Contribution : In Amenas, pourquoi le régime algérien a réagi aussi durement

Contribution : In Amenas, pourquoi le régime algérien a réagi aussi durement

Cette contribution est le prolongement d’une interview que j’ai donnée à leur demande à la rédaction de Radio France Internationale –RFI- sur le thème l’impact de l’action terroriste et la situation gazière de l’Algérie.

1. Les partenariats dans l’exploration des hydrocarbures au Sud algérien Hassi R’mel, est le plus grand gisement algérien mais existent d’autres gisements à In Salah, Ohanet, Tin Fouyé Tabankort, Rhourde Nouss, Hamra et Alrar pour ne citer que les plus importants. Selon le rapport du Ministère de l’Energie, diffusé officiellement, pour 2011 nous avons principalement les champs exploités par SONATRACH qui est le champ de Hassi R'mel se trouvant à 550 Km au sud d'Alger, découvert en 1956, ceux de Rhourde Nouss, Alrar, Gassi Touil et Tin Fouyé Tabankort . Pour les champs exploités en association participant à hauteur de 25% du volume de gaz produit en Algérie, nous avons In Salah qui est exploité en association avec BP et Statoil, Ohanet en association avec BHP Billiton; Tin Fouyé Tabankort en association avec Total et REPSOL; Hamra en association avec Total et In Amenas en association avec BP et Statoil; Ce dernier site est frontalier avec la Lybie. In Amenas est situé à 240 km au nord-est d’Illizi à 730 au sud-est d’Hassi Messaoud et à 1 500 km au sud-est d’Alger. C’est cette base-vie du site d'exploitation située sur le site gazier de Tiguentourine (à 45 km à l'ouest d'In Amenas) qui a fait l’objet d’incursion par des terroristes le 16 janvier 2013 au matin. Mais fait important, les sites d’In Amenas sont connectés par un gazoduc de 973 km de long à Hassi R’Mel et par un pipeline de 800 km jusqu'au port de Skhira dans le Golfe de Gabès en Tunisie. La sécurité se pose à ce niveau notamment pour le plus grand gazoduc algérien Transmed destination l’Italie d’une capacité dépassant les 40 milliards de mètres cubes gazeux actuellement en sous utilisation.

2. La capacité de production de gaz de In Amenas est en hausse. La moyenne annuelle des exportations algériennes est passée de 72 millions de tep durant la période 1971-1999 à plus de 130 millions de tep entre 2000 et 2010 soit prés d’un doublement. Selon le rapport du Ministère de l’Energie, publié en 2011, la structure des exportations s’oriente de plus en plus vers les produits gazeux. La part des produits gazeux durant la période 1962-1999 ne représentait que 29% contre 43% durant la période 2000-2010. Quant aux produits liquides, ils représentaient 71% des volumes exportés durant la période 1962-1999, contre 57% fin 2010. Le pétrole brut exporté représentait 95% des hydrocarbures liquides en 1971 et se situé à 30% en 2010. Quant aux produits raffinés et GNL, leur part a augmenté substantiellement passant de 3% en 1971 à 28% en 2010. Mais Hassi Messaoud et Hassi R’mel vont à l’épuisement malgré toutes les techniques de récupération, bien qu’à l’heure actuelle, .l'essentiel de la production gazière algérienne est tirée des gisements de Hassi R'mel qui est en déclin, suivis de ceux de In Salah et In Amenas. Pour 2011/2012, cette production se situe au même niveau que celle de 2010 à près de 63/66 milliards m3, selon les rapports de Sonatrach. L'objectif des 86 milliards m3 déjà annoncé par le groupe devait intervenir à l'horizon 2014, sera certainement non tenu à cette date qui avait été déjà donnée par Sonatrach du fait de l’avec l’actuelle déprime du prix du gaz sur le marché mondial due à la concurrence d’autres producteurs et de la révolution du gaz de schiste notamment aux USA. Les contrats récents avec bon nombre de partenaires étrangers de "boosting de production qui est une technique servant à rehausser le niveau de pression dans les gisements en leur permettant de maintenir le même plateau de production devait aider à optimiser les gisements en production de In Amenas, dont la production est en déclin. Depuis 2006, l'exploitation autour d'In Amenas est menée conjointement par l'entreprise nationale algérienne Sonatrrach , Britisch et Statoil. En moyenne 2010/2011, le site de In Amenas a produit 50 000 barils par jour de condensat de gaz naturel ainsi que 9 milliards de mètres cubes de gaz naturel par an. Si l’on prend une moyenne de 55 à 60 milliards d’exportation ces trois dernières années, la part d’In Amenas représente entre 17 à 15% des exportations totales ce qui est important pour les recettes du pays. Avec les nouveaux champs limitrophes, ce taux devrait aller vers 25/30 %, cette zone devenant donc éminemment stratégique. L’Algérie étant un acteur stratégique pour l’Europe où sa part de marché variant entre 13 et 15% de l’approvisionnement derrière la Russie et la Norvège, cette situation interpelle l’Europe pour sa sécurité énergétique, bien que fortement concurrencé par le South Stream russe, le gaz africain, libyen et qataris.

En résumé, le pouvoir algérien réagira fortement (2) à cette situation pour une double raison : premièrement, l’Algérie a souffert pendant une décennie du terrorisme avec plusieurs centaines de milliers de morts avec des destructions massives , ce qui ne saurait signifier que le peuple algérien notamment la jeunesse désemparée ne veut pas d’un changement profond, supposant une autre gouvernance, sinon les mêmes causes provoqueront les mêmes effets à terme, la distribution passive de al rente pour une paix sociale éphémère n’étant pas la solution, et deuxièmement que les hydrocarbures sont le poumon de l’économie algérienne.

Dr Abderrahmane MEBTOUL

Professeur des Universités Expert International en management stratégique

(1) Interview à Radio France Internationale diffusion 18 janvier 2013 –réalisée par Jean Pierre BORIS journaliste RFI- Paris d’Abderrahmane MEBTOUL professeur des Universités Expert International en management stratégique directeur d’Etudes Ministère Energie Sonatrach 1974/1979-1990/1995-2000/2006

(2) Cette contribution a été rédigée le 18 janvier 2013

Plus d'articles de : Analyse

Commentaires (7) | Réagir ?

avatar
adil ahmed

merci

avatar
real politik9085

Il n y a pas de valeur, d’idéologie ou de corps qui ne soit pas critiquable y compris notre armée, notre nation et notre religion. Il y va de notre survie et de notre pérennité.

visualisation: 2 / 7