L'homme d'affaires et opposant russe Boris Berezovski retrouvé mort

L'oligarque Boris Berezovski était un critique acharné de Poutine.
L'oligarque Boris Berezovski était un critique acharné de Poutine.

Boris Berezovski, oligarque russe et féroce critique de Vladimir Poutine, a été retrouvé inanimé samedi 23 mars dans sa propriété d'Ascot (Berkshire), au Royaume-Uni. C'est son gendre, Egor Schuppe qui a fait part de sa mort sur sa page Facebook, sans toutefois en préciser la cause.

Installé à Londres depuis treize ans, Boris Abramovitch Berezovski, "BAB" pour les intimes, était le contempteur le plus virulent du président russe Vladimir Poutine, qu'il avait pourtant contribué à porter au pouvoir en 2000. Sa vie, digne d'un roman d'aventures, avait inspiré le cinéaste Pavel Lounguine pour son film Un nouveau Russe, sorti en 2001.

La dernière apparition publique de l'oligarque, réputé maître de l'intrigue, remonte au 31 août 2012. C'était dans l'enceinte d'un tribunal londonien, Boris Berezovski réclamait alors 3 milliards de dollars à son ex-protégé, au autre oligarque russe, Roman Abramovitch, très en cour au Kremlin. Trois mois d'audience et un intense déballage médiatique allaient lever le rideau sur l'univers glauque des nouveaux maîtres de la Russie post-soviétique, leurs intrigues, les protections dont ils jouissaient au plus haut niveau de l'Etat, leurs pratiques douteuses des affaires. Et aussi sur leurs somptueux train de vie : super-yachts, châteaux, contrats mirobolants, assassinats commandités, fortunes blanchies dans des placesoffshore.

A l'évidence, les financiers et industriels "venus du froid", d'ordinaire si ombrageux, préfèrent les tribunaux britanniques aux russes. La présidente du tribunal, Elisabeth Gloster, brusquement rompue au vocabulaire de la pègre russe avec le mot "krycha" (protection, parrainage) noté dans ses attendus, débouta Boris Berezovski, le qualifiant de "témoin intrinsèquement douteux". Le coup fut dur à encaisser. Non content de perdre la face, l'oligarque allait devoir assumer tous les frais de procédure, y compris ceux de la partie adverse.

Et pour affronter l'arène judiciaire et médiatique londonienne, les deux anciens comparses n'avaient pas regardé à la dépense, louant les services des meilleurs avocats du barreau. L'heure était aux comptes et ceux de Boris Berezovski étaient dans le rouge. Estimé en 2006 à plus de 5 milliards d'euros, son pactole avait fondu : énormes frais d'avocats, mauvaises affaires, comptes gelés dans le cadre d'autres affaires judiciaires... Les œuvres d'art de sa collection personnelle ont d'ailleurs été récemment mises aux enchères à Londres.

La descente aux enfers est sévère pour celui qui, il y a quinze ans, était l'homme le plus riche et le plus puissant de Russie. En 1995, Boris Berezovski a ses entrées au Kremlin. En 1996, il fait partie des six oligarques qui financent la campagne de Boris Eltsine en vue d'une réélection, un effort récompensé par des participations importantes dans les joyaux de l'industrie.

Grâce aux liens développés avec le premier président russe, l'homme, petit gabarit, chauve, roi de la faconde, règne bientôt sur les destinées de la Russie. Le président et sa famille sont abreuvés de cadeaux. La presse de l'époque le surnomme "la poche". Dans le même temps il dirige le Conseil de sécurité, possède la plus grosse chaîne de télévision, gère le casting des "successeurs" engagé dès 1999 car Eltsine, épuisé, sait qu'il va devoir bientôt passer la main.

C'est lui qui poussera vers le trône le plus insipide des dauphins, Vladimir Poutine, un fonctionnaire grisâtre et d'une obéissance prussienne. A l'époque, l'ascension du magnat est fulgurante. Il est partout : dans l'acier, les médias, l'industrie automobile, l'aéronautique avec Aeroflot, le pétrole avec Sibneft. Sa méthode ? La "privatisation des bénéfices" : 80 % des recettes d'Aeroflot à l'étranger sont gérées par la société Andava, basée à Lausanne, qu'il détient à 50 %. Ces fonds ne reviennent jamais en Russie.

Quand Vladimir Poutine est élu, le 26 mars 2000, Boris Berezovski fête la victoire de son poulain au champagne dans sa villa de la costa Brava. Il ne sait pas que quelques mois plus tard, il tombera en disgrâce et devra prendre le chemin de l'exil. Une fois que le lieutenant colonel de l'ex-KGB est installé au Kremlin, M. Berezovski devient petit à petit l'épouvantail des médias officiels. Le responsable du pillage des ressources de la Russie, c'est lui.

Issu de l'intelligentsia juive moscovite, Boris Berezovski avait fait des études de mathématiques appliquées à l'université de Moscou. A cause de ses origines, il avait vu sa vocation contrariée et renoncé à sa passion - l'aérospatiale. Intelligent, madré, le jeune étudiant a soif de revanche.

Au début des années 1990, son heure est arrivée. Il se lance alors dans la revente d'automobiles, le secteur le plus criminalisé. Entrepreneur roué, il cultive des relations avec tous les milieux, dont celui du crime. Attentats, incendies criminels, assassinats commandités font partie du quotidien. Boris Berezovski n'est pas épargné.

Le 7 juin 1994, à Moscou, une charge placée sous sa voiture explose. Son chauffeur est décapité, son garde du corps grièvement blessé. Lui s'en sort indemne. Un inspecteur accourt sur les lieux. Il s'appelle Alexandre Litvinenko.Officier de police, il mène l'enquête. C'est le début d'une amitié. Douze ans plus tard, lorsque Alexandre Litvinenko, lui aussi réfugié à Londres, meurt dans des souffrances atroces après avoir ingurgité un thé au polonium, une substance radioactive rare, en compagnie d'anciens collègues des services, Boris Berezovski est à son chevet. Il pointera alors un doigt accusateur vers Vladimir Poutine, accusé haut et fort d'avoir manigancé l'empoisonnement de l'ancien agent Litvinenko. L'enquête n'a jamais abouti.

Marie Jégo/Lemonde.fr

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Commentaires (2) | Réagir ?

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madjid ali

drs kgb massad idem

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laid baiid

Jamais un homme d'affaires Algérien n'a été assassiné. Pourquoi???

Réponse : il conjugue bien le verbe "manger".

FORZA ITALIA!!