Cette Faculté qui lave plus blanc

L'université de Constantine. Ici Mentouri.
L'université de Constantine. Ici Mentouri.

Bien que le contexte ne soit pas le même, je suis redevable au député suisse Jean Ziegler d'avoir emprunté le titre de ce texte. Parce que Jean Ziegler a été élu et n'est pas un député bouchkara, il a eu le courage de défendre son pays en dévoilant les malversations les plus déroutantes contre l'un des systèmes bancaires le plus perfectionné du monde.

En effet, nous vivons une époque où, du plus haut niveau de l'Etat aux plus petites institutions; chaque jour que le bon Dieu fait, les journaux nous gavent d'une série de cas de corruption, de malversations, de détournements, et d'escroqueries. Et comme une provocation de la part des institutions sensées lutter contre ces fléaux, nous assistons ahuris et dégoûtés devant l'absence de mesures, l'inaction et les tentatives d'étouffement de ces sales affaires.

Mais il ne faut pas se leurrer ni généraliser car l'Algérie quelque part se porte bien. Oui, il y a des ilots ou le filtrage est à son maximum, et ou pas un sou de l'état n'échappe à la vigilance de notre chère administration trop fortement bureaucratisée. C'est en l'occurrence le cas de cette faculté de technologie de l'université de Constantine-1 qui est tellement vigilante qu'elle lave plus blanc. Voyons l'historiette et ensuite sa symbolique.

Il y a plus d'une année, un enseignant de cette faculté est parti pour un séminaire dans un pays étranger. Généralement, à cause des problèmes administratifs, il est d'usage pour gagner du temps, que les enseignants payent leurs frais de séjour et de participation puis se font rembourser au retour. Le cas particulier pour cet enseignant est que durant le payement des frais de participation, les organisateurs du séminaire à l'étranger ont accepté de ristourner 25€ aux participants algériens. Les frais de participation étaient initialement déclarés à 350€. 

Au retour, pour se faire rembourser, il est également d'usage de remettre un dossier pour justifier la participation effective au séminaire. Comme dans le dossier de cet enseignant, il y'avait une différence de 25€; alors, la machine administrative de la faculté s'est mise en branle. L'enseignant est informé par téléphone par l'ex-vice-doyenne de l'anomalie, et on lance la procédure de récupération du Trop perçu (TP de 25€). Oui, on ne plaisante pas avec l'argent de l'Etat. C'est normal!

Jusque-là tout est parfait. L'enseignant s'est rappelé de sa formation et de son travail dans des universités des pays de même niveau de rigueur que la Suisse en matière de gestion. Il s'est rappelé que lorsqu'il lui arrivait de participer à des séminaires, le recouvrement de ses dépenses au retour n'était pas soumis à tant de rigueur comme c'est le cas de la faculté de technologie de Constantine1. Il en conclut tout simplement qu'ici c'est mieux que la Suisse. Et donc à prendre l'exemple de cette faculté, l'Algérie pourrait se classer au Top des pays non corrompus. L'enseignant demanda ce qu'il fallait faire pour rembourser les 25€. On lui expliqua qu'il faut aller procéder au change inverse auprès de la banque et de ramener un justificatif à la faculté. Ce qu'il fit.

Apres une année, n'ayant reçu aucun contact concernant cette question, l'enseignant, pour être clean (blanc) est allé s'enquérir auprès des services financiers pour voir si tout est en ordre. Mais voici la bonne surprise! On découvre que la faculté en question n'a pas du tout lancée la procédure de recouvrement des frais qu'elle doit à cet enseignant.

Du fait que cet enseignant comme beaucoup de ses collègues n'est pas du genre à décoder les rubriques des fiches de salaires, et à suivre les virements; il était certain que les frais qu'on lui devait était déjà perçus surtout après avoir constaté une telle rigueur en gestion. Apres une minutieuse recherche, on a trouvé finalement une copie du dossier avec le TP des 25€ mais aucune trace de lancement du remboursement? Moralité: sans cette histoire des 25€, l'enseignant n'allait jamais pouvoir se rendre compte qu'il n'allait pas récupérer ses frais. Comme quoi, à quelque chose malheur est bon!

Mais bien que la vice doyenne de cette faculté a admis qu'il y a eu erreur du cote de l'administration de la faculté, la solution proposée est tout simplement qu'il s'agit d'une erreur irrécupérable, et donc que je dois tout simplement garder un bon cœur contre cette mauvaise fortune.

