L'institution dominante au sein des républiques dominées

Le parlement algérien joue le rôle de caisse de résonance du pouvoir.
Le parlement algérien joue le rôle de caisse de résonance du pouvoir.

..Ce maudit ratio qui nous donne à peine le droit de voter, de nous immoler sur vos places publiques, de nous éterniser dans vos prisons, ou psychiatries ou de quitter notre pays dans des canots de fortune, fuyant la misère et l’injustice à laquelle votre plein pouvoir au taux «4/4» nous condamne à vivre, à errer dans le monde tels de vulgaires délinquants, suivis et poursuivis, le peuple algérien est le seul peuple au monde qui a du mal à vivre et dans son pays et en dehors de celui-ci.

Avouons que depuis son Esprit des Lois, Montesquieu (1689/1755), a défini la règle d’équilibre et des séparations des pouvoirs, laquelle en 1787 inspirera les auteurs de la Constitution américaine, d’ailleurs le seul véritable régime présidentiel, et en 1791 ceux de la constitution française et à laquelle le régime présidentiel représentatif est supposé obéir.

Dans de tels régimes, la notion de "souveraineté nationale" liée au mandat représentatif prime sur la notion de "souveraineté populaire" liée au mandat impératif, définit par Jean-Jacques Rousseau dans sa "démocratie directe ". La souveraineté nationale stipule donc que cette entité collective, abstraite, unique et indivisible qui est la nation est souveraine, elle englobe outre les citoyens vivants, du passé et ceux à venir. La nation dépasse donc la somme des individus que compte le peuple. Le mandat octroyé aux représentants de la nation dépasse donc celui de ses électeurs. Les citoyens aussi bien actuels que futurs ne pourront donc contester leurs représentants, théoriquement la constitution et la règle des séparations des pouvoirs jouent dans ce cas un rôle de contre-pouvoirs.

Dans des pays comme le nôtre qui a été colonisé, par soucie de sauvegarder "les acquis du peuple", le pouvoir est confié au bon soin d’un leader incontesté et incontestable, généralement une personnalité historique, qui fait unanimité dans son peuple, véritable "gardien du temple", pour guider son peuple sur les sentiers du développement, éclairés par les principes fondateurs et l’histoire de sa nation, autour de laquelle tout le peuple se reconnaîtra et pour laquelle tant de sacrifices furent versés sur l’autel de la sainte liberté.

Dans de tel système, le président, "élu au suffrage universel", arbitre les institutions de l’Etat, là où il constate des violations, des dérapages, ou des manquements, il intervient, actionne son autorité constitutionnelle pour rappeler à l’ordre la partie défaillante, militaire fusse-t-elle ou civile cependant, dans un Etat "providence" comme fut le nôtre, (par opposition à celle de l’Etat policier, limitant le rôle de l’État à des fonctions purement régaliennes police, Armée etc.), en plus d’être le premier magistrat, le président se montre au peuple comme l’autorité paternelle suprême, vers laquelle le citoyen peut se réfugier, lorsque toutes les portes lui sont fermées !

En règle générale, les inconvénients liés à ce genre de régimes sont nombreux. Premièrement, l’échec dans de telle gestion est endossé par le président lui-même, même si celle-ci est relativement collégiale et passe par diverses centres de décisions d’exécution et de suivi au sein des rouages de l’Etat. Deuxièmement, derrière une présidence affaiblie ou peu représentative, peuvent se cacher des lobbies ou autres groupes de pression, la présidence risque donc de devenir l’arbre qui cache la forêt de certains intérêts occultes et des raisons d’Etat. Et bien souvent, elle dissimulerait éventuellement l’institution dominante ! Autrement, le président peut donc engager son pays dans des protocoles d’accord à long terme, ratifiés ou non, en dehors des instituions "élues", habilitées à en prendre connaissance, donc sans leur consultation ni contrôle. Derrière de tels systèmes, pourrait donc se cacher la nébuleuse du vrai pouvoir avec tous ses rouages et ses nuances au sein de régimes malades, avide de pouvoir, donc absolument despotiques. Au sein de tels régimes, tout est fait pour affaiblir les institutions de l’Etat, les vider de leur substance, les réduire à de vulgaires façades institutionnelles, sortes de "zombies institutionnels", démunis de toute volonté propre, pour les faire abdiquer au bon vouloir de certains cercles d’intérêts obscures bien sûr.

