C'est pour quand un projet de société ?

Le Matin 18-04-2017 13108

C'est pour quand un projet de société ?

"Ce n'est pas en combattant la réalité existante, écrit le philosophe Hakim Bey, qu'on va changer quoi que ce soit. Si vous voulez changer quelque chose, construisez plutôt un nouveau modèle qui rend le modèle existant obsolète".

Dans notre cas en Algérie, cela devrait être "un projet de société" qui prend en compte toutes les spécificités de notre contexte actuel. D'aucuns me diront, sans aucun doute, qu'on en a déjà parlé depuis des lustres dans la haute sphère mais qu’on n'en voit rien de concret sur le terrain et que l'urgence, c'est de s'attaquer aux problèmes conjoncturels dont souffrent les Algériens (la cherté de la vie, le chômage, la violence sociale, etc). La vérité est qu'il n'y a eu aucun "projet de société" digne de ce nom chez nous !

En continuant d'agir de la sorte, les autorités allégeront, certes, les effets de la crise mais ne parviendront jamais à la résoudre. Car, bien qu'utiles, les palliatifs n'influent que dans la circonstance. Or, l'important, c'est de bien diagnostiquer nos maux et leur chercher une thérapie durable. Comment serait-ce possible alors que nos cadres nous fuient par centaines chaque année ? Que la jeunesse est marginalisée et que la bureaucratie a creusé un énorme fossé entre ceux d'en haut et ceux d'en-bas? Pas de recette-miracle, à vrai dire, sauf celle d'avoir l’audace de nommer les choses par leur nom, laisser s'exprimer librement les alternatives citoyennes pour avancer dans les chantiers de réformes structurelles, et tracer par le biais d'un dialogue politico-social sans exclusive la voie stratégique à suivre dans le futur. Il s'agit, en premier lieu, de sortir de cette logique rentière qui gangrène les appareils étatiques pour jeter les fondations d'un Etat pragmatique, citoyen et démocratique.Comment? Par la réactivation de la dynamique éducative et culturelle.

Le défi d'avenir est, encore faudrait-il le répéter dans ce billet, de lancer une véritable révolution culturelle, d'abord en dotant le pays d'infrastructures vitales (laboratoires et centres de recherches, institutions culturelles performantes : médias alternatifs, bibliothèques, théâtres, cinémas,etc), puis, en s'investissant à fond dans le volet humain (dispenser une meilleure formation possible pour les nouveaux cadres dans le domaine du management, la gestion des ressources humaines, la cybernétique, etc).

Renflouer les caisses des secteurs éducatifs et culturels ne suffit pas tant qu'on ne crée pas cet élan d'esprit vers tout ce qui nous relie à nous mêmes, à notre environnement, à la société de demain et au monde de la technologie moderne!

Le plus tôt sera le mieux, bien sûr. Il va falloir, en second lieu, dépolitiser et débureaucratiser l'acte économique avec une assiette juridique constructive, ouvrir les portes d'un investissement créateur de richesses aux start-up et aux compétences locales, tout en s'attachant au suivi rigoureux de la cadence de leur évolution. Autrement dit, insuffler de la compétitivité dans notre économie pour "booster" nos élites et les pousser au renouveau politique. Un projet de société doit inclure quatre variables principales : la jeunesse, la culture, la technologie, l'économie, lesquelles devront fusionner avec l’aspect politique pour déboucher sur «la bonne gouvernance» qu'on attend depuis longtemps, en vain !

Kamal Guerroua

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