La journée de l’enseignant entre noblesse et ingratitude

L'enseignant est encore une fois confronté à l'arbitraire administratif.
L'enseignant est encore une fois confronté à l'arbitraire administratif.

J’espère que notre ministre lira cette complainte émanant d’un instituteur fier d’avoir servi son pays, je l’ai écrite à l’occasion de la journée mondiale de l’enseignant, une date symbole qui pourra peut-être aider nos responsables à assimiler le message de ma lettre.

Mon intervention traite l’objet de la discrimination faite lors de l’élaboration du statut particulier de l’enseignant, une ségrégation qui ne devrait pas avoir lieu si les concepteurs de ce statut avaient vraiment tâtonné le milieu scolaire avec perspicacité et finesse. En haussant les sortants des universités à la catégorie 14 au détriment de ces milliers d’instituteurs qui continuent d’être les poutres de l’enseignement algérien, cette décision qui relève de la cécité politique, me parait être un crime prémédité par ceux là qui méconnaissent la réalité de la famille éducatrice. En publiant via la presse la nouvelle classification des enseignants, une forme de stupeur m’a envahi, nous venons d’assister à un arbitraire administratif commis par la tutelle à l’encontre des instituteurs qui se retrouvent ignorés voire méprisés par les responsables qui ignorent tout des tréfonds de la société algérienne, ces responsable qui ont satisfait une tranche d’éducateurs au détriment d’une autre.

Ces actes nous font rappeler la période du diktat du parti unique où le népotisme et le clientélisme étaient la seule devise qui émaille la scène nationale. J’ignore les critères sur lesquels ces messieurs se sont appuyés pour avaliser une telle décision de réduire la valeur pourtant majestueuse des instituteurs pour les mettre iniquement au bas de l’échelle des considérations. Nul ne nie le travail lassant de ces opprimés de l’alphabet pour initier et préparer nos enfants aux niveaux supérieurs que sont le collège et le lycée, une tâche si pointilleuse qui exige beaucoup de diligence et tant d’opiniâtreté. Cette dure besogne octroie à l’enseignant du primaire l’épithète du phare de la nation. Les arguments avancés par le ministère concerné se résument en ces points suivants : - Les nouveaux sortants des universités qui occupent les postes d’enseignants seront désormais classés à la catégorie 14 parce que leurs diplômes de licence leur concèdent le titre de cadres dotés de savoir et de compétences. La vérité est que ces derniers ne sont nullement qualifiés pour assumer ce rôle si complexe, vu la flagrance de leur médiocrité sur tous les plans a fortiori le domaine linguistique, car ils sont le produit d’une université nécrosée par l’ilotisme et gangrenée par la politique du laisser-aller qui a fait pulluler la bêtise et fructifier l’hébétement au sein de ces soi-disant étudiants, les preuves sont patentes, toute la société se désole de cette grave érosion intellectuelle et peine à discerner le bon grain de l’ivraie tant la tumeur moribonde de l’indigence a atteint la moelle spirituelle de la tribu estudiantine.

Leurs certificats de licence ne sont paradoxalement que des attestations qui dévoilent le naufrage cérébral de ces étudiants plutôt ces victimes de l’idéologie imposée par le régime en place. Leur nomination en qualité d’enseignants qui s’effectue aveuglément et sans formation aucune, prédispose notre école à un cataclysme plus périlleux qu’est la destruction massive de toute la société. Les dirigeants de ce secteur savent pertinemment que la faillite de l’enseignement algérien émane surtout du fait d’imposer des méthodes archaïques associées à un programme beaucoup plus confus où des fautes jonchent les livres de lecture. - Les instituteurs, ces piliers de l’école algérienne classés à la catégorie 10, demeureront victimes d’une classification qui porte les présages d’un mépris marié à une forme d’ingratitude criante. Ces enseignants, grâce à qui notre école a connu l’apogée de la gloire, sont considérés, selon l’appellation de nos chefs, une couche en voie de disparition, ces chefs qui oublient intentionnellement qu’avec la disparition de ces instituteurs c’est le prestige de l’école algérienne qui disparaîtra. Le prétexte allégué par la tutelle afin de donner une entorse à l’instituteur est que ce dernier figure parmi ceux qui n’ont pas suivi un parcours universitaire, une logique qu’ils veulent faire admettre par le moyen de la tromperie médiatique d’une part et la force opprimante de la loi, d’autre part. Le temps où tout le monde sait que la compétence prouvée des instituteurs dépasse l’infime connaissance reçue à l’université, par ces novices diplômés, leurs carences en matière de maîtrise en langue a fait d’eux des sujets pourvus de complexes, abreuvés de mentalités surannées.