Il faudrait peut-être aussi noter que cet enseignant n'a jamais demandé de stage et c'est la première fois qu'il croyait pouvoir bénéficier des frais de participation à un séminaire. Par simple curiosité, il serait, par exemple, intéressant de rendre public un fichier dans lequel on dénombre les stages et les congés scientifiques ainsi que le bilan par enseignant y compris ceux des doyens de cette faculté.

Mais enfin cette historiette mérite-t-elle d'être racontée ? Eh bien oui, car elle n'est pas le fait du hasard. Associée à d'autres faits, elle est le lapsus et l'acte manqué que le père de la psychanalyse Sigmund Freud a bien pris soin de formaliser. Pour la circonstance, elle exprime une vengeance des baltaguias de la faculté contre l'expression libre.

Sigmund Freud, lui même, n'a pas échappé a de fortes pressions de la part des autorités qui régissaient sa communauté. On lui a demandé de modifier certains termes introduits dans ses théories psychanalytiques pour ne pas choquer les mœurs de la bourgeoisie Viennoise. Ce quoi, il a répondu en 1921 dans un de ses essais: "On ne sait jusqu'où on peut aller dans cette voie ; on commence par céder sur les mots et on finit parfois par céder sur les choses".

Faut-il encore s'intéresser à cette faculté et taire ou citer les problèmes qui l'affectent ? Dans ce sens, je pense que les journaux font bien une partie de leur boulot. Mais vu de l'intérieur et en l'état actuel des choses, cela ne vaut plus la peine d'y penser car comme le chante si bien Georges Moustaki "Il est trop tard; .. Passe, passe le temps,...".

En s'inspirant de quelques vers d'un poème d'El-Mutanabbi, on pourrait convenir que "les grands hommes se reconnaissent par les grandes œuvres qu'ils accomplissent et non par les postes qu'ils occupent". Ainsi, s'aveugler est une chose, vouloir nous aveugler pour nous faire taire ou dire que l'université va bien est une aberration qui ne satisfait que les responsables baltaguias. Si "le responsable baltagui" semble dire contre toute logique : "j'en profite, donc je reste". On est bien en droit de dire contre vents et marées : "Je m'exprime, donc je suis".

De Constantine, Abdelouahab Zaatri

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Commentaires (2) | Réagir ?

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Ali DERBALA

Les hommes ne sont pas blancs comme la neige !!!

Il n' y a pas de fumée sans feu mais un tas de fumier chaud fera l'affaire.

J'aurais aimé que vous dénonciez le pédagogique, le scientifique mais pas l'office du tourisme.

C'est vrai l'administration est une machine infernale.

Je vous invite à lire ma contribution qui date de 2010.

Ali DERBALA. Ethique et tics aux Universités scientifiques algériennes. Le Quotidien d’Oran, Rubrique : Débat, 01 Septembre 2010, p. 05.

http://www. lequotidien-oran. com/index. php?news=5142370.

Sachez que le 13 Octobre 2013, on s'est réuni les directeurs de labo de Blida avec le recteur.

Devinez ce que nous dit le recteur.

La "gendarmerie scientifique" était là avec une liste d'enseignants qui ont eu à plusieurs reprises des pécules en devises (plus de1000 euros à chaque fois pour un stage d'un mois alors qu'ils ne restaient que quelques jours à l'étranger),

Moi j'avais dénoncé cette situation en 2010 dans le même article !!

"Beaucoup d'enseignants ont bénéficié des stages pendant des années mais ils n'ont fait aucun effort de persister à chercher et rechercher pour obtenir leur doctorat. Ils ont abandonné leur parcours scientifique. C'est aussi un cas d'éthique, soit il faut les relancer à poursuivre leur recherche ou éventuellement à rembourser ce qu'ils ont pris comme devises sans contrepartie scientifique. Parmi ces enseignants, beaucoup se procuraient chaque année des lettres d'invitation à l'étranger, en général en France. Ils obtiennent des sommes conséquentes et ne font que descendre à Roissy et revenir au pays quelques jours après, les poches pleines de devises. Ils n'ont jamais pu communiquer dans des conférences ou faire des articles, mais chaque année ils sont en stage. Sans production scientifique, l'université ne doit pas leur offrir les services d'un office de tourisme. ".

Parfois, il ne faut pas défendre l"indéfendable". C'est du dormez-vous !!!

