaïa, et donc il ne pouvait pas refuser de faire quelque chose pour sa belle région de naissance, d’une part, et, d’autre part, pour la culture amazighe. Il offrit donc ce bel espace à l’association qui organisa cet événement culturel.

Saïd Mekbel était d’une simplicité et d’une modestie exemplaire.

Il restera, pour l’éternité, un grand et incorruptible homme de la plume libre.

Je m’incline devant lui, devant sa Mémoire.

S. M.

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Commentaires (1) | Réagir ?

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Kacem Madani

Cette anecdote me rappelle la chanson «Amjahedh » d’Aït Menguellet, laquelle résume le destin de ceux qui se sacrifient au front de combats et de causes menés « au nom du peuple» et qui finissent par être piégés et assassinés par des combattants de l’ombre, au service de causes crapuleuses :

Narayakh agour th’zledh dhekhss,

Narayakh ithri th’metledh dhekhss,

N’ewthakh afouss mi th'mouthadh !

A croire que le destin des hommes libres, en dehors de celui de l’exil, est de tomber face aux mutants des ténèbres !