Cela dit, force est de constater, qu’avant toute opération d’affaiblissement des instituions, il a fallu à l’institution dominante d’achever ce que j’appelle le processus "d’affaiblissement de la citoyenneté", elle consiste à empêcher le peuple d’exercer pleinement sa citoyenneté, donc sa souveraineté, étant donné que celui-ci est la seule source de souveraineté, il faudra donc l’en détrôner, par quels mécanismes ? Primo : réduire le peuple à une masse humaine entièrement assistée, de jouisseurs et d’égoïstes, donc combattre en lui toute forme d’altruisme ou d’engagement vers l’autre, ou quelconque intérêt à la chose publique, de telle sorte que la violence s’offre pour lui comme unique moyen de régler ses problèmes ; secundo : tuer en lui tout esprit d’initiative aussi bien individuelle que collective ; tertio : mainmise sur la société civile, la rendre en une sorte de société débile, acheter la paix sociale en étouffant les foyers de feu des revendications populaires qui s’allument ici et là par des sacs d’argent qu’on jette dessus les réduisant à de vulgaires requêtes sociales et existentielles ; quarto : encourager la médiocrité, la banalité dans tous les aspects d’expression politique, artistique, culturelle et cultuels ; quinto : faire régner un climat de peur persistante du lendemain, de menaces sécuritaires toujours présentes et du possible chaos et montrer ainsi, l’Etat comme un sauveur ; sexto : cibler la classe cultivée pour la réduire au silence.

Affaiblir les institutions de l’Etat, les instrumentaliser en dehors des intérêts suprêmes de la nation est une stratégie bien connue, pour faire passer certains schémas ou politiques, sauvegarder des intérêts cumulés et affirmer le statu quo et l’état de fait ! L’affaiblissement s’opère en amant comme en aval. En amant, affaiblir la représentativité populaire réelle au sein de ces institutions, donc semer le doute dans les esprits de ses représentants quant à la "consistance" de leur mandat, c’est un moyen de pression efficace pour les faire abdiquer à leur volonté. En aval, en paralysant leur fonctionnement, ou en opposant une institution à l’autre dans des querelles stériles, contreproductives arrivant finalement au blocage des institutions, le cas de l'Égypte après-révolution nous en dit assez, opposant la présidence, le parlement "ikhouanistes", au constitutionnel.

Encore faut-il comprendre que les rivalités entre institutions souvent sont bénéfiques à la santé démocratique d’un pays sain et donc, au bon fonctionnement ds ces dernières, pourvu que l’arène où s’affrontent les divers acteurs institutionnels reste le débat d’idées pour l’intérêt suprême de la nation, sans prééminence d’un pouvoir sur l’autre, le principe du compromis reste donc la règle d’or. "Théoriquement" la constitution procède "au bornage" du champ d’action pour chaque institution de l’Etat, mais dans des régimes malades, l’institution dominante procède à son propre « balisage bis", dessinant d’autres limites de fonctionnement que celles définies initialement par la constitution.

Le premier invariant dans des régimes despotiques est, en règle générale, la dominance d’une institution sur toutes les autres et au sein de l’institution dominante, la dominance d’un noyau dur généralement ethnique, d’obédience idéologique ou d’intérêts économique, sur l’institution dominante elle même, donc sur le pays tout entier, donnant ainsi un coup de grâce au principe d’équilibre et des séparations des pouvoirs, encore faudrait-il que l’Etat prenne en compte la diversité, politique, géographique et ethnique du pays dans toute sa pluralité et sa richesse, afin d’épargner à sa nation bien des malheurs inhérent à une gestion exclusivement ethnique, qui exclut toute forme de pluralité culturelle, cultuelle ou d’expressions idéologiques minoritaires.

Le second invariant est la peur de ces régimes "du facteur surprise", ils doivent donc maîtriser totalement leur "sujet", avoir à portée de main, une liste exhaustive de "ministrables", voire de "présidentiables", acquises à leur cause, à laquelle ils reviennent au cas où, gérer de "nouvelles mentalités", représenterait donc un risque majeur à ne pas courir pour ce processus de prééminence et donc à la pérennité du régime, raison pour laquelle le facteur "jeunesse" se trouve totalement écarté au sein du leadership dans de telles systèmes despotiques ainsi, toute perspective d’un changement fait peur, de telle sorte que le seul changement possible et donc admis, reste celui qui s’inscrit dans la continuité de ces régimes en règle générale.

Le troisième invariant reste son vouloir "obsessionnel" à maîtriser coûte que coûte toute forme d’opposition politique, médiatique ou d’expression revendicatrice par des mécanismes infaillibles, la perversion financière sous forme de promotion sociale et /ou politique en est l’autre, le clonage puis l’implosion, bien que l’intimidation policière ou judiciaire reste la règle, pour que finalement en face d’eux, ils ne doivent voire qu’une opposition du pouvoir au lieu d’une opposition au pouvoir.