Le silence lâche de notre fameux syndicat à savoir le célèbre Unpef qui a cautionné ouvertement la mise à l’écart du rôle vénérable des enseignants du primaire lors des négociations avec le ministère de l’Education, a contribué à nuire à nos intérêts socioprofessionnels, les représentants de ce syndicat n’ont pas défendu la situation pourtant précaire des instituteurs en feignant d’arracher des résultats approuvables. Ceux là savent bien que leur représentativité subira un effondrement après l’échec prémédité de leurs négociations avec la tutelle. - L’autre subterfuge proféré par notre tutelle pour duper les enseignants consiste à exiger une formation furtive répartie en quelques semaines contre une promotion d’une catégorie aux instituteurs, une façon de léser ces derniers en mésestimant leur indéniable rendement. Ceux qui s’obstinent à refuser une telle supercherie revendiquent fondamentalement la comptabilisation de leur année de formation dans les ITE, ces instituts qui nous ont hautement formés sur le plan pédagogique et scientifique. Si les licenciés affectés en masse dans les écoles primaires se sentent rudoyés par mon écrit, et qui se sont vu promus lors de la dernière classification au détriment de mes semblables, ils n’ont qu’à aiguiser leurs plumes pour répondre en prenant tout le peuple à témoin. Quand on assiste à une destruction massive des esprits et qu’on se contente de revendiquer notre pain journalier, le cataclysme est à redouter. La cible privilégiée des pouvoirs totalitaires reste toujours l’Ecole pour former ainsi des handicapés moraux qui ne peuvent qu’accentuer la gangrène culturelle et occasionner l’amputation sociale.

Mis à part le côté morbide des programmes enseignés qui génèrent l’apparition de comportements qui expliquent la bêtise préméditée au sein de la plus noble institution de tous les pays, l’état précaire de l’enseignant algérien demeure le problème majeur le moins pris en charge par les décideurs qui savent pertinemment que la mise à l’aise de l’instituteur sur le plan financier ne fera qu’élever notre dignité culturelle au sommet de la gloire, chose qui dérange éminemment ceux qui planifient la chute du savoir dans ce pays, les preuves en sont très criantes. Notre étudiant sortant de l’université nationale est incapable de rédiger une missive correctement ni sur le plan sémantique ni sur le plan orthographique. Nos jeunes, munis d’attestations de licence, sont dans l’impossibilité de raisonner ni de critiquer objectivement, devenant des sujets conditionnés par les théories pédagogiques plutôt obscurantistes inoculées dès son entrée à l’école. Devant cet état de fait, malgré sa dangerosité, l’enseignant algérien vivote, sans réaction aucune la pauvreté émaille son quotidien, la précarité menace son avenir de phare de la nation, et ses représentants à qui est incombée la tâche de défendre ses intérêts socioprofessionnels, à savoir le fameux syndicat national, en l’occurrence, l’UGTA, sont vendus, troquant tous les avantages des fonctionnaires contre les intérêts personnels des dirigeants, un syndicat qui s’est mis volontairement au diapason du pouvoir sus aux travailleurs de tous les secteurs. En ce 5 octobre, l’enseignant algérien fêtera sa journée mondiale dans une Algérie qui geint encore sous les fouettements d’une oligarchie polyvalente dans sa tyrannie.

Chekri Rachid

Plus d'articles de : Forums

Commentaires (3) | Réagir ?

avatar
albert smail

Que d'amertume, d'animosité et de ressentiment !... Mais vous pouvez demander vos droits sans rabaisser les autres!

avatar
mohand tawdect

Les nobles instituteurs qui avaient compris qu'ils avaient été recrutés pour détruire l'école des valeurs sont restés à leurs postes pour instruire et sauvegarder des valeurs à soustraire aux attaques de la main noire. Les autres, inconscients du péril, continuent à former d'innocentes mécaniques tout en quémandant des augmentations que la main noire octroie pour pérenniser une reproduction dont leurs progénitures sont protégées.

visualisation: 2 / 3