La décadence programmée du tourisme en Algérie

Malgré les déclarations officielles, il est évident que le tourisme algérien mange son pain noir depuis des décennies.
Malgré les déclarations officielles, il est évident que le tourisme algérien mange son pain noir depuis des décennies.

C’est une évidence que de dire que le secteur du tourisme est à la traine par rapport aux secteurs de nos voisins immédiats et par rapport aux autres pays de la méditerranée. Pourtant notre pays a des atouts indéniables, puisque sa situation géographique, historique et ethnologique est comparable voir similaire à celle des pays méditerranéens.

Avant d’entamer les causes qui ont conduit ce secteur à la dérive, revenons un peu sur critères universels favorisant de développement du tourisme dans un pays ou une région donnée. Pour tout pays qui souhaiterait faire du tourisme un vecteur économique de développement durable, il doit disposer :

  • Des attraits ou sites touristiques : soleil, mer, montagnes, Sahara, monuments historiques, artisanat… ; 
  • Des infrastructures de base : Ports, aéroports, routes, autoroutes, hôpitaux et moyens de transport… ;
  • Des facilités administratives : Politique et volonté politique du réceptif et du recevoir, Tarifs compétitifs, Douanes, Banques… ;
  • Des infrastructures d’accueil : hôtels, complexes hôteliers de divers niveau mais aux normes et standards internationaux, bonne qualité de service et des prestations… ;
  • Sécurité et stabilité politique : Avoir une bonne image de marque du Pays, avoir également une capacité et une culture de recevoir des citoyens... Les situations suivantes sont incompatibles avec le tourisme : Guerre, guérilla, instabilité politique, catastrophes naturelles (séisme, épidémie…). Voilà en gros les critères de base requis pour le développement du secteur du tourisme. 

A l’instar des pays voisins, notre pays possède quelques uns de ces critères mais pas d’autres. Seulement chez nos voisins, on a su adopter, avec sérénité et maitrise, une approche et une démarche en rapport avec les moyens dont ils disposent, en posant les jalons un à un, étape par étape à l’effet d’édifier et bâtir solidement les bases cardinales nécessaires à l’essor de ce secteur. Leurs efforts et leur pragmatisme ont abouti au niveau qu’on leur connait actuellement. Pourtant chacun de ces pays a choisi une voie différente de l’autre en ciblant un "créneau client" bien distinct de l’autre.

Pas chez nous en Algérie. Pourquoi ? (that is the question)… A ce sujet je serai particulièrement ravi de voir réagir les lecteurs du matindz, notamment les professionnels du tourisme et de l’hôtellerie (Agents de voyages et hôteliers). Cependant et ce jusqu’au début des années 1980, le tourisme algérien était sur la bonne voie. 

En effet il y avait un programme ambitieux : des hôtels de bon niveau sont inaugurés chaque année, des écoles hôtelières formaient des techniciens de bon niveau, les meilleurs sont envoyés à l’étranger pour une formation supérieure. L’image de l’Algérie, la destination Algérie était soignée et entretenue, des représentations du tourisme étaient à pied d’œuvre dans les pays ‘émetteurs’ tels la France, l’Allemagne, la Suède, l’Italie, la Suisse, le Royaume Uni…. Malheureusement aujourd’hui tout ça a disparu. De Charybde en Scylla, d’année en année le secteur du tourisme sombre dans la médiocrité et la déchéance : de Ministère à part entière, il est passé à Vice Ministère, puis Secrétariat d’Etat, jusqu’à devenir un simple office de tourisme.

Durant les années 1990, multipartisme oblige, le ministère du Tourisme est devenu un portefeuille d’enjeu politique sans intérêt puisqu’il est attribué, en guise de contre poids ou de quota, à tel ou tel parti politique. 

Sans mémoire il est devenu une coquille vide, un secteur sinistré. Le sous secteur de l’hôtellerie, entendre la gestion du parc hôtelier, n’est pas mieux loti, car il n’a jamais connu une telle décadence, que depuis qu’il a été placé sous la tutelle de la tristement célèbre Gestour. Je ne peux pas omettre d’évoquer la démarche avortée de la privatisation des hôtels. En voici des exemples édifiants classés par ordre décroissant de débâcle: 

  • Hôtel Ryadh Sidi Fredj ;
  • Hôtel Salem Skikda
  • Hôtel d’Orient Annaba
  • Hôtel Mordjane El Kala
  • Hôtel Hidhab Sétif
  • Grand Hôtel Oran

Cette opération a été confiée à Gestour. Quelle monumentale erreur ! Parmi toutes les formules de privatisation possibles, la Sgp Gestour a choisi la plus désavantageuse :

  • Ventes des hôtels : les hôtels qui ont été cédés à des businessmen sans scrupules, certains sont transformés en cabarets et milieux de dépravation. Tous sont en situation litigeuse.
  • Contrat de management : Même si nous pensons que cette formule est désavantageuse sur le plan financier pour l’Algérie, elle a été aussi et surtout mal négociée notamment sur le plan formation des cadres. On aurait dû, comme cela a été le cas chez les pays voisins, exiger de placer pour formation un cadre algérien pour un cadre expatrié dans les filières essentielles : Gestion et Administration, Cuisine, Restauration, Banquet, Contrôle, Etages. De cette façon, des dizaines de cadres auraient bénéficiés d’une formation de haut niveau.

C’est ainsi que des cadres tunisiens et marocains ont été formés et se trouvent propulsés comme Directeurs d’hôtel dans des chaines internationales, non seulement dans leurs Pays respectifs, mais partout dans le monde. Les pays voisins et ceux d’Europe (ex- pays socialistes) ont choisi la formule de cession des hôtels aux professionnels, formule adéquate pour pérenniser et développer la profession. Opération réussie chez nos voisins à telle enseigne certains bénéficiaires se sont retrouvés à la tête de chaine hôtelière. 

Attention toutefois, cession aux professionnelles ne veut nullement dire don, mais plutôt une formule de vente avec conditions spécifiques. En plus de l’insuccès (du bide devrai-je dire) de la privatisation, une autre opération, non de moindre importance, est confiée à Gestour et à Sahli. Il s’agit de la réhabilitation et la mise à niveau des hôtels pour Gestour et de la construction des Mariott, Sheraton et autres équipements des Résidences officiels pour Sahli. 

Parions que les deux démarches ont de fortes chances d’aboutir à un scandale en série du type que connaît la Sonatrach aujourd’hui.

Felah K.

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Commentaires (3) | Réagir ?

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juba tamazight

Vous voulez dire tourisme ou terrorisme?

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Notproud

La dernière fois que j’ai visité Alger «La Blanche avec des Touristes» j’avais Honte ! le mot est faible.

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