Chez-nous, je constate que l’institution la plus critiquée c’est celle de la présidence, comme si les autres institutions fonctionnaient à merveille, ou que celle-ci (la présidence) même après avoir récupéré «prétendument» son ¼ de pouvoir tant réclamé par le président lui-même. "Je refuse d’être un 3/4 de président !", disait-il… La présidence se trouve manifestement indépendante de celles-ci, pour encaisser toute seule le déchaînement médiatique, ou que ces dernières sont tout à fait innocentes par rapport à ce qui s’est passé comme malheurs dans ce pays ! Une seule réponse me vient à l’esprit : nous les Algériens (de l’intérieur) on n’a pas le courage de pointer du doigt, la partie qui détient une capacité avérée de nuisance, de la critiquer même par des insinuations, la présidence quant à elle, quels que soient ses défauts et ses faiblesses, elle n’a liquidé personne pour l’avoir critiqué à ma connaissance ! Elle en a été plutôt victime : n'a-t-on pas tuer un président en direct ?

Depuis l’indépendance, tout le monde s’est chamaillé pour des ¼, des 2/4 ou des ¾ de pouvoir, oubliant que le peuple est la seule source de souveraineté, bien que notre constitution ait balisé le champ des exercices institutionnels et réparti les prérogatives revenant à chacune d’elles. En vérité, pour très gradé, très honorable et illustrissime que vous soyez, le peuple est plus gradé, plus honorable et plus illustre, il reste donc l’unique patron, il a détrôné de plus puissants, de plus illustres, que Néron dans toute sa somptuosité les envie.

Seriez-vous enfin sage d’aider vos compatriotes, à récupérer eux aussi l’intégralité de leur citoyenneté, à exercer librement leur part de souveraineté ? En vérité, plus votre peuple gagne en citoyenneté, plus vous-même gagnerez en pouvoir et en légitimité et vous épargnerez à votre patrie bien des malheurs, l’intérêt suprême de la de nation ne mérite-t-il pas cela ?

Je crains qu’arrivera un jour où les algériens perdront patience, la révolution s’imposera alors comme unique voie, en vue d’un changement substantiel dans ce pays. Me concernant, je refuse que mon pays soit brûlé, détruit ou que mes compatriotes souffrent d’avantage dans une révolution qui risque d’être détournée vers un autre despotisme, plus redoutable, plus terrifiant encore.

Je refuse de même d’être un ¼ ou ¾ de citoyen, ce maudit ratio qui nous donne à peine le droit de voter, de nous immoler sur vos places publiques, de nous éterniser dans vos prisons, ou psychiatries(le pays tout entier s’est converti en une sorte de grand hospice psychiatrique), ou de quitter notre pays dans des canots de fortune, fuyant la misère et l ‘injustice à laquelle votre plein pouvoir au taux «4/4» nous condamne à vivre, à errer dans le monde tels de vulgaires délinquants, suivis et poursuivis, l’Algérien est le seul peuple au monde qui a du mal à vivre et dans son pays et en dehors de celui-ci, on ne cessera de réclamer calmement et pacifiquement l’intégralité de notre citoyenneté, qui nous revient de droit, avec tous ce qui va avec comme droits et devoirs, je dis basta à l’usurpation de pouvoir en notre nom et place !.

Je ne cesserai donc de pointer du doigt tous ceux qui ont mit l’honneur de mon pays dans la boue, saccager ses ressources et mettre à plat le moral collectif des algériens que nous sommes et ce, quelque soit leur place ou leur rang au sein de l’état ou de l’institution à laquelle ils appartiennent, ou même leur capacité de nuisance qu’ils pourront éventuellement déchaîner sur ma personne, je les condamnerai, sans peine et sans retenue, assurez-vous messieurs ! Je n’ai aucun avion, aucun hélicoptère, pour venir perturber votre sérénité, ni aucun canon, aucune kalachnikov à vous pointer au nez, ma seule arme ce sont ces écrits, son chargeur c’est la douleur, la misère, le marasme du vécu du peuple auquel j’appartiens avec fierté, ses balles resteront des mots, uniquement des mots, qui parfois blessent, mais qui guérissent bien souvent, contrairement à vos balles à vous.

Mourad Chaalal

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Commentaires (5) | Réagir ?

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khelaf hellal

Ce qui est valable en Europe est à fortiori valable en Algérie à l'ère du turbo-capitalisme à la Bouteflika sous la férule du FMI. Lire à ce propos la chronique de Maurice Tarik Maschino

"Les détrousseurs des peuples" du journal El Watan d'aujourdhui le 25/4/2013.

