''Walaɣ tafukt seg usfaylu'': un recueil de Jaan Kaplinski traduit en tamazight

Le Matin 07-10-2017 65600

''Walaɣ tafukt seg usfaylu'': un recueil de Jaan Kaplinski traduit en tamazight
La couverture de l'ouvrage.

Comme chaque année et parallèlement à la rentrée littéraire, un autre rendez-vous avec la traduction en tamazight de la littérature nordique. En effet, ''Walaɣ tafukt seg usfaylu'', un recueil de poésie de l’écrivain estonien Jaan Kaplinski, sortira le 20 octobre chez les éditions Oxygen Publishing House en Algérie. Cette nouvelle parution est la cinquième traduction en tamazight de la littérature nordique, qui sera publiée par Oxygen. Ce recueil se veut aussi rendre hommage à Jaan Kaplinski, qui avait traduit en estonien des écrivains algériens pendant les années 1960, et aussi à l’écrivain classique estonien Friedebert Tuglas.

Né en 1941, Jaan Kaplinski est poète, romancier, essayiste et dramaturge, traduit dans plus d'une vingtaine de langues dans le monde. Pendant les années 1960, Il avait remarquablement contribué au renouveau littéraire en Estonie. Ses premiers recueils de poèmes sont parus depuis plus d'un demi-siècle en Estonie, Il y accorde visiblement ’’une place importante à la nature et à l'influence des religions asiatiques, notamment le bouddhisme’’.

''Walaɣ tafukt seg usfaylu'' sera donc une occasion pour les lecteurs d’expression amazighe de découvrir l’œuvre de cet immense poète, qui a reçu de nombreux prix littéraire en Europe. Entre autres le grand prix de littérature de l'Assemblé baltique (1997), le prix russe de littérature (2015), lauréat du prix européen de littérature, et sa candidature est régulièrement proposée pour le prix Nobel de la littérature.

Dans ce recueil, Kaplinski s'inspire notamment de ses émotions, son enfance, ses voyages et ses expériences. Parfois sa poésie accorde même une importance aux détails de son enfance, son quotidien dans son village à Vana-Mutiku et à Tartu, sa ville natale en Estonie.

''Walaɣ tafukt seg usfaylu'' présente des textes philosophiques et politiques, des ’’poèmes aux vers courts, libres et non rimés’’, qui définissent le style unique de Kaplinski. D’ailleurs, sa renommée est largement due à son style, où il aborde des formes poétiques très diverses, en se focaliseant sur la précision et la création d'images novatrices.

D’autres part, comme dans toute la poésie nordique, le rythme des saisons et la splendeur de la nature sont souvent présents dans les images du poète. Ses textes philosophiques et politiques embrassent distinctement une diversité, et transmettent souvent une émotion particulière à la portée de ses lecteurs.

Sa poésie qui débute parfois par des situations ordinaires est souvent envellopée dans une nouveauté remarquable, affranchie d’autres influences et appelle à une ouverture à l'experience humaine.

''Walaɣ tafukt seg usfaylu'' décrit la nature comme une beauté du monde, présente l’expérience humaine comme une source d’inspiration, et incarne une ’’poésie méditative, parfois influencée par les sagesses orientales’’.

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La littérature algéro-estonienne: une rapport qui date de près d'un siècle:

À souligner, l’écrivain estonien Friedebert Tuglas (1886-1971) séjourna en 1928, en Algérie, et rendit hommage à l’Algérie comme à la Kabylie dans son livre ’’Voyage en Afrique du Nord - Algérie’’ (Teekond Põhja-Afrika – Alžeeria), qui fut paru en 1929, en Estonie.

Dans son livre, Tuglas écrivit : ''Les montagnes de Djurdjura me semblent comme des grands murs qui protègent la Kabylie de ses occupants. D'ailleurs même les Romaines n'ont pas pu abattre cette région montagnarde en raison de la résistance farouche de ses guerriers. Et par conséquent, la région a maintenu son règne sous ses leaders. En outre, ce n'était jamais facile pour les Français de ''calmer'' les soulèvements populaires en Kabylie, et tout cela est une longue histoire…''. (1)

Pendant les années 1960, Jaan Kaplinski avait traduit en estonien des poèmes du poète algérien Bachir Hadj Ali, et dans un autre recueil, il a dédié un long poème à Mouloud Feraoun et à l'élite du monde assassinée par ''les forces du mal''. Il introduit Mouloud Feraoun comme "une fleur qui est trop lourde pour sa branche".

Pareillement, Kaplinski a contribué à la traduction en estonienne du roman ''la dernière impression'' de Malek Haddad. Il est à noter que ce livre fut traduit en Estonien par sa mère Nora Raudsepp-Kaplinski (1906-1982), philologue estonienne francophone, et paru en 1969 aux éditions Hans Heidemmani, en Estonie. Dans la préface du livre qu'il avait écrite lui-même, Kaplinski rendit hommage à d’autres écrivains algériens à savoir Mouloud Mammeri, Kateb Yacine...etc. (2).

À rappeler, le roman ''Un été Africain'', de Mohamed Dib, paru en 1959, aux éditions le seuil à Paris, fut le premier roman algérien à être traduit en estonien par la traductrice Nelly Toiger. Cette traduction est parue en 1962, aux éditions Trukikoda ''Kommunist'', à Tallinn, en Estonie.

Enfin, ''Walaɣ tafukt seg usfaylu'' est un projet de traduction qui a été lancé en Mai 2015, sur l’initiative du traducteur et le poète, en collaboration avec ’’Cultural Endowment of Estonia’’ (La Dotation Culturelle de l’Estonie), qui est, en effet, la seule institution officielle en Estonie qui promeut la littérature estonienne à l'étranger.

Titre: Walaɣ tafukt seg usfaylu
Pages: 168
Parution: 20 Octobre 2017
Éditions: Oxygen Publishing House (Algérie)
Auteur: Jaan Kaplinski
Traducteur: Hamza Amarouche
Infographie: Ingrid Amarouche

Renvoi

(1) ''Reisikirjad'' de Friedebert Tuglas , Page 311. Editions Eesti Riiklik, 1956.

Lire aussi: La littérature algérienne en Estonie : à quoi rêvent les Baltes ?

(2) Jaan Kaplinski : "Bachir Hadj Ali est un grand poète et les récits de Feraoun m'ont toujours marqué"

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