Du meilleur moyen de voter

Le Matin 25-04-2017 5384

Du meilleur moyen de voter
Une image avec son message pour la campagne détournés par les réseaux sociaux.

A propos des prochaines élections législatives, des observations de Nacer Djabi, chercheur en sociologie politique (http://www.elwatan.com) sont très intéressantes à lire et méditer. Il conclut : "Et si le changement ne s’opère pas par les partis et les couches moyennes à travers des élections, il va se faire par la rue et dans la violence."

A plus ou moins courte échéance, ce pronostic est plausible. Mais, si la première alternative semble difficile à naître, et si l’on veut éviter la seconde, n’y aurait-il donc pas d’autre solution ?

Certes, elle ne consisterait ni en un immédiat lendemain qui chante, ni en un Grand Soir qui change tout. Mais en un travail long, patient, à long terme, se réalisant chaque jour.

Il ne sera pas, évidemment, l’œuvre de ceux qui vivent de privilèges octroyés par le système socio-politique actuel : les bureaucrates, les notables et les nouveaux riches. C’est logique. Les partis dit d’opposition ne montrent pas, non plus, de capacité à réaliser un réel changement.

Alors, qui ?

Ceux qui, selon Djabi, ne participent largement pas au vote, "les jeunes diplômés et lettrés", et "l’Algérie réelle, qui travaille et qui étudie". Ces catégories de citoyens savent, comme l’affirme Djabi, que l’action réellement utile ne se déroulent pas dans le cadre du système électoral actuel.

Alors, comment peuvent-ils ne pas tomber dans la résignation et agir pour un changement social réel dans le pays, en faveur des démunis, à savoir la majorité du peuple, en les affranchissant de l’emprise dominatrice et manipulatrice des nouveaux riches, privés, et des notables de la caste étatique ?

Il me semble que l’histoire, mondiale et du pays, fournit l’enseignement nécessaire.

L’action utile se trouve principalement et d’abord dans les actions citoyennes de base, collectives, sur les lieux de travail, d’études et de vie. Dans les syndicats, dans les comités populaires, dans toutes les formes d’associations autogérées, autrement dit composées de citoyens libres et autonomes, acceptant d’agir de manière libre et solidaire.

Certes, ce genre d’activités a un aspect modeste ; il n’intéresse généralement pas les médias, obnubilés par les conflits au sommet de la hiérarchie. Ce genre d’activités, également, exige du temps, s’étale sur la longue durée, tout en fournissant des résultats partiels. Ils ne sont pas à négliger, ils forment les premiers flocons de la boule de neige que sera la naissance d’un large mouvement citoyen.

Il ne devra pas être chapeauté par des hiérarques de partis, quelles que soient leurs bonnes intentions, parce que les partis existent pour satisfaire d’abord les privilèges de leurs chefs, ensuite et si possible, de leurs militants.

Le mouvement citoyen, lui, devra veiller à fonctionner de la manière la plus libre, démocratique et solidaire possibles. Les expériences autogestionnaires algériennes et dans le monde sont de précieuses sources d’inspiration. Elles démontrent que c’est possible si on est convaincu du but, et qu’on possède une méthode pour le concrétiser.

Il me semble que c’est uniquement de cette manière qu’il sera possible, petit à petit, progressivement, de sensibiliser les citoyens des villes et des villages, de les convaincre que leur sort est entre leurs mains, et aucunement dans celles de chefs, qu’ils soient de clan, de tribu, de région ou de partis.

N’accusons pas le peuple de "dormir”, d’être "ignorant", "passif". Avant de le penser et de le dire, demandons-nous : que faisons-nous, concrètement, nous, qui prétendons savoir, pour l’aider à sortir de son aliénation. Sur ce thème, j’y reviendrai dans une prochaine contribution.

Demandons-nous également : pourquoi ne croyons-nous pas que le changement social réel ne peut venir que de nos actions citoyennes, libres et solidaires ? Et si nous le croyons, qu’attendons-nous pour passer à l’action, je le répète, humble, à longue durée mais la seule qui peut construire une société selon nos beaux espoirs ?… N’est-ce pas là le meilleur moyen de voter ?… Ce genre de vote ne consiste pas à consacrer une heure dans un bureau de vote, en faveur d’une personne généralement incontrôlable, mais une partie de la vie parmi les compatriotes les plus défavorisés par le système dominant, pour les rendre responsables de leurs propres droits et devoirs.

Ce genre de vote, personne d’autre que notre conscience de l’équité sociale nous le demande, et personne d’autre que les victimes d’injustice sociale en sont bénéficiaires. Alors, ce vote contribuera à une Algérie réellement pacifique et prospère, parce que l’ensemble des communautés qui la composent y trouveront leur bien légitime, sans se nuire les uns les autres.

Kaddour Naïmi

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