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khelaf hellal

Vous avez raison, il faut affranchir et doter du ratio de 4/4 de citoyen le citoyen et la citoyenne Algérienne. Il faut qu'il et elle reconquiert leur entière liberté, les désaliéner au sens philosophique de JJRouseau ou de La Boétie. Il faut que chacun et chacune arrête de créer son Dieu et de façonner ses tyrans à son image en leur abandonnant sa volonté, sa conscience et sa raison. Il faut leur donner tous les moyens de s’extraire à l’abandon de soi et de son libre –arbitre, tous les moyens qui les sauvegardent de toute forme d’aliénation et de contrainte. Tout ce qui les détermine et leur démontre qu’il sont les unique artisans de leur propre destin sur terre. Vous avez écrit que le peuple est la seule source de souveraineté, il est le plus gradé, il a détrôné les plus puissants, rien de plus vrai, seulement il faut préciser qu'il s'agit là d'un peuple d'hommes et de femmes libres de toutes contraintes et de toute forme d'aliénation qui le déposséderaient de son self-control et de ses capacités de jugement rationnel. Un peuple tellement éclairé qu'il peut souffler son oppresseur comme un fétu de paille. Et si on veut affaiblir la puissance du tyran qui vise à vous affaiblir il faut donner de la puissance au peuple en général et aux citoyens et citoyennes en particulier. L'aliénation des masses à la veille des prochaines élections présidentielles pourrait prendre les allures d'une aliénation sectaire de grande envergure ou l'adepte embobiné et sous influence prendra la défense de son gourou même si on lui souffle à l’oreille qu'il ne fait que l'escroquer et lui détourner sa conscience et son libre-arbitre. Autrement dit ceux ou celles qui sont contre le quatrième mandat seront ceux et celles qui ne veulent pas que le Maitre-gourou continue ses gestes de charité et de bienfaisance en direction du bas peuple. Et comme le bas peuple a la mémoire courte il prendra toujours position et soutiendra aveuglément son gourou bienfaiteur, le deus ex machina qui condescend à sa misère quotidienne et accourt lui régler ses problèmes le temps d'une campagne électorale. Le bouc-émissaire dans ce cas est tout désigné pour focaliser sa propagande d'intox et gagner haut la main les élections présidentielles avec le lumpenprolétariat (prolétariat en haillons) et les laissés-pour-compte de la société ceux qu'il n'a pourtant pas cessé d'humilier et d'appauvrir durant son règne. Par définition l'aliénation est comprise comme la dépossession de l'individu ou la perte et le transfert de son self-control au profit d'un autre individu ou d'un groupe, par conséquent, l'enjeu du quatrième mandat va se jouer principalement sur l'aliénation mentale des masses populaires par l'argent, par la religion et par les jeux (le football), le système régnant y puisera à satiété dans les ruses et les manipulations mises en épreuve de Machiavel jusqu'à Napoléon Bonaparte pourse reconduire et perpétuer son hégémonie. A défaut d'offrir des postes de travail avec la couverture sociale qui va avec et le salaire de la dignité, le système n'a pas d'autre choix que d'investir dans des sociétés de bienfaisance en direction des larges couches de laissés-pour-compte, des parias de la société et des exclus du système scolaire, du sous-prolétariat des entreprises et des chômeurs désespérés, des esclaves salariés et pauvres émargeurs au filet social, les mendiants et SDF qui peuplent les rues de la capitale et des autres grandes villes du pays, les habitants paumés des bidonvilles auquel on rend visite à la veille de chaque élection pour régulariser leur situation et leur offrir la charité donnant-donnant du jour J, les abonnés permanents aux couffins de ramadhan et les inscrits en liste d'attente de logements sociaux qui profitent de la générosité ostentatoire du système à la veille de chaque échéance électorale. Des gisements d'électeurs aliénables à souhaits que le système aime à faire grossir parcequ’ils rapportent gros à l'exploitation électorale. Des sociétés de bienfaisance volontaires et entièrement dévouées au système, des supplétifs de la grande bourgeoisie campradore nationale détentrice du pouvoir , missionnaires à l’occasion pour défendre sa politique et qui rendent la populace heureuse de tout le bien qu'il lui veut, heureuse de choisir son tyran et de reconduire le statuquo qui la fait retourner à sa misère de tous les jours, à sa servitude et à son déclassement social. Tout le grand chantier justement est dans la désaliénation de ces masses populaires manipulées, endoctrinées et mises sous le conditionnement pavlovien dans le but de perpétuer la domination et l'ordre établi.

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