Il y a des priorités à dénoncer, qui est du civisme et ce n'est pas de la délation, tel le pédagogique:

1. Ali DERBALA. LMD : un nivellement vers le bas dans le contexte algérien. Le Quotidien d’Oran, Rubrique : Opinion, Samedi 24 Août 2013, p. 07. http://www. lequotidien-oran. com/index. php?news=5186832

1'. Ali DERBALA. Le LMD : un nivellement vers le bas dans le contexte algérien. El Watan, rubrique : Idées-débats, Mercredi 18 septembre 2013, p. 24.

http://www. elwatan. com/contributions/le-lmd-un-nivellement-vers-le-bas-dans-le-contexte-algerien-18-09-2013-228329_120. php

où j'ai écrit :

NIVELLEMENT VERS «LE BAS» DES ETUDIANTS DANS LE LMD

A l'université scientifique, il est faux de dire que seule la langue française poserait problème aux étudiants qui normalement l'ont étudiée comme seconde langue ou première langue étrangère durant tout leurs parcours éducatifs, primaire, moyen et secondaire. Ces études ont été négligées. Les défis qui interpellent l'enseignant du supérieur en Algérie aujourd'hui sont pluriels. L'on ne peut prétendre les énumérer tous.

a) 70% des étudiants en première année des sciences exactes ne savent pas le résultat de la multiplication remarquable de 8 x 7. Beaucoup répondront 54 ou 48 ;

b) 80% des étudiants ne savent pas plier une double feuille, en mettant un bout de la feuille contre l'autre et en tirant sur la feuille ;

c) Ces dernières années, on a eu parmi des étudiants « bacheliers », quelques spécimens qui ne savaient pas le résultat de 0 x 6 ;

d) Les étudiants n'écrivent pas sur une ligne, ils écrivent dans l'espace blanc entre deux lignes. Au collège, on ne leur inculque même pas ces notions les plus élémentaires ;

e) Ils ne peuvent pas lire un mot en entier. Ils le tronquent en plusieurs sous mots ou lettres. Sans exagérer l'adverbe « Soit », est lu « so, i, t » ;

La fonction est lue en deux mots, « fonc, t (s) ion » ;

f) Des élèves de mastaire ne peuvent même pas lire couramment un texte, bien qu'ils sont présents depuis 5 années à l'Université ;

g) Aucun élève d'un concours d'accès à l'école doctorale de RO, n'a pu résoudre un exercice élémentaire de calcul de coûts, du niveau de fin d'études de l'ancien primaire ou le primaire primitif;

h) Certains étudiants de la 3ième année licence de mathématiques ne savent pas encore la définition d'une « fonction » ;

i) Des étudiants de Mastaire 1ère année ne savent pas encore tracer une droite dans le plan, de type ax+by = c (du niveau de seconde des lycées). Dans l'espace de dimension trois, il faut qu'ils fument du thé pour avoir l'euphorie et puissent imaginer une droite dans l'espace ;

j) Nos étudiants ne recopient plus, ils redessinent ce qu'on a écrit sur le tableau. Si vous êtes fatigué, et par exemple vous penchez une intégrale, ils la pencheront automatiquement jusqu'elle devienne oblique. Le silence des étudiants nous pèse beaucoup. Ils ne répondent à rien. Il n'y a aucune communication entre les étudiants et les enseignants ;

Nos étudiants ne maitrisent ni la prononciation, ni l'écriture, ni le parlé et ni…ni… Personnellement, j'incrimine les enseignants de français de tous les paliers.

k) Des étudiants ne savent pas prononcer le chiffre ou le nombre deux (2), qu'ils prononcent doux, du brouillon qu'ils prononcent brillant, « la mesure » que certains prononcent la « miseure » ;

l) Des étudiants du Géni-civil lisent le « bâtiment », la « bâtimat » ;

m) Ils n'ont jamais appris à conjuguer au présent de l'indicatif. Tous écrivent : je résoudre, je représenter;

n) Tous lisent par exemple l'expression ils comptent, ils comptant.

Ce n'est que des bribes.

le scientifique où j'ai dénoncé les faux professeurs qui achétent leurs articles !!!

c'est le même article

Ali DERBALA. Le développement de la recherche scientifique en Algérie. Le Quotidien d’Oran, Rubrique : Débat, Samedi 15 Juin 2013, p. 06. http://www. lequotidien-oran. com/index. php?news=5184169

Ali DERBALA. La bureaucratie freine le développement de la recherche scientifique en Algérie. El Watan, rubrique : Idées-débats, Mercredi 17 Juillet 2013, p. 22.

http://www. elwatan. com/contributions/la-bureaucratie-freine-le-developpement-de-la-recherche-scientifique-en-algerie-17-07-2013-221386_120. php

