Égypte : le nouveau pouvoir ordonne l'arrestation du guide suprême des Frères musulmans

Mohamed Badie
Mohamed Badie

Mohamed Badie et d'autres responsables du mouvement sont accusés d'incitation à la violence.

La justice égyptienne a ordonné mercredi l'arrestation du guide suprême et de plusieurs responsables des Frères musulmans dans le cadre des violences meurtrières de lundi au Caire, ajoutant à la tension prévalant depuis l'éviction du président islamiste Mohamed Morsi il y a une semaine. Parallèlement, le nouveau Premier ministre, Hazem el-Beblaoui, entamait des consultations pour former un gouvernement de transition, dans un climat de méfiance des laïcs anti-Morsi et d'hostilité des partisans de l'ex-chef de l'État déposé par l'armée, après des manifestations monstres de l'opposition.

Le procureur général a ordonné l'arrestation du guide suprême des Frères musulmans, Mohamed Badie, et d'autres hauts responsables de la confrérie, qui sont accusés d'incitation à la violence en relation avec les violences sanglantes survenues devant le siège de la Garde républicaine au Caire lundi, a-t-on indiqué de source judiciaire. D'après des sources judiciaires, 200 personnes ont été inculpées dans le cadre de ces violences qui ont fait 51 morts et 435 blessés, selon les urgences, durant une manifestation de partisans de Mohamed Morsi. La confrérie, qui a appelé au "soulèvement" après ce "massacre", a affirmé que des soldats et des policiers avaient ouvert le feu sans aucune raison sur les manifestants.

"Réponse disproportionnée" de l'armée

L'armée a assuré pour sa part avoir répliqué après une attaque de "terroristes armés". Mais pour l'organisation de défense des droits de l'homme Amnesty International, "même si certains manifestants ont pu se montrer violents, la réponse (de l'armée) a été disproportionnée et est à l'origine de décès et de blessures parmi la foule". Mohamed Badie était déjà sous le coup d'un mandat d'arrêt pour de précédentes violences. En revanche, Mohamed Morsi, arrêté après sa destitution, ne fait "pour l'heure l'objet d'aucune poursuite" judiciaire, a assuré un porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Badr Abdelatty. Il se trouve "en lieu sûr, pour son propre bien, et il est traité dignement", a-t-il assuré.

Alors que la tension reste extrême dans le pays, le nouveau Premier ministre (dont la nomination mardi soir a été accompagnée de celle du Prix Nobel Mohamed El Baradei à un poste de vice-président) tentait de former dans les meilleurs délais un gouvernement. Hazem el-Beblaoui, 76 ans, vice-Premier ministre et ministre des Finances en 2011 durant la première période de transition post-Hosni Moubarak, aura la lourde tâche de favoriser la réconciliation dans le pays et de redresser l'économie, au bord de la faillite.

"Nous ne pactisons pas avec des putschistes"

Dans la foulée de sa désignation, un porte-parole de la présidence a indiqué que Hazem el-Beblaoui allait proposer "quelques postes" aux Frères musulmans au sein du gouvernement de transition. Mais cette tentative de main tendue a été sèchement rejetée par la confrérie. "Nous ne pactisons pas avec des putschistes. Nous rejetons tout ce qui émane de ce coup" militaire, a déclaré Tareq al-Morsi. La confrérie a également dénoncé le plan de transition présenté par Adly Mansour. "Un décret constitutionnel par un homme nommé par des putschistes (...) ramène le pays à la case départ", a commenté le haut responsable Essam al-Erian sur son compte Facebook.

Le cadre institutionnel provisoire annoncé par Adly Mansour prévoit, entre autres, l'adoption d'une nouvelle Constitution et la tenue d'élections législatives d'ici début 2014. Dans l'attente, le pouvoir législatif reste entre les mains du président par intérim. Le Front de salut national (FSN), une coalition laïque, et le mouvement Tamarrod, à l'origine des manifestations de masse ayant abouti à l'éviction du président Morsi, ont aussi émis des critiques. La coalition est "en désaccord" avec "des articles" du décret publié et "proposera" ses "propres amendements au président", a indiqué le FSN.

Les principales capitales étrangères ont exprimé leur vive inquiétude face aux violences, en premier lieu les États-Unis, qui ont toutefois dit être "prudemment encouragés" par le calendrier des élections. Dans la rue, les deux camps, pro et anti-Morsi, restaient fortement mobilisés. En une semaine, une centaine de personnes ont été tuées dans des heurts à travers le pays. Dans la nuit de mardi à mercredi, des attaques de militants armés contre une base de la police et deux points de contrôle ont en outre fait deux morts dans la péninsule du Sinaï (nord-est)

Avec AFP

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