Pour une stratégie de changement pacifique

La population qui veut un changement voit tous les moyens de revendication interdit.
La population qui veut un changement voit tous les moyens de revendication interdit.

Le changement n’est ni possible ni souhaitable sans un projet et une stratégie.

Depuis la révolte d’Octobre 1988, voilà maintenant presque 25 années de cela, les Algériens auront entendu parler de tous les projets de société possibles et imaginables par le microcosme politique Algérois. Des projets islamistes liberticides aux projets marxistes-léninistes en passant par leur alter égo le trotskisme et le nationalisme hybride et chauvin. Pour les uns la démocratie est une invention judéo-chrétienne incompatible avec nos principes islamiques. Pour les autres, elle est une invention bourgeoise qui permet de mieux exploiter l’homme par l’homme car ils ne l’imaginent pas sans son corollaire, le libéralisme économique.

Le courant nationaliste développe un véritable patchwork. Une économie de bazar avec le maintien d’un tissu industriel et commercial hybridé, une démocratie sous contrôle sur fond de négation pratique des fondements constitutionnels de la République. En effet, officiellement, les libertés publiques et privées sont reconnues par toutes les constitutions qu’a adoptées le peuple mais dans les faits elles sont partout réprimées. La liberté d’association gelée, le droit syndical non reconnu aux travailleurs en dehors des appareils du régime, les libertés de cultes et de confession sont bafouées etc.

Les partis politiques de la mouvance dite démocratique, à quelques rares exceptions, sont de simples clubs politiques d’une élite en mal d’adaptation ou d’intégration d’une société en régression par rapport aux idéaux des Lumières qu’elle défend. 

Pour le courant islamiste son projet de société est clair. S’il recoure parfois à la phraséologie des démocrates, il se garde cependant de jouer sur les définitions de la terminologie politique vulgarisée par une presse nettement nuancée entre celle d’expression arabe et la presse éditée en langue française. Ainsi, pour la démocratie, on avance la Choura. Terme signifiant consultation. La réduction de la démocratie à la seule consultation sans nous dire comment seront désignés ces consultants et sur quels critères et pour combien de temps n’est qu’un subterfuge savamment entretenu pour justement vider la démocratie de sa substance et réhabiliter le despotisme oriental largement étudié par les politologues et les écrivains des XIX ème et XX ème siècles. 

Si l’on dresse un tableau laconique des projets de sociétés véhiculés par les uns et les autres, nous trouverons de tout et de toutes les couleurs. Des autonomistes-indépendantistes aux laïques libéralistes, en passant par les conservateurs et les laïques marxisants etc. La question qui se pose et s’impose est la suivante : Que veut le peuple ? S’est-on demandé un jour sur ce que veut le peuple ? 

Il est très difficile de se prononcer sur ce que veut le peuple. En l’absence d’enquêtes et de sondages faits par des organismes spécialisés et qualifiés, nos réponses ne seront que de la pure spéculation que beaucoup de citoyens verront, et ils auront raison de le penser, qu’elle est entachée de subjectivisme et orientée selon les convictions personnelles de leurs auteurs. Néanmoins, il est possible de prendre le risque de le dire en se fondant sur un certains nombres de critères mêmes s’ils demeurent attaquables. 

2- Avons-nous vraiment un projet politique de changement démocratique ?

Beaucoup d’hommes et de partis politiques déclarent et affichent des projets bien rédigés mais sont-ils vraiment portés par ces hommes qui voudraient que le peuple les mandatent pour les concrétiser ? Le peuple lui-même aspire-t-il réellement à la démocratie ? 

Le régime, et avec lui tous ces conservateurs que la démocratie annihile leur projet de société rétrograde qui le soutiennent implicitement ou directement, ont réussi à maintenir le peuple dans l’ignorance de ses droits par le truchement d’une école promouvant une idéologie liberticide. Ainsi, à l’école, les élèves n’apprennent plus les principes de liberté, de justice, d’égalité, de citoyenneté etc. Il nous suffit de parcourir les manuels scolaires pour nous rendre compte que nous avons affaire à une école rétrograde dont les programmes sont incompatibles avec les aspirations légitimes à la liberté, à la justice et à la démocratie.

3- Stratégie d’action pour le changement pacifique :

Jusque là, l’action des partis politiques a été de recourir aux médias et à se manifester dans les rues. Le Pouvoir contrôle bien les uns que les autres. Les médias n’ouvrent les colonnes de leurs organes que pour les leaders politiques qui s’inscrivent dans leur ligne éditoriale. C’est ainsi que nous voyons rarement des interviews ou entretiens accordés par la presse dite de mouvance démocratique à des leaders islamistes ou des organes de la presse dite conservatrice à des leaders démocrates. 

En ce qui concerne les médias lourds notamment la télévision publique, celle-ci est hermétiquement fermée à tous les courants de l’opposition. Les rares fois que des chefs de partis y sont invités, c’est beaucoup plus pour les ridiculiser que pour leur permettre de s’exprimer librement. Les débats sont généralement très orientés et les volumes horaires très réduits. L’interdiction des marches, meetings et manifestations publiques dans les rues de la Capitale surtout font que les partis politiques ont toujours eu du mal à les organiser. Même les réunions publiques sont soumises à des autorisations préalables difficilement obtenues. Il est à signaler qu’une distinction n’est faite entre une initiative privée et celle d’un parti agrée pour l’obtention des autorisations préalables. Ajoutée à cela, la présence policière trop affichée des renseignements généraux qui n’hésitent pas à interroger directement les animateurs de ces réunions. 

Ces deux modes d’actions ont prouvé leur insuffisance. D’autant que les partis politiques calquent leur activité sur celle des agendas officiels du régime. Entre deux consultations électorales, c’est le vide qui s’installe et le citoyen se trouve livré à lui-même. Il va falloir imaginer d’autres moyens pacifiques d’action politique pour réussir le changement espérer. 

- Se déconnecter des planigrammes officiels et agir selon ses propres agendas.

- Travail de proximité pour convaincre les citoyens à isoler le régime en désertant ses appareils politiques (les partis du régime et ses organisations de masse).

- Dénoncer la corruption qui est à la base du renforcement de ces appareils et organisations du régime. (le développement de l’opportunisme politique à des fins strictement personnelles).

- Structurer le maximum de citoyens dans des cellules du parti même à titre gracieux.

- Exploiter les espaces privés élargis comme les fêtes familiales, les rencontres personnelles pour élargir l’audience des partis de la mouvance démocratique.

Cette stratégie d’isolement social du régime le fragilisera davantage et permettra l’émergence de nouvelles forces qui porteront le projet de changement démocratique. 

Abdellaziz Djeffal

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Commentaires (12) | Réagir ?

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adil ahmed

merci

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adil ahmed

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