La Coupe du monde au Qatar : vers un rebondissement après les révélations de Blatter ?

Le Matin 24-06-2017 18625

La Coupe du monde au Qatar : vers un rebondissement après les révélations de Blatter ?

Alors que Qatar est isolé diplomatiquement, Joseph Blatter accuse Sarkozy d’avoir magouillé pour offrir le Mondial au Qatar

Joseph Blatter, ancien président de la Fédération internationale de football (Fifa) accuse Sarkozy d’être derrière la combine qui a permis au Qatar d’obtenir l’organisation du Mondial-2022. Tout s’est joué, rappelle-t-il, le 23 novembre 2010 au cours d’un déjeuner à l’Elysée regroupant Nicolas Sarkozy (alors président français en exercice), Tamim Ben Hamad Al-Thani – actuel Emir du Qatar, qui était prince héritier au moment des faits – et Michel Platini, qui présidait l’Union européenne de football (UEFA). Sarkozy a actionné Platini en lui demandant de voter pour les intérêts français, c’est-à-dire en faveur du Qatar. Moins d’un mois après, lors du vote d’attribution du Mondial-2022 organisé le 2 décembre 2010, Platini s’est exécuté et a changé son vote en faveur de l’Emirat qui l’a ainsi remporté par 14 voix contre 8. C’est Blatter qui rapporte tout cela à un journaliste anglais dans un livre qu’il lui a consacré.

La déclaration de Blatter accusant Sarkozy d’être à l’origine du vote de Platini en faveur du Qatar, donne aux Français le droit de demander des comptes à leur ancien président sur les circonstances qui l’ont amené à impliquer la France, au plus haut niveau, dans l’attribution de l’organisation du Mondial-2022. On sait que la justice française à travers le Parquet national financier (PNF), en charge de la grande délinquance financière, a commencé à effectuer, il y a une année, des vérifications sur l’affaire du Mondial-2022 justifiées par le fait que des ressortissants français y sont mêlés. Il s’agit, selon les médias français, d’une enquête préliminaire pour «corruption privée», «association de malfaiteurs», «trafic d’influence et recel de trafic d’influence».

Si le rôle de Platini est considéré comme essentiel dans cette affaire, l’enquête pourrait ne pas se concentrer uniquement sur lui dans la mesure où le nom de Sarkozy est cité par Blatter, qui le désigne comme étant derrière le revirement de Platini et son vote pour le Qatar. Ceci dit, Blatter confirme que la Fifa est une institution corrompue jusqu’à la moelle et on comprend maintenant la campagne américaine contre cet organe synonyme d’immoralité.

En 2014, l’émirat gazier a été suspecté d’avoir versé des pots de vin pour obtenir le Mondial. Puis, en 2016, plusieurs ONG ont dénoncé le recours au travail forcé dans la construction des stades. Même Sepp Blatter, l’ancien président de la Fifa avait fini par admettre que l’ organisation du Mondial par le Qatar n’était "pas une bonne idée".

Mais à chaque fois, le Qatar a été conforté et il a été décidé que la compétition se déroulerait à l’automne , afin d’éviter des conditions de jeu trop caniculaires.

Alors que l’Australie et l’Angleterre s’étaient proposées comme solutions de rechange, l’incertitude revient planer autour de l’organisation qatarie.

Des approvisionnements compliqués. L’embargo diplomatique touchant le Qatar pourrait retarder la construction des stades et ternir l’image du petit émirat. Mais son partenariat avec la Fifa semble extrêmement solide. Isolé diplomatiquement par ses voisins du Golfe Persique , le Qatar pourrait rapidement pâtir du blocus diplomatique et économique décidé par l’ Arabie saoudite et ses alliés. Ainsi, selon des analystes, le seul accès terrestre pour le Qatar est désormais coupé , menaçant ainsi ses importations de produits alimentaires frais et de matières premières nécessaires pour ses projets d’infrastructure de quelque 200 milliards de dollars liés au Mondial 2022 "Environ 40% de l’approvisionnement alimentaire du Qatar transite par la frontière terrestre avec l’Arabie saoudite", selon une étude d’ Anthony Skinner, directeur pour le Moyen-Orient d’un cabinet de conseil mondial en risques.

A cela, est venue s'ajouter la sortie

Désormais, les autorités qataries "dépendront de plus en plus du fret maritime et aérien, ce qui augmentera les coûts et l’inflation" , explique Anthony Skinner, interrogé par l’AFP.

L’alternative pour le Qatar est d’importer des vivres d’Iran ou d’ Oman par voie maritime, et par avion depuis la Turquie , l’Europe et l’Asie du Sud-Est . Or, l’Arabie saoudite et ses alliés ont suspendu les liaisons aériennes avec le Qatar et fermé les bureaux de la compagnie aérienne de ce pays. Ces mesures obligeraient ainsi Qatar Airways à changer de routes, causant des surcoûts d’ exploitation.

Qatar Airways , le sponsor numéro 1 de la Fifa

Et il se trouve que Qatar Airways, sponsor du FC Barcelone jusqu’à cette saison , a signé un accord de parrainage avec la Fifa en mai dernier. La Fédération internationale n’a pas dévoilé le montant mais a évoqué un "des plus gros contrats de sponsoring sportif au niveau mondial".

Les deux parties sont désormais intimement liées et on voit mal comment la Fifa pourrait lâcher son partenaire préféré.

Même si Sabri Lamouchi, l’ entraîneur français du club de l’ armée qatarienne El Jaish SC a avoué dans L’Equipe qu’il "y a eu un peu d’affolement et de panique lundi" , après l’annonce du blocus, le Qatar devrait tenir ses engagements footballistiques. Dans un communiqué , la Fifa a déclaré "être en contact régulier avec le comité local d’organisation", mais elle s’est refusée à tout autre commentaire.

Le Qatar ne devrait pas faire comme la Colombie

En cas de non-respect du délai de livraison des enceintes sportives prévues pour la compétition , un autre pays hôte pourrait être désigné comme ce fut le cas en 1983, lorsque la Colombie avait jeté l’ éponge , au profit du Mexique , dans l’organisation du Mundial 1986.

Mais les travaux ont avancé au pas de charge au Qatar et un nouveau stade est d’ores et déjà prêt à accueillir une compétition qui devrait attirer 1,3 million de spectateurs dans le petit émirat.

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