Les walis de la Kabylie décident : les festivités du 20 avril seront limitées aux conférences !

Le Matin 20-03-2017 20754

Les walis de la Kabylie décident : les festivités du 20 avril seront limitées aux conférences !
Après avoir longtemps réprimé la célébration du 20 Avril, le pouvoir change de méthode. Plus pernicieuse celle-là.

La Kabylie, le bastion de la démocratie, de la diversité et de la tolérance. Certains vont jusqu'à qualifier ses deux agglomérations : Bgayet et Tizi Ouzou de capitales politiques de l'Algérie, ce sont presque les seuls lieux où les citoyens sortent encore dans la rue pour défier le pouvoir en place, revendiquer leurs droits et protester contre les dépassements et les abus de pouvoir, et cela sans incident et sans violence.

Cette maturité politique n'est pas tombée du ciel sur les habitants de cette région, mais c'est bien le fruit des luttes de longue haleine et de sacrifices. Même que le combat pour la liberté était toujours et à travers les siècles la devise de ces braves Montagnards contre tous les oppresseurs. Après la guerre de libération qui a anéanti ses foyers, qui a sacrifié ses héros et qui a gommé son élite, comme un phénix, la Kabylie a ressuscité de ses cendres pour faire face en septembre 1963, à ceux qui ont voulu dérober au peuple son indépendance. Ces gens qui durant les années de braise savouraient la Mouloukhia au Caire et le tajine à Oujda ont osé diriger leurs fusils vers les libérateurs du pays.

Le deuxième sursaut était le 20 avril 1980, le printemps berbère avant que les "Arabes" ne connaissent le sens du soulèvement. En cette date, la Kabylie s'est soulevée comme un seul homme pour dire Halte ! à l'usurpation de l'identité millénaire et à la marginalisation de la langue et de la culture de nos mères. En dépit de la répression aveugle contre l'élite, les étudiants, les enfants de chahids et tous ceux qui ont refusé la soumission et le joug, la revendication est restée pacifique.

Depuis, le 20 avril est devenu le symbole de la lutte par la paix pour la paix, la justice et les droits. La population a proclamé cette date historique jour férié dans toute la Kabylie. Chaque année, il est fêté dans le calme, la sérénité et la sécurité. Et le peuple gardien et garant de la mémoire collective faisait tout pour ne pas connaître le printemps noir, mais les résidents des manoirs ont décidé de le contraindre à le voir et le marquer par un saignoir afin que ses hoirs le trouvent dans l'histoire.

En dépit du sang et des larmes coulés, en dépit de la douleur et de la révolte ressenties, la sagesse et la maturité ont pris le dessus et tous les 20 avril qui ont suivi ont été fêtés dans sérénité et le pouvoir ne se mêlait jamais.

Apparemment, cette année, le cas sera différent. À en croire le quotidien arabophone Al-Fadjr, le 13 de ce mois, les walis de Tizi Ouzou et de Bgayet ont donné des instructions aux chefs de daïra de réduire au minimum les festivités de cet anniversaire et de les limiter aux conférences culturelles et historiques par l'argument de faire barrage au MAK et de préserver le calme dans la région surtout que la campagne électorale pour les législatives débutera bientôt (le 4 mai).

La question évidente qui saute à l'esprit est la suivante : Est-ce que les deux partis politiques largement représentés en Kabylie le RCD et le FFS participeront-ils à ces festivités ou bien les instructions des deux walis leur conviennent, surtout qu'ils participent tous les deux aux élections prochaines et qu'ils sont tous les deux hostiles au MAK ? L'avenir nous le dira sûrement.

Rachid Mouaci

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