"LES PUBLICATIONS SCIENTIFIQUES

La langue universelle de la science est l'anglais. Le problème de publications d'articles scientifiques se pose avec acuité pour certains chercheurs. En effet, un « embargo » s'est imposé pour ces scientifiques par des éditeurs anglo-saxons. En général, on essuie un refus de publication non pas au motif scientifique mais rédactionnel, qui parfois n'est pas motivé. Les réponses des référés ou arbitres de journaux sont de type : the article is not well-written, bad English, poor English, to be read by a native English, will need to be rewritten before it can be considered for publication etc. Certains pays, comme Taiwan, ont cassé cet embargo en acceptant de publier les travaux de qualité des chercheurs des pays du tiers monde. Ces journaux ne sont pas payants. Dans ma spécialité, la seule et ancienne revue de langue française RAIRO, revue d'automatique, informatique et recherche opérationnelle, s'est « anglicanisée » et se dénomme actuellement RAIRO Operations Research Journal. Les rares articles publiés en français ne le sont qu'au bout de plusieurs années d'arbitrage, même aux érudits francophones.

Des scientifiques algériens arrivent à publier en anglais moyennant :

- De gros efforts rédactionnels. Certains articles peuvent trainer jusqu'à cinq ou six années pour être acceptés pour publication dans une revue de renommée établie;

- Un payement cash. La page d'un article coute ou leur revient au moins à 30 euros.

- Une traduction de leur article à partir de 200 euros, chose qui est inadmissible pour un scientifique. On traduit un article scientifique en Allemand, en Russe, en Chinois, des langues qui ne sont pas universelles mais pas en Anglais. Je connais beaucoup de scientifiques qui publient régulièrement mais qui ne peuvent pas tenir un discours en Anglais;

- D'être cosignataires des articles avec des étrangers. Parfois, il est signalé un état de complaisance. Parmi les cosignataires étrangers, certains, peuvent ne pas être connaisseur du sujet ou du thème traité dans l'article mais ils apposent quand même leur nom de renommée.

- Une duplication d'un article déjà paru mais en tenant le soin de changer son titre. Ce cas « pathologique « s'est déclaré dans une Université de l'intérieur du pays. Si ce n'est la vigilance du directeur de thèse de ce travail de doctorat, responsable de l'édition d'un journal algérien, Phytochem & BioSub Journal, le même article serait publié dans un journal japonais, Asian Journal of Natural & Applied Sciences.

- Je suis destinataire d'un courrier émanant d'un grand éditeur européen de journaux scientifiques, Elsevier Webshop, m'invitant à soumettre un article. Mon article sera édité par un expert de mon sujet de recherche, les éditeurs sont tous natifs anglais ou de langue maternelle anglaise, issues des prestigieuses universités du monde, le service est rapide, le manuscrit sera corrigé et renvoyé à l'envoyeur en cinq à sept jours, choisir l'anglais britannique ou l'anglais américain, les prix commencent à partir de 9. En « Créole algérien », comme il a dit lui, même dans la science ils aiment « nous manger « notre argent. Un scientifique doit décliner ces offres. La DGRSDT doit donner des moyens aux Universités pour créer et diffuser leurs propres savoirs à travers des journaux scientifiques reconnus par les Conseils Scientifiques des Universités algériennes, des revues, des magazines etc. "

Voilà Si Abdelouahab.

Amicalement,

Ali DERBALA.

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Guel Dring

Si tu parles tu meurs, si tu te tais tu meurs alors taisez-vous et mourrez (attendez la mort, non pas se suicider) . Vous aurez au moins la conscience tranquille que vous n'avez pas été la cause à un effet quelconque. Le coeur a ses raisons que la raison ne saisit pas particulièrement dans ce libre arbitre qui fait les croyants et les... non croyants.

Les romains 30/26 : "A Lui (Allah) appartiennent ceux qui sont dans les cieux et la terre: tous Lui sont entièrement soumis". Y a-t-il une quelconque chose ou fait que l'on ne l'attribue à Dieu ?

Si c'est cette montagne, c'est une création de Dieu, si c'est un oiseau rare, il ne peut être que l'oeuvre de Dieu, le Titanic a été entaillé par un iceberg en pleine mer ce n'est plus le hasard, la mort était de garde cette nuit-là. Le Matin est là comme le mur des lamentations, peut être qu'un jour une prière s'élevant de ce site, le tout étant parfaitement connecté, sera-t-elle exaucée de nous libérer de cette tumeur maligne qu'est le pouvoir de l